La consternation de l’actualité dominante du jour (démission du président de la République et de son régime) a finalement occasionné la fin du règne prématurée des sages de la Cour constitutionnelle. L’institution qui reste en grande partie au cœur des contestations depuis les élections présidentielles de 2018 s’est laissée destituer par Ibrahim Boubacar Keita. Même si les contestataires postélectoraux de 2018 n’ont pas pu instaurer du changement au sein de l’institution, les partisans de Mahmoud et alliés qui clament haut et fort la démission d’IBK ont pu faire partir les membres de la cour. A la grande surprise de tous, la décision exceptionnellement décrétée a été finalement officialisée le dimanche 12 juillet aux environs de 00H à travers un discours du président de la République.
Vu la complexité de la crise sociopolitique qui continue son chemin, il a été ainsi convenu par le camp de la présidence de la République de dissoudre la cour. Cette décision intervient à un moment où le pays est assombri par le vent des contestations nées suite à l’arrêt de la cour du 30 avril 2020. Le problème, c’est qu’avant qu’une telle décision ne soit décrétée, des démarches avaient été entreprises par des leaders religieux et des représentants de la société civile pour tenter d’amoindrir l’ampleur de la situation. C’est suite à cela que quatre membres de la cour : Fatoumata Diall, Mahamadou Boiré, M’Pèrè Diarra et Zoumana Moussa Cissé ont rendu le tablier en mois de juin. À la différence de ceux-ci, la dame de fer Manassa était catégorique sur sa position de ne partir nulle part, parce que la constitution lui dit clairement que les membres de la cour restent irrévocables au cours de leur mandat. De ce fait, sachant bien qu’elle était inculpée par la majeure partie des citoyens comme source d’un faux arrêt datant du 30 avril, Manassa disait sur tous les toits que son institution n’a fait que dire le droit de ces résultats dits définitifs des élections législatives de cette année. Pendant que la délégation envoyée au Mali par la CEDEAO, tout comme les citoyens lambda du pays sont unanimes que l’institution électorale est à la base des contestations, la présidente se disait également fière du travail abattu par lui et ses homologues.
Comme si cela ne suffisait pas, elle tentait d’endoctriner une autre idée plus philosophique que juridique. Celle qui consiste à dire que sans la cour, il n’y a pas de Nation malienne. Comme si l’existence de ce beau pays dépend forcément de celle de la cour constitutionnelle. En dépit de tous les remous qui épient le pays, la présidente devinait dans une vidéo l’avenir du Mali, augurant : « La cour constitutionnelle ne laissera pas sa place, sinon, c’est l’Etat qui disparait ».
A compter du jour de cette dissolution à nos jours, le Mali existe, contrairement à ce que Manassa tentait de nous faire croire. Que le président ait ou non compétence à agir ainsi ou pas, l’institution est quand même dissoute. Jusqu’à preuve de contraire, la doyenne qui se croyait irrévocable dans l’exercice de ses fonctions, demeure silencieuse face à la décision. Comme soulignaient certains constitutionnalistes, est-ce qu’IBK a fait recours à l’article 50 de la constitution pour agir, ou il a plutôt agi en violation de ses prérogatives présidentielles ? En tout cas, la disparition du pays qu’évoquait Manassa, en cas de la dissolution de la cour, a été un slogan creux. Puisque le Mali d’hier continue d’exister à présent.
Mamadou Diarra
Source: Journal le Pays-Mali