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Boua Ni Sogoma

Bonjour Kôrô Président et que la paix de Dieu soit avec vous et avec votre peuple, ce peuple martyr déjà naturellement confiné par tant d’années de souffrance et de résignation et auquel vous avez su heureusement éviter un nouveau confinement.

Le peuple du Mali à la destinée duquel vous présidez est aujourd’hui dans une situation indicible, déchiqueté entre une rébellion séparatiste vieille de plus de cinquante ans, des groupes d’autodéfense qui se réclament de nos ethnies et qui s’entretuent tous les jours. Et à tout s’ajoutent le grand banditisme, la petite délinquance, les abus de confiance de tous genres et qui font le quotidien de nos brigades de gendarmerie, de nos commissariats de police et de nos juridictions.

Il y a trop de choses et de problèmes dans notre pays et personne ne peut prédire la fin de toutes ces choses tordues qu’il faudrait pouvoir redresser ou corriger pour mettre notre pays sur le bon chemin.

L’on se demande en quel siècle nous pourrions espérer voir le Mali se ressaisir, redevenir un pays normal ou à peu près normal où le droit serait respecté, où l’homme se sentirait Homme capable de se battre pour son bien-être personnel et celui de sa famille.

Nous sommes un pays qui va dans tous les sens et où l’impunité ne dérange plus personne, où la valeur de l’homme se mesure à l’aune de sa fortune, une fortune mal acquise et dont les détenteurs sont fiers de la masse d’argent capitalisée de façon éhontée. Le principe est que plus on vole, plus on est à l’abri de la justice.

Nous avons mis du temps à dénicher des magistrats de la trempe de Kassogué, ou des vérificateurs comme Alhamdou Baby et des officiers de police judiciaire qui n’ont peur que de Dieu. Leur foi en leur métier reste le déterminant de leur engagement à combattre la fraude, le détournement du dénier public. A quoi servirait tout cela sans votre appui, sans votre engagement à leur côté pour combattre ces fléaux qui ne datent pas de votre “magistère” mais qui y auraient pris l’ascenseur.

La faute ne vous est certes pas imputable, elle est la conséquence de près d’un demi-siècle de gabegie, de tricherie, de mensonge et de calomnie de tous genres.

Le présent de ce pays n’a jamais pu être dessiné par les différentes politiques mises en place depuis des lustres. On change blanc-bonnet par bonnet-blanc. C’est pourquoi le changement, s’il en existe n’est pas perceptible, car ce sont les mêmes têtes qui dirigent ce pays. Ils changent de casquette selon l’intérêt du moment et ne s’offusquent de changer de parti ou de s’acoquiner avec l’adversaire ou l’ennemi d’hier pour demeurer le plus longtemps à la mangeoire. C’est une question de vie ou de mort pour ces hommes pour qui la politique est alimentaire.

L’avenir aussi reste compromis par tous ces caciques de l’Adéma qui se sont mués en RPM, URD, Asma tous ces petits partis qui se réclament d’obédience marxiste-léniniste ou néo-libéral.

Kôrô Président, j’ai peur pour mon pays et je ne vois pas la solution immédiate à tous ces problèmes qui nous assaillent et qui empirent de jour en jour.

Pour cette parution je voudrais pouvoir broder sur :

  1. Votre gestion du Covid-19

pour laquelle beaucoup de

nos compatriotes de l’intérieur

et de l’extérieur n’ont pas tari

de critiques à votre endroit.

A mon sens vous avez été on ne peut plus responsable. Nous ne sommes pas l’Europe, ni les USA qui, en dépit des moyens colossaux dont ils disposent n’ont pu endiguer le coronavirus, alors que votre peuple, le peuple du Mali, vit au jour le jour avec sans doute moins de 1000 F CFA par jour. Et ce sont des milliers de morts que ces pays riches comptabilisent  jour après jour.

Comment et par quel truchement vous, en tant que président d’un tel peuple vous auriez pu lui demander de se confiner. Et j’ai apprécié la sortie que vous avez faite à ce propos.

Le couvre-feu serait peut-être une des exigences de l’OMS ou des partenaires, mais moi je n’en ai pas vu la nécessité. Les marchés sont restés ouverts jusqu’à 21 h, les lieux de cultes sont restés aussi ouverts, l’on n’a pas réussi à éviter les regroupements pour les enterrements et même les mariages, etc.

Vous auriez dû exiger le port du masque partout, en tout lieu et en toute circonstance ainsi que le lavage des mains au savon et au gel hydro-alcoolique pour ceux qui en ont les moyens, sinon quelles autres mesures seraient à même de sauver ce peuple à majorité analphabète et qui croit que c’est un moyen pour vous et pour votre gouvernement de gagner de l’argent sur les plus nantis.

Regardez simplement autour de vous et vous ferez le constat que le Malien ne croit pas au coronavirus. Dans la circulation sur cent personnes vous remarquerez que seules dix ou quinze au plus portent le masque.

Je sais que vous en avez commandés des dizaines de millions tant à l’extérieur qu’à l’intérieur du pays. Vous avez donné de l’emploi à bon nombre de nos compatriotes qui ont pu passer très sereinement leur temps de confinement.

De mon point de vue Kôrô Président, vous n’avez pas su imposer votre décision aux musulmans de notre pays qui ont refusé de fermer les mosquées alors qu’à La Mecque, la Kaaba est restée fermée et le pèlerinage a été simplement et purement annulé par ceux-là desquels nous tenons l’islam.

Les catholiques n’ont pas attendu une décision gouvernementale pour fermer les églises et autres lieux de culte.

C’est, à mon avis le seul point d’ombre à votre gestion du coronavirus. Heureusement que l’hécatombe prévu par l’OMS pour l’Afrique ne s’est pas produit. Peut-être que Dieu est encore avec, nous porte encore.

Autant vous avez su gérer la période de la pandémie avec tact et intelligence autant vous devrez pouvoir gérer l’après-Covid-19 et son impact sur l’économie nationale. Tous les secteurs ont été touchés. Il vous appartiendra donc d’aider à relever notre économie qui ne se portait pas déjà trop bien et qui va avoir du mal à redémarrer si vous ne lui apportez pas l’onction nécessaire et indispensable.

Le mode de la culture reste le secteur le plus impacté et ce depuis l’exacerbation des crises au nord et au centre. La culture considérée comme jouer balafon et djembé donc superfétatoire se tait et s’efface des écrans. Les spectacles et autres festivals sont annulés parce que source de regroupement.

  1. La crise scolaire qui n’a

que trop perduré

Elle ne date pas de votre arrivée au pouvoir, elle est la résultante d’une gestion catastrophique cumulée de tous les régimes depuis l’avènement de la démocratie dans notre pays. On s’est servi des élèves pour renverser un régime et on a laissé croire à nos enfants qu’ils sont forts et puissants et que leurs voix comptent dans toutes les prises de décision qui engagent la vie de notre nation.

Et c’est depuis ce jour-là que l’école malienne est prise en otage entre les politiciens véreux qui n’ont cure de la bonne santé de notre école, de l’éducation de nos enfants, de la survie de notre nation et les élèves et étudiants qui sont désormais des hommes politiques, qui font et défont les gouvernements.

Le mal est plus profond que l’on ne peut l’imaginer et de moins en moins de voix s’élèvent pour dénoncer cette dérive vers laquelle fonce inexorablement l’école malienne.

Comment comprendre que les héros de la démocratie malienne de 1991-92 sont tous des enseignants et que près de trente ans encore après que l’école malienne soit à ce niveau. Nos enfants n’ont aucun niveau par rapport à ceux de la sous-région et ce sont des bouts d’année scolaire qu’on met ensemble chaque année pour sauver non pas l’école mais l’année scolaire et il est rare que nous obtenions une année scolaire normale sur trois à quatre bouts d’année.

Quels cadres sommes-nous en train de former à l’heure de la mondialisation où la compétition est ouverte entre les meilleurs ?

Il y a à mon avis un enchevêtrement de problèmes qui ne peuvent être résolus ensemble et qu’il faut absolument sérier. Evitons l’amalgame et prenons en compte les vrais problèmes scolaires dont les solutions se trouvent à l’école.

Les problèmes politiques que l’on greffe à l’avenir de nos enfants doivent pouvoir trouver leur solution sur le terrain politique. Tous les cadres comprennent ce que je veux dire. Ne noyons pas le poisson dans l’eau. La situation de l’école malienne nous interpelle tous à moins que nous n’ayons souci pour notre pays, car si on n’est pas parent d’enfant, on est enseignant ou simple citoyen. Il s’agit non pas de l’avenir d’une génération déjà sacrifiée mais de l’avenir de notre nation.

Alors Kôrô Président appelez le peuple du Mali au chevet de son école malade, car pour le Mali aucun sacrifice ne peut être de trop. La solution de la crise scolaire passe forcément par là.

  1. La situation post-élection législative 2020

Je vous avais demandé de n’écouter que la voix du peuple qui, à l’issue du Dialogue national inclusif a fortement recommandé l’organisation des législatives après plusieurs reports. Et l’on ne pouvait être Dieu pour prédire que la pandémie du coronavirus allait s’abattre sur le monde entier.

Qu’est-ce qui ne vous pas été dit par les adversaires de ces législatives qui vous reprochaient, contrairement à la France, de vouloir maintenir l’élection au pic même de la pandémie ? Vous avez tenu bon et vous avez respecté la volonté de votre peuple, c’est en cela que l’on reconnaît un vrai chef. Aujourd’hui et malgré tous les problèmes soulevés par les partis, l’élection a eu lieu partout où ça été possible et personne ne pouvait non plus prédire qu’elle aurait lieu sur l’entièreté du territoire national à cause de ce que tout le monde sait.

Vous en avez certainement tiré quelques leçons :

Le citoyen lambda n’a pas compris que le jeune élu de la Commune V ait été trahi par son propre parti et quel que soit le caractère du candidat. On dit de lui qu’il est hautain, “fat”, trop sûr de lui-même, trop suffisant, etc. Les aînés ne pouvaient-ils pas comprendre que tout cela pouvait être mis au compte de la jeunesse et ne voir que le seul intérêt du parti ? Doit-on jeter le bébé avec l’eau de bain ?

Le RPM doit revoir sa philosophie et ne pas lier son ancrage politique au seul IBK qui est à son deuxième et dernier mandat et qui pour rien ne sacrifierait le Mali pour un parti comme Alpha l’a fait. Son souci c’est de sortir par la grande porte et avec les honneurs.

Et puis les partis notamment les plus vieux doivent accepter aujourd’hui de faire la promotion des jeunes desquels relève l’avenir de notre pays. Les dernières législatives me donnent raison et qu’on le veuille ou pas, c’est désormais le temps de la jeunesse.

Malheureusement les vieux s’agrippent comme pour sauvegarder des intérêts ou des avantages dont ils ne veulent pas se départir. On ne peut faire son temps et celui de ses enfants.

A cause de ses propres dissensions internes le RPM, parti majoritaire, n’est plus que l’ombre de lui-même, avec au plus quarante-cinq députés sur un total de cent-quarante-sept, moins du tiers donc.

Pour avoir la majorité parlementaire, il lui faudrait quelle gymnastique, quel compromis, quelle compromission, des compromissions contre-nature et dans lesquelles la raison ou la logique n’a pas sa place. Le RPM a besoin des voix de l’Adéma et de celles de quelques partis alliés pour pouvoir avoir la tête du perchoir ou les postes stratégiques. Dans cette position le parti de l’Abeille esseulée n’est-il pas faiseur de roi ? Ne peut-il pas se positionner comme parti de l’opposition pour préparer les échéances de 2023 ?

Les contestations et protestations contre les arrêts de la Cour constitutionnelle vont bon train et chacun y va de ses arguments avec souvent des preuves fabriquées ou imaginées souvent pour contenter le candidat perdant et justifier ainsi les dépenses engagées en son nom et pour son compte. Pauvre Manassa ! Le peuple du Mali, votre peuple est atypique, vous n’aurez jamais totalement raison, même le Prophète Muhammad (PSL) n’a pas fait l’unanimité. Si vous êtes d’accord avec votre conscience et si vous êtes sûre de n’avoir dit que le droit alors allez dormir les poings fermés, la conscience tranquille ! Seul Dieu vous jugera.

Si les résultats restent en l’état nous devrons nous convaincre que nous aurons l’un des plus jeunes bureaux parlementaires de ces trente dernières années. Que cela continue pour que ceux au nom desquels les lois seront votées et qui restent majoritaires (les jeunes) puissent enfin avoir un œil bienveillant sur l’avenir de leur pays.

Ce changement est inexorable et irréversible. Il faut ce changement de générations pour que les “politicards” des années 1991-92 et qui ont tout eu dans la politique et par la politique cèdent dignement la place à leurs enfants et à leurs petits-enfants. Ils ne peuvent rester indéfiniment à profiter du peuple.

Enfin je voudrais, en cette période de fête des travailleurs, souhaiter que vous vous penchiez sur le sort des enseignants dont le salaire a été légalement gelé  et conformément au droit de grève.

Kôrô Président nos enfants, vos enfants ont tort de réclamer ce qui ne peut être considéré comme un dû, parce qu’en acceptant d’aller en grève ils savaient que les jours de grève ne leur seront pas payés. Mais comme on le dit dans un de nos proverbes : c’est vrai que “Hamadi n’a pas raison mais cela n’est pas une raison suffisante pour disloquer le hameau”. En bon père de la nation, je vous prie de pardonner à nos enfants.

La loi est et reste la loi, le droit est et reste le droit et pour une fois pour que les enfants du Mali puissent reprendre le chemin de l’école daignez souffrir de porter une entorse au droit, à la loi même si ce que je vous demande est illégal, c’est juste une supplication d’un parent d’élève dépité par tant d’absences des enfants du Mali à l’école du Mali.

Enfin je voudrais m’incliner sur la mémoire d’une dame qui m’a dit il y a juste un mois qu’elle a souscrit à l’abonnement du journal Mali-Aujourd’hui à cause de Boua Ni Sogoma.

Aïssata Cissé s’en est allée en laissant derrière elle une presse inconsolable. Dors en paix doyenne et que le Paradis soit ta demeure éternelle.

Qu’Allah SWT bénisse le Mali et couvre de sa Grâce ce peuple digne et fier.

Mamoutou KEITA

Producteur de Spectacles

76 43 99 33 / 61 63 99 99

Source: Aujourd’hui-Mali

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