De mémoire d’homme et d’histoire, jamais les Maliens n’ont été autant divisés, autant en désaccord sur les questions existentielles que sous la transition dirigée par le Général Assimi Goita.
L’unité, la cohésion et le vivre ensemble n’ont été autant malmenés que sous cette transition qui est toujours en cours, qui dure depuis près de cinq ans et dont nul ne saurait prédire encore moins deviner sa probable fin. Les valeurs d’humanité, de solidarité, de tolérance et de pardon qui ont forgé notre vivre ensemble sont allées à vau- l’eau pour ne laisser place qu’à la haine, la division et la difficile cohabitation. L’exclusion, la répression avec son lot d’arrestations arbitraires, ainsi que la censure sont devenues les modes de gouvernance du régime transitoire en place au Mali. La question que l’on est en droit de se poser est celle de savoir si les autorités sont conscientes de la gravité de la crise multidimensionnelle dans laquelle le Mali est embourbé depuis plus de quatre ans. En effet, les crises, qu’elles soient politique, sociale ou sécuritaire, s’amoncellent à un rythme effréné pour former une bombe qui pourrait exploser si on n’y prend pas garde. C’est pourquoi il est nécessaire de lancer un appel pressant aux autorités afin qu’elles anticipent avant l’irréparable. Elles doivent d’abord et avant tout, rassembler tous les maliens autour du grand malade qu’est le Mali afin de lui administrer la dose thérapeutique nécessaire pour sa survie, ensuite elles doivent réconcilier les maliens de quelques obédiences politique, communautaire, religieuse qu’ils soient, afin de préserver le vivre ensemble qui a forgé un destin commun. Ces vertus doivent être le crédo de toute gouvernance positive. Ce vœu ne pourra se réaliser que quand les autorités acceptent de nouer le fil du dialogue avec toutes les filles et tous les fils du Mali au-dedans comme au dehors. Elles doivent enfin accepter de sortir le Mali de l’isolement diplomatique, de la répression féroce, et élargir tous les détenus d’opinion et enfin créer les conditions pour un retour dans la dignité et dans l’honneur de tous les exilés politiques.
Après cette étape cruciale qui donnera à coup sûr un espoir de voir enfin sceller la réconciliation des cœurs et des esprits, le Président de la transition pourrait, à travers une adresse solennelle à la Nation, annoncer le chronogramme de la tenue des scrutins afin de signer le retour du Mali dans le concert des nations démocratiques.
En effet, Les charlatans d’un Mali idéal qui n’est qu’illusion, les laudateurs sans conviction, les thuriféraires sans dignité et autres opportunistes sans foi ni loi et qui ne sont mus que par la recherche de strapontins, vont fredonner l’hymne à la gloire des autorités en reléguant au second plan l’organisation des élections, sous le fallacieux prétexte que la tenue des élections n’est pas une fin en soi et ne saurait être la solution à la crise malienne. Pour eux il faudrait d’abord assurer la sécurité et jeter les bases d’un Mali Koura qui n’est, en réalité, à ce stade qu’un mirage, un conte de fée, au lieu d’organiser des élections. Fort heureusement cette litanie semble montrer ses limites, car depuis cinq ans, au nom du tout sécuritaire, on a sevré les maliens du minimum vital que sont les services sociaux de base. Ils sont des millions des maliens à avoir non seulement tout perdu, mais aussi et surtout qui éprouvent un besoin de solidarité et d’aide. Donc il est clair que ces millions de maliens broient du noir et ne savent plus à quel saint se vouer. Pourquoi tant de tergiversations ? Cinq ans de transition, soit l’équivalent d’un mandat présidentiel, vraiment ça suffit maintenant. Le pays doit passer à autre chose. Autrement dit les maliens aspirent au bien-être social, économique et un pays démocratique et apaisé, ils veulent voir leur pays sortir du bourbier dans lequel certains veulent le maintenir éternellement. Les superlatifs à dessein propagandiste qui ont servi de base pour maintenir le peuple dans ce carcan semblent montrer leur limite. Les citoyens déboussolés et écrasés par la dictature du quotidien n’aspirent qu’à une seule chose vivre en toute liberté de façon décente et digne !
Youssouf Sissoko