Le nouveau projet de recrutement des enseignants volontaires ne sera aucunement une menace pour la fonction des enseignants grévistes. Il s’agit juste d’un plan B, pour ne pas interrompre les cours durant les temps de négociation. En tout cas, c’est ce qui ressort de la Conférence de presse du jeudi dernier.
Lors de cette conférence, les ministres de l’Éducation nationale, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique, le Pr Mahamadou Famanta, du Dialogue social, du Travail et de la Fonction publique, Oumar Hamadoun Dicko, et de la Communication, Yaya Sangaré, ont tout d’abord fait savoir que le gouvernement reconnait la légalité et la légitimité de la grève de la synergie des syndicats de l’Education signataires du 15 octobre 2016.
Par contre, ils ont rappelé le devoir et la responsabilité du gouvernement d’assurer l’éducation, un droit constitutionnel pour chaque enfant de ce pays. Un droit inhérent que les élèves ont d’ailleurs manifesté. Ces manifestations successives faites par des enfants un peu partout dans le pays était, selon eux, une action qui devait interpeler toutes les parties prenantes de la crise scolaire, à savoir en plus du gouvernement et les différents syndicats de l’enseignement en face, les parents d’élèves, voire l’ensemble de la société civile.
Cette sortie des trois ministres avait pour but principal de tenir, selon eux, « un langage de vérité » concernant la résolution de cette crise, à travers l’application du « fameux article 39 de la loi n° 2018-007 du 16 janvier 2018 », portant statut du personnel de l’enseignement secondaire, de l’enseignement fondamental et de l’éducation préscolaire et spéciale.
En effet, les représentants de l’État ont signalé que le gouvernement est certes disposé à tout mettre en œuvre pour venir à bout de cette crise, mais ce que veulent les enseignants n’est pas possible urgemment cette année. Ils ont alors demandé à la synergie syndicale de faire appel à son sens de patriotisme et de responsabilité, en acceptant la prise en charge de cette revendication « légale et légitime » durant la période 2020-2021.
Selon eux, cela n’est pas une mauvaise volonté de l’État envers une disposition légale et obligatoire, mais un droit de choix parmi la divergence de fond sur les modalités d’application. Les ministres ont aussi signalé certaines raisons qui rendent difficile, sinon impossible l’application immédiate de cette exigence syndicale. D’abord, la soutenabilité financière de cette réforme qui se chiffre à plus de 58 milliards de francs CFA, et l’autre crainte, la plus fondamentale d’ailleurs est, la frustration d’autres syndicats de secteurs différents qui observent certainement si toutefois, le gouvernement va céder à cette demande de majoration accompagnée d’une rétroaction.
Par ailleurs, la commission de conciliation pilotée par le ministère du Dialogue social en appelle aux différents syndicalistes d’accepter les pourparlers proposés par le gouvernement sur la base de la majoration de la grille indiciaire de la fonction publique obtenue par l’UNTM en 2018. Toute la difficulté est que contrairement à l’UNTM, qui sert d’ailleurs de référentielle aux enseignants, a accepté de consentir une année de pose en 2020, compte tenu de la situation du pays. Mais selon eux, les enseignants ont catégoriquement refusé le sacrifice.
Ils ont seulement exigé une augmentation immédiate de leur grille de 180 points, rétroactive à la date du 1er janvier 2019, et 100 autres points à partir du 1er janvier 2021, ce qui amène l’ensemble de leur grille à 280 points au lieu de 140 proposé par le gouvernement. Selon les représentants de l’État, c’est en sachant que le gouvernement ne peut se soumettre à une telle demande pour les raisons citées, que le Premier ministre a décidé de procéder au recrutement de 15 000 enseignants volontaires pour empêcher l’épisode de l’année précédente, où les élèves sont restés plus de 70 jours dehors.
Sur ce point aussi, les trois ministres ont précisé qu’il ne s’agit pas d’un remplacement, mais plutôt d’un plan B, au cas où il n’y aurait pas d’accord entre le gouvernement et les enseignants. Ils ont rappelé que ce secteur avait longtemps exprimé un besoin de plus de 20 000 enseignants pour combler le déficit en personnel enseignant. C’est pourquoi le gouvernement a pris la décision, depuis quelques années, de recruter près de 4000 enseignants chaque année.
ISSA DJIGUIBA
Source: Journal le Pays-Mali