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Experte comptable : Mme Sidibé Fatoumata Cissé, une notoriété forgée dans l’effort

Elle préside aux destinées du conseil de l’Ordre national des experts comptables et comptables agréés du Mali et a prouvé que les femmes peuvent bien se faire une place dans ce cercle fermé

 

Sous nos cieux, à des exceptions près, des secteurs d’activités ou domaines de connaissance (notamment scientifiques) semblent être la chasse gardée des hommes. Afin de corriger ce déséquilibre, des organisations internationales invitent les états à faciliter l’accès des filles à des filières scientifiques et mettent des moyens à disposition pour ce faire. Une femme qui arrive à se bâtir une riche carrière dans ces domaines tend à devenir l’exception qui confirme la règle.

En effet, dans le cercle restreint des femmes expertes comptables figure Mme Sidibé Fatoumata Cissé. Nous l’avons rencontrée récemment lors d’un événement virtuel organisé par ONU-Femme sur le thème : «La place des femmes dans les métiers d’experts comptables et d’audit. Inscrite au tableau de l’Ordre des experts comptables et comptables agréés du Mali depuis 2006, elle est la présidente du conseil de l’Ordre national des experts comptables et comptables agréés du Mali (Onecca), depuis août 2015. Mme Sidibé Fatoumata Cissé est aussi la présidente en exercice de la Fédération internationale des experts comptables francophones. La Fidef regroupe les organisations professionnelles comptables d’une quarantaine de pays.

Au conseil de l’Ordre national des experts comptables et comptables agréés du Mali, elles sont 13 dont deux femmes comptables agréées sur un total de 103 experts comptables et comptables agrées que compte le pays. Cette sous-représentativité dénote des difficultés qu’ont les femmes pour se faire une place au soleil dans ce secteur. «Pour être présidente de l’Ordre, il a fallu du temps, de la patience et de la persévérance. Lorsqu’un homme se présente pour être président de l’Ordre, cela ne pose aucun problème», confesse-t-elle. Mais une femme qui nourrit cette ambition, devra prouver sa capacité intellectuelle et son expertise afin de convaincre les hommes de voter pour elle, déplore l’experte comptable, dont les débuts à la tête de l’Ordre n’ont pas été de tout repos. L’une des principales astuces qui lui ont permis de s’imposer: se faire accepter de tous et de rester derrière les textes, en les respectant scrupuleusement.

Fille d’un vétérinaire, Mme Sidibé est la benjamine d’une fratrie de dix enfants. Elle semble être l’exception dans la famille. En la matière, elle y est la seule à avoir embrasser le métier d’expertise comptable. Un rêve d’enfance qui est devenu réalité. «Depuis la neuvième année de l’école fondamentale, j’ai eu à côtoyer des experts comptables. Le métier me fascinait. Je disais que j’allais devenir expert-comptable. La suite de mes études a été faite dans ce cadre. J’ai également eu un mari expert-comptable qui m’a beaucoup encouragée à concrétiser ce rêve. Si je suis expert-comptable aujourd’hui, je le dois à lui. Car, faire des études longues étant mariée est difficilement acceptable pour beaucoup de maris», reconnaît-elle.

Aujourd’hui directrice du cabinet d’expertise et de commissariat aux comptes de Koni Audit, Mme Sidibé est détentrice d’un diplôme d’expertise comptable de l’Institut national des technologies économiques et comptables (Intec) en France. Avant, elle avait soutenu un mémoire de maîtrise en gestion à l’ancienne école nationale d’administration (ENA). Durant sa riche expérience dans les domaines de la gestion, du conseil en gestion et audit qui dure depuis 24 ans, elle a eu à superviser plusieurs missions d’organisation, d’audit, de commissariat aux comptes et d’assistance comptable.

Extraterrestre- Pour elle, pour être femme experte comptable, il faut s’armer de courage. «La formation d’expertise comptable, ce sont des études de longue durée : bac + 8 ans d’études. L’attente des familles est longue et les parents s’impatientent. Le concilier avec la vie de foyer est encore très compliqué. Le métier d’expertise comptable est un métier très prenant, exigeant, de haute qualité et demande beaucoup de compétences. Il faut donc une bonne organisation pour pouvoir s’en sortir», conseille Mme Sidibé. Elle reconnaît que le développement technologique a allégé l’exercice de la profession comparé au moment où «nous commencions». En audit et même dans d’autres domaines, nous bénéficions par exemple de beaucoup des bienfaits de la technologie. Des applications ont été développées pour nous faciliter la tâche, se réjouit-elle.

En plus de la pression professionnelle, les femmes qui épousent cette profession sont victimes de préjugés qu’on est tenté de coller à elles. «C’est le regard que les gens portent sur la profession qui est difficile. Quand je vais dans l’administration par exemple et me présente, on me regarde comme un extraterrestre. Quand j’ajoute que je suis la présidente de l’Ordre, c’est encore grave. Les gens se font tout de suite des idées fausses ou biaisées de ta personne. Ils diront par exemple que celle-là doit être quelqu’un de très dur pour arriver à se hisser à cette position. En plus de cela, il y a la collaboration avec les hommes» souligne-t-elle. Là, elle fait allusion aux clichés dont souffrent les femmes travaillant dans un milieu foncièrement masculin.

Des considérations qui semblent la motiver davantage à prouver que les femmes peuvent être aussi performantes que les hommes si on leur confiait les mêmes responsabilités. La quinquagénaire est consultante auprès de la Société Koni Expertise depuis 1995. Koni est un bureau d’études spécialisé dans le conseil en gestion publique et privée. à ce titre, elle participe à des missions auprès des structures publiques et privées particulièrement dans le domaine financier. Son expérience s’étend aussi dans plusieurs domaines notamment les mines, les petites et moyennes entreprises (PME), les télécommunications, l’industrie, les banques et assurances, l’énergie, les finances publiques.

Consultante spécialisée en gestion financière auprès de la Banque mondiale, son autre rêve ou challenge est de servir de modèle pour la génération, notamment féminine. Elle souhaite partager son expérience en les conseillant, voire les inciter à faire des études longues. Et se mettre en tête, dès le bas âge, qu’il existe une autre voie beaucoup plus sûre que le salariat. Pour ce faire, Sidibé Fatoumata Cissé dispense, pendant ses temps libres, des cours d’analyse et de gestion financière à l’école supérieure de gestion (ESG), cela depuis 2008.
Ses expertises avérées ont participé à sa notoriété au plan national, régional et international. Elle est membre, depuis 2012, du conseil d’administration de la Fédération internationale des experts comptables francophones (Fidef). Adhérent au bureau du Conseil comptable ouest-africain (CCOA), organe de normalisation comptable de l’Uemoa de 2010-2013, elle est également membre du Conseil permanent de la profession comptable de l’Uemoa, depuis 2015. Elle a présidé l’Association of accountancy bodies in west african (ABWA) de 2015 à 2017.

Ces multiples occupations qu’elle assure avec responsabilité ne semblent pas l’écarter de l’essentiel : la famille. L’experte comptable arrive à concilier le travail et la vie de foyer sans trop de difficulté. «Il s’agit d’une question d’organisation. J’ai mes heures de famille et de travail», explique la mère de quatre enfants. Aussi, le Mali a une culture de famille unique. Quand on n’est pas là, il y aura toujours un membre de la famille qui est chez toi et qui prendra bien soin de ton foyer.

Aminata Dindi SISSOKO

Source : L’ESSOR

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