« J’engage les organes de la Transition à prendre les dispositions qui s’imposent pour la mise en œuvre diligente des recommandations issues du dialogue national ». C’est par ces mots que le président de la transition, le colonel Assimi Goïta, a accueilli les recommandations de la phase nationale du Dialogue inter-Maliens pour la paix et la réconciliation dont les travaux se sont achevés le 10 mai, à Bamako, après 5 jours de pourparlers.
Assimi Goïta et ses frères d’armes sont, en effet, les principaux bénéficiaires de ces recommandations du dialogue qu’ils ont initié après avoir dénoncé l’Accord d’Alger pour permettre, dit-on, « au peuple malien de recourir aux mécanismes endogènes de prévention, de gestion et de règlement des conflits afin de trouver des solutions consensuelles aux problèmes » du Mali.
A titre illustratif, le Dialogue recommande la prolongation de la durée de la Transition de 2 à 5 ans et demande expressément au colonel Assimi Goïta d’être candidat à la présidentielle qui mettrait fin à ladite transition. Et l’on ne devrait pas s’étonner de ces résultats qui étaient le but ultime des militaires qui ont usé, en fins stratèges, des problèmes sécuritaires au Mali pour s’emparer du pouvoir.
Mais la question que l’on peut véritablement se poser, est la suivante : le dialogue inter-Maliens parviendra-t-il à mettre d’accord les Maliens pour dévier leur pays de l’orbite suicidaire ?
Pas si sûr. Et pour cause. D’abord, une bonne partie des Maliens n’ont pas pris part aux pourparlers et ne se sentent donc pas engagés par les conclusions qui en sont sorties. C’est le cas d’une frange importante de la classe politique, de la société civile et des groupes armés du Nord.
Ces exclus du dialogue n’entendent pas assister, les bras croisés, à la confiscation du pouvoir au Mali et se préparent à user de tous les moyens à leur disposition pour se faire entendre. La classe politique malienne qui est en particulier, la principale victime de ces pourparlers qui recommandent le durcissement des conditions de création des partis politiques au Mali, n’entend pas se laisser égorger facilement comme un mouton de Tabaski.
En attendant de voir de quoi les mis en rebus du Dialogue inter-Maliens sont capables, l’on peut aussi s’interroger sur la panacée du dialogue avec les groupes armés. L’une des conclusions, en effet, est « d’ouvrir le dialogue doctrinal avec les groupes armés dits djihadistes et mettre, de ce fait, à profit les érudits maliens pour définir le corpus doctrinal des débats à mener avec ces groupes ».
Les militaires veulent-ils revenir sur l’option du tout militaire ? Quelles concessions un Etat dit laïc peut-il faire face à des groupes qui ont pris des armes pour imposer leur doctrine religieuse ? Cela dit, en attendant de connaître le format de ce dialogue avec les groupes armés djihadistes, l’on ne peut s’empêcher de dire que les voix discordantes qui se font entendre à la fin de ce processus de dialogue, prouvent, une fois de plus, que les Maliens ont mis l’accent sur ce qui les divise que sur ce qui les réunit.
Les conclusions du Dialogue inter-Maliens pour la paix et la réconciliation la mettent donc face à ses responsabilités et c’est de sa véritable prise de conscience que dépendra le destin politique d’Assimi Goïta qui, pour l’instant, s’est installé dans les loges du pouvoir et devrait, dans les jours à venir, opérer sa mue pour troquer son treillis militaire contre le bazin plus confortable du démocrate.