La profondeur de la crise malienne ainsi que la mise en œuvre de l’application de l’accord pour la paix issue du processus d’Alger nécessitent une révision constitutionnelle qui ne peut se faire de façon précipitée. Oui à l’application de l’accord, mais pas à un prix qui peut engendrer une autre catastrophe. Une réforme constitutionnelle est imminente, mais avec un processus clair.
Le contenu du projet validé par l’Assemblée nationale serait-il idoine pour notre pays? Une réforme ne peut pas être seulement de nom, c’est surtout le contenu. Et tout le monde, peu importe la position prise, a l’obligation de s’imprégner du contenu du projet et de faire une analyse approfondie sur les conséquences immédiates, à court terme et à long termes. Au lieu de croire aux besoins de faire recours obligatoirement à un sénat comme on le voit dans d’autres pays, le mieux serait d’avoir l’audace d’analyser les choses à travers des lunettes conformes au contexte socio-économique et culturel du Mali afin de mettre en place un système de représentativité en conformité avec ce contexte.
Le projet est ambigu et cela nous pousse à poser des questions : Pourquoi ce ne sont pas les experts qui ont amené le projet devant l’assemblée afin de répondre aux préoccupations de tous les députés avec des explications claires que le peuple peut comprendre? La constitution est pour le peuple par le peuple, avec le peuple. Elle est le contrat qui nous unit ; avec une population à plus de la majorité non scolarisée, comment peut-elle se prononcer sur quelque chose qu’elle ne comprend pas ? Avons-nous les moyens pour un bicaméralisme ? Cela peut ne pas déranger si le budget actuel, y compris les salaires de l’Assemblée nationale, peut être partagé entre les deux chambres. Comment le président nommerait-il le 1/3 du sénat et sur quels critères ?
Cette situation ne peut-elle pas entrainer du clanisme pouvant créer d’autres conflits sociétaux ? Les déplacés à cause de l’insécurité, les populations qui n’ont pas accès à leur carte Nina ainsi que les territoires qui ne pourront même pas donner leurs voies à cause de l’insécurité, ne sont-ils pas de cette nation ? Peut-on changer une constitution en faveur d’une réconciliation en méprisant d’autres ?
Une chèvre a la capacité de présider une nation humaine sans créer des dégâts si et seulement si les institutions sont fortes et la force de ses institutions dépend du contrat qui les lie, c’est- à-dire la constitution. La conscience qu’une constitution n’est pas un jeu d’enfant, mais est obligatoire à adopter. Une réforme constitutionnelle ne peut se résumer qu’à une ambition ou seulement à une composante d’un bilan, elle nécessite des réflexions, des campagnes d’information, d’explication et de sensibilisation. Une constitution est une nation car sans elle il n’y a pas d’Etat républicain. C’est la bible d’une nation, c’est le coran d’une nation, c’est l’avenir d’un peuple.
Une constitution doit être établie dans l’unité pour le peuple, avec le peuple et dans la totale compréhension du peuple.
Dr Aminatou TRAORE
Par Aujourd’hui-Mali