En crise depuis plus de cinq ans, le football malien pourrait s’en sortir au cours de l’été. Mais les rivalités de clans et de personnes ont fait beaucoup de mal aux clubs, dont les finances sont dans le rouge.
Le Mali a échappé de peu à une suspension de la Fifa, et donc à une disqualification pour la CAN 2019. La Fédération malienne de football (Femafoot), pilotée par un Comité de normalisation, a en effet adopté les nouveaux statuts le 15 juin dernier, lors d’une Assemblée générale ordinaire qui a duré plus de quatorze heures.
« Cela a été long, tendu. Le président de la République Ibrahim Boubacar Keïta lui-même a fait passer le message qu’il n’accepterait pas que le Mali soit suspendu par la Fifa (cela lui était déjà arrivé en 2017, NDLR). Et qu’il convenait donc d’adopter les statuts avant l’échéance fixée par cette dernière, soit le 15 juin à minuit », explique une source présente lors de cette sulfureuse AG, samedi 15 juin à Bamako.
Quand les dirigeants assurent les fins de mois…
Si tout se passe comme prévu, le championnat, à l’arrêt depuis deux ans, reprendra en août prochain, avec 23 équipes en D1 et 28 en D2. Un moment forcément très attendu par les joueurs, les entraîneurs et les dirigeants. « Cela ne pouvait plus durer. La situation économique des clubs est très précaire. Car même si le championnat ne se déroule pas, il faut tout de même payer les salaires (joueurs, staff technique, personnel administratif), entretenir nos installations, s’occuper des soins des joueurs, les aider pour les transports », soupire Modibo Coulibaly, le secrétaire général de Djoliba AC, l’un des meilleurs clubs du pays.
«C’est simple, notre masse salariale mensuelle est de 8 millions de francs CFA (12 200 euros). Or, nous n’avons plus de matchs de championnat, donc plus de recettes aux guichets. Le sponsor de la D1, Orange, versait 20 millions de francs CFA (30 500 euros) par club et par saison. Mais depuis trois ans, nous n’avons plus rien touché. Et au Mali, le sponsoring privé n’est pas dans la culture, ou très peu. »
À Djoliba comme dans les autres clubs du pays, le salut passe donc par l’implication personnelle des dirigeants, qui mettent la main à la poche pour que les salaires et les autres frais de fonctionnement soient assurés. « Notre budget annuel est d’environ 180 millions de francs CFA (274 500 euros environ). Les salaires des joueurs vont de 100 000 à 300 000 francs CFA (155 à 310 euros). On se doit donc de les honorer. Les dirigeants, et le plus souvent les présidents, mettent de leur argent personnel. Pour les clubs qui peuvent participer aux coupes d’Afrique, cela peut permettre d’engendrer quelques revenus. En 2017, quand la Fifa a suspendu le Mali, on s’apprêtait à aller affronter Al-Masry, après un succès (2-0) à l’aller. Peut-être aurions pu nous qualifier et atteindre la phase de groupe, qui nous aurait permis de gagner un peu d’argent », poursuit Modibo Coulibaly.
CELA FAIT TROP LONGTEMPS QUE LE BALLON NE ROULE PLUS
En 2018, la Confédération Africaine de Football (CAF) avait autorisé le vainqueur de la Coupe (Stade Malien) à représenter le Mali en Ligue des Champions et le finaliste (Djoliba AC) en Coupe de la Confédération. « On va demander à la CAF une dérogation afin que ces deux clubs soient autorisés à jouer les compétitions africaines en 2019-2020 », poursuit Coulibaly.
Un nouveau président en août
Les clubs maliens ont sollicité l’État, afin que celui-ci encourage les entreprises publiques à investir dans le football, en contrepartie d’avantages fiscaux. Pour l’instant, celui-ci n’a pas répondu. « Tous les clubs sont en difficulté financière, y compris les plus grands. Ici, ce n’est pas professionnel au sens où on l’entend en Europe. Cela fait trop longtemps que le ballon ne roule plus, dans un pays de foot. Toutes les catégories d’âge sont touchées, et c’était important de sortir de cette crise », explique, soulagé, l’ancien international Pathé Diallo.
Mais tout n’est pas encore totalement réglé : l’élection du futur président de la Femafoot devra avoir lieu avant fin août.
Jeune Afrique