Le ciel malien n’en finit plus de déverser ses colères. Et dans le tumulte d’un hivernage particulièrement ravageur, les inondations de 2024 ont laissé derrière elles un paysage meurtri : routes effondrées, cultures noyées, populations déplacées, et une économie encore plus fragilisée. Alors que les Maliens pansent tant bien que mal leurs plaies, un souffle vient de l’international. Le Fonds Monétaire International (FMI), fidèle à son rôle de pompier financier en temps de crise, vient d’approuver un décaissement de 129 millions de dollars, soit environ 74,44 milliards de francs CFA, en faveur du Mali, dans le cadre de la Facilité de Crédit Rapide (FCR).
Bamada.net-Ce n’est pas une aide anodine. C’est un geste d’urgence, une perfusion nécessaire pour une économie asphyxiée par la triple pression des aléas climatiques, de l’instabilité sécuritaire et d’un environnement budgétaire plus que tendu. Le FMI, dans son communiqué, justifie cette enveloppe par la nécessité d’apporter une réponse rapide et ciblée aux besoins urgents de la balance des paiements, fortement mis à mal par les effets cumulés des catastrophes naturelles et des contraintes structurelles.
Mais au-delà du montant, ce qui retient l’attention, c’est le cadre dans lequel s’inscrit cette aide. Le financement d’urgence est accompagné d’un programme de référence de onze mois, convenu entre les autorités maliennes et l’institution de Bretton Woods. Objectif : stabiliser la macroéconomie, renforcer la résilience nationale, protéger les plus vulnérables, et surtout poser les jalons d’une gouvernance plus rigoureuse.
On pourrait dire : « encore un programme du FMI ». Mais celui-ci revêt une importance particulière. D’abord parce qu’il est censé servir d’ancrage aux priorités économiques du gouvernement de transition. Ensuite parce qu’il intervient dans un contexte où les financements internationaux se font plus prudents, plus exigeants, plus conditionnés. Le Mali est donc tenu d’opérer des réformes structurelles fortes, notamment dans la gestion des finances publiques, la transparence budgétaire, la mobilisation des ressources internes, ou encore la rationalisation des dépenses.
Dans ce schéma, la lutte contre l’insécurité alimentaire, le renforcement du dispositif de protection sociale, et la surveillance accrue des entreprises publiques (à l’instar d’Énergie du Mali) sont présentés comme des priorités. Autant de chantiers qui, s’ils sont menés avec rigueur et vision, peuvent transformer cette crise en opportunité de refondation.
Mais soyons lucides : les défis sont multiples. À l’instabilité politique s’ajoute l’incertitude économique, aggravée par la réduction annoncée de l’aide publique au développement, la volatilité des prix internationaux, la baisse de la production aurifère, et les interruptions fréquentes d’électricité. Pour ne rien arranger, la pression de la dette publique, bien que jugée modérée à ce jour, pourrait s’alourdir si des mesures correctives ne sont pas prises.
Dans ce contexte, la crédibilité du Mali auprès de ses partenaires dépendra largement de sa capacité à tenir ses engagements. À cet égard, la transparence dans l’utilisation des fonds du FMI, la maîtrise des arriérés budgétaires, et la réduction de l’incertitude politique seront des indicateurs clés scrutés par les bailleurs internationaux.
D’ailleurs, au-delà du FMI, d’autres partenaires se mobilisent. Lors de sa visite récente à Bamako, le Directeur général de la Banque mondiale, Wencai Zhang, a réaffirmé l’engagement de son institution, dont le portefeuille actif au Mali s’élève à près de 1,8 milliard de dollars, réparti sur 19 projets. Une dynamique encourageante, mais qui reste conditionnée, elle aussi, à des signaux clairs de bonne gouvernance, de stabilité et de respect des intérêts nationaux.
Alors que les eaux des inondations commencent lentement à se retirer, le pays est à la croisée des chemins. Ce soutien du FMI, s’il est bien utilisé, pourrait représenter un véritable levier de transformation. À condition que la volonté politique suive, que les institutions soient renforcées, et que les citoyens, en première ligne de toutes les crises, soient enfin placés au cœur des priorités publiques.
Il ne s’agit plus seulement de sauver l’économie malienne. Il s’agit désormais de la refonder, avec courage, méthode, et intégrité.
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Ichiaka Minta
Source: Bamada.net