Nos compatriotes s’interrogent et plusieurs de divers horizons m’interpellent sans cessesur comment comprendre les violences « intercommunautaires » aveugles et éclairer les maliens et faire quelque chose concernant les ravages qu’elles causent. Ma réaction à ces interpellationset attentes est de volontairement suspendre toute activité épistolaire et visuelle et ainsi donner latitude à nos sœurs et frères à agir pour eux-mêmes, précisément pour dissiper le malentendu latent que c’est par les lettres, les appels, dans un bon ou mauvaisbambara, dans un bon ou mauvais français, que nous changerions quoi que ce soit au Mali. Mais j’ai voulu aussi que les uns et les autres se rendent compte aussi que sans lettre, sans consultation, dans un bon ou mauvais bambara, dans un bon ou mauvais français, les maliens ne pourront se retrouver que dans la confusion, ennemie de toute concertation, de toute action salvatrice de reconstruction de leur pays martyr…
La plupart des maliens savent aujourd’hui que leur pays est passé de dérive à perdition et il semble logique que cela inspire les uns et les autres à y aller de leurs solutions respectives. Des maliens par le monde, à Washington, à Paris, à Badalabougou, manifestent leurs révoltes sur la gestion de leur pays et sur la mainmise dont il fait l’objet. Ils manifestent du bas de leurs souffrances dans l’exil de rescapés des mers et désertsou du haut de leur notoriétéde « démocrates convaincus et patriotes sincères » dans leur posture peule-dogon/Radio Mille Collines de trahison des idéaux du 26 mars 91 et d’imposture de positionnement « anti-français »… Certains de ceux-ci dénotent une naïveté dangereuse qui préconise platement pour le Mali les armées et les valeurs d’outre-mer, en méconnaissance de la hauteur plus grande de leur pays sur ces notions, tout à la confusion et à la désunion qui les affaiblit et lézarde leur mur où loge désormais le margouillat. Ils en oublient jusqu’aux reculades passées sur le code du mariage et les révisions constitutionnelles ou la lettre des autorités pour une intervention extérieure dans le même manque de discernement qui nous vaut bien des affres actuelles.La sagesse bambara dit bien que pour essayer le gué, c’est le plus bête qu’on envoie…
Il faudra réaliser que le Mali est dans une telle passe de manque de leadership que chacun se découvre une disposition à cette vocation… Par conséquent il conviendrait d’être plus direct et explicite dans l’appréciation des idées proposées (ou des gens ainsi implicitement proposés) de sortie de crise, par les maliens habitués à être consultés par leurs compatriotes. Je mesure pour ma part avec humilité la responsabilité et l’honneur de faire ainsi partie de ces concertations avec tous ceux qui par courriel et réseaux sociaux montrent leur souci d’échanger sur leur pays meurtri pour accéder aux vérités deson peuple. J’aimerais bien rappeler à tous ceux en position de consultation, d’ainés, de référence, que leurs propos doivent servir à guider et mettre les choses dans une optique plus concertée et moins aventureuse. Je ne doute point que cette posture servira à faire éclore à plus bref délai un leadership plus éclairé qu’il nous faudra pour sortir du gué…
Il faut apprécier la diaspora malienneà sa juste valeuret où qu’elle soit. Le système de corruption et de mauvaise gouvernance est à son comble au Mali. L’intérieur du pays est miné dans ses moyens d’existence de telle sorte que le salut doit venir de sa partie saine, de sa diaspora dont les moyens d’existence ne dépendent pas du système de prédation qui prévaut au Mali et dans lequel, consciemment ou inconsciemment, se vautrent toute la classe politique actuelle, les fonctionnaires, les hommes d’affaires, les professions libérales, les militaires, les religieux, etc. Ce n’est pas leur faute qu’il en soit ainsi et toutes ces catégories sont partie du peuple et essentielles à sa sortie de crise car elles sont affectées directement. Mais vivant du système, elles ne peuvent apprécier suffisamment et objectivement les moyens indépendants pour en sortir. La diaspora malienne est de nécessité la voie du salut… Cependant, diaspora ne veut pas dire extérieur, aussi ne faut-il pas l’opposer à l’intérieur, car il s’agit du sacrifice que le Mali a dû consentir au plus fort de ses crises pour survivre et dont il a besoin aujourd’hui, son sinignesigui ! La diaspora représente ni plus ni moins que la totalité de la sensibilité malienne à l’extérieur…
Les maliens qui sont en train de se parler et de s’organiser doivent se convaincre au delà des distractions du régime en place et de ses appuis extérieurs qu’ils doivent persévérer à donner de la direction et mettre de l’ordre dans l’insurrection contre les tueries précédant la marche forcée vers le fameux accord d’Alger. On ne peut pas servir deux maitres à la fois, en tout cas, pas le peuple et les ennemis du peuple en même temps. Le recours criminel à une insécurité « au centre » ourdi à provoquer une « férocité fratricide »est l’avatar des tueries d’Aguelhoc pour semer la panique et préparer l’armée pour les replis tactiques et la déconsidérer et la neutraliser. Mais cette armée est l’émanation du peuple malien et c’est là tout le mauvais calcul des médiocres stratèges qui en refusant son entrée à Kidal, avouent l’instrumentalisation du Mnla/Cma contre la composante targuie du peuple malien, qu’on travaille contre son pays dont on organise la désorganisation. Ce fait attesté par les tueries démoniaques se révèle à tous les maliens comme d’un fil plus blanc qu’on s’ingénie à effilocher pour défaire un tissu noir. Tous les maliens savent aujourd’hui que touareg, peuls, dogons ou autres, n’avaient eu cesse d’organiser leur interdépendance par tout leur passé au point d’en faire unsinankouyaet n’ont jamais eu de raison aujourd’hui de s’entretuer autrement que par la perfidie et l’action satanique de ceux pour qui la poursuite du gain matériel sejustifie même au détriment des vies humaines… Le temps est désormais à l’action si nous voulons abréger les souffrances du peuple malien aux mains de ses oppresseurs intérieurs et extérieurs.
Amadou Cisse
Washington, DC
USA
Abscisse1@gmail.com