« Chaque nation façonne la démocratie à sa manière, conformément à ses traditions. Mais l’histoire prononce un verdict clair : les gouvernements qui respectent la volonté de leur peuple, qui gouvernent par le consentement et non par la coercition, sont plus prospères, plus stables et plus florissants que ceux qui ne le font pas. Il ne s’agit pas seulement d’organiser des élections – il faut voir ce qui se passe entre les scrutins. La répression revêt de nombreuses formes et trop de pays, même ceux qui tiennent des élections, sont en proie à des problèmes qui condamnent leur peuple à la pauvreté ».
Ces phrases sont tirées du discours historique tenu en juillet 2009 devant le Parlement ghanéen par Barack Obama, à l’époque Président des Etats-Unis d’Amérique (USA).Ces propos du Premier Président noir de la première puissance mondiale trouvent-ils échos au Mali ? Que oui ! En 2012, le Mali – le bon élève, la démocratie exemplaire, le havre de stabilité – n’a pas résisté à quelques coups de canons tirés par un groupuscule de soldats en colère contre les dirigeants politiques du pays. En quelques heures, la République s’est écroulée comme un château de cartes. La suite est connue de tous : l’occupation des 2/3 du territoire avec les groupes djihadistes et l’intervention des forces étrangères. Et des élections sous l’égide de la communauté internationale. Il faut mettre fin au bricolage institutionnel à l’image du processus de révision de la constitution du 25 février 1992 dont le projet de loi adopté par l’Assemblée nationale et soumis au référendum le 9 juillet prochain pour son approbation par le peuple. Un agenda mécanique ? Pourquoi cette précipitation à tenir le référendum à cette date ? Que fera le gouvernement de l’avis de la Cour constitutionnelle remettant en cause la formulation inappropriée de certains articles ?
L’agenda est tracé par la communauté internationale. Dans les jours à venir, il faut s’attendre à ce que le gouverneur de Kidal et un contingent des Fama regagnent la ville de Kidal dans les bagages de la Minusma ou de Barkhane. Le processus de révision constitutionnelle est un rendez-vous manqué visant à fédérer les forces vives de la nation au chevet du grand malade que les thérapies de choc de la communauté internationale peinent à guérir.
La forte opposition que rencontre la réforme de la constitution interpelle le Président Ibrahim Boubacar Kéïta qui a lamentablement échoué à permettre au pays de s’affranchir de la tutelle internationale. Toujours est-il que la conduite du processus de révision constitutionnelle et la tenue du référendum au mépris des aspirations de certaines couches sociales prouvent à suffisance que le Président IBK n’a pas les épaules assez larges pour porter le costume du rassembleur.
Les événements de 2012 ont déshabillé le modèle institutionnel et le mode de gouvernance instauré depuis 1992. L’espoir suscité au lendemain des élections de 2013 a laissé la place au désespoir, voire à la colère.
Lorsqu’un peuple n’a plus confiance en ses institutions, l’Etat n’a plus de force. Quand des commerçants de foi, sachant réciter quelques sourates, se cachent sous la couverture de la religion avec la bénédiction des politiques qui les considèrent comme du bétail électoral, l’Etat est dépouillé de ses prérogatives de puissance publique. Quand des sages, élus et autres, se sentent inféodés de l’exécutif en rendant des décisions jetant un soupçon sur l’honorabilité de l’institution, la démocratie n’est que de façade. Quand les remparts cèdent, c’est la porte ouverte à l’instabilité.
Source: Le Challenger