L’expulsion de ressortissants maliens en France revient au-devant de la scène sur fond de négociations secrètes entre les gouvernements français et malien. En effet, lors de la récente visite du 22 au 24 févriers, du Premier ministre français, Edouard Philippe, au Mali, la question sensible de l’immigration aurait été abordée entre les autorités des deux pays. Au-delà, de nombreux maliens estiment, aujourd’hui, que le gouvernement mène un jeu trouble concernant l’épineuse question des migrants maliens.
La question sur le retour des migrants maliens séjournant irrégulièrement en France et la signature d’accords de réadmissions, facilitant le retour au pays de ces irréguliers refait surface. En effet, dans un document du Ministère de l’intérieur français sont détaillées les mesures urgentes pour « rechercher une coopération renouvelée avec les pays d’origine et de transit ».
Le Mali figure dans la liste des six pays prioritaires et doit faire l’objet « d’un suivi attentif mensuel et d’une action bilatérale de haut niveau ».
Dans le cas du Mali, le document préconisait de demander « à notre nouvel ambassadeur à Bamako de faire une démarche auprès des autorités maliennes, après l’élection présidentielle [d’août 2018], pour leur indiquer que la France souhaite améliorer les procédures en matière d’identification et de délivrance de LPC [laissez-passer consulaires] ». En fait, la France estime que le Mali ne délivre pas assez de LPC et, sans ce formulaire, qui reconnaît qu’un sans-papiers est bien malien, impossible de le remettre dans l’avion.
Matignon estime en effet à 100 000 le nombre de Maliens régulièrement installés en France en 2018, mais aucune estimation n’est disponible concernant les irréguliers. Plusieurs spécialistes avancent qu’ils seraient au moins autant en situation irrégulière, Des régularisations en échange de réadmissions ? C’est exactement ce que la France voudrait négocier avec le Mali depuis des dizaines d’années. En octobre 2018, l’Hexagone avait signé 43 accords bilatéraux de réadmissions avec le Mali. Mais, entre 2006 et 2009, le Mali a, à deux reprises, refusé l’arrangement proposé par les Français.
Pour rappel en décembre 2016, la signature d’un accord de migration entre le gouvernement et l’union européenne avait provoqué de forts remous. En effet, lors de sa visite à Bamako, le 11 décembre 2016, le ministre néerlandais des affaires étrangères avait présenté un document dans lequel, le Mali acceptait le retour des migrants irréguliers.
Cette annonce avait déclenché une véritable tempête au sein de l’opinion publique contraignant les autorités maliennes à démentir fermement la signature d’un tel accord.
Les ministres des affaires étrangères et celui des maliens de l’extérieur de l’époque avaient rejeté fermement la signature de tout accord de réadmission des “demandeurs d’asile refusés” avec l’Union Européenne.
L’embarras palpable du premier ministre Soumeylou Boubèye Maïga à répondre à des questions sur le retour des migrants maliens séjournant irrégulièrement en France lors de la conférence de presse conjointe du 23 février dernier avec son homologue français prouve que le sujet était bel et bien au cœur des débats entre les deux pays.
Mémé Sanogo
Source: L’Aube