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Avant-projet de Constitution : Les principales mutations

L’avant-projet de la nouvelle constitution est là. Le Président de la Transition, le Colonel Assimi Goïta, l’a reçu en main mardi 11 octobre 2022. Un élément-clé qui apporte des «réformes majeures ».

 

La Constitution de février 1992 connaît moult péripéties qui ont été sources d’instabilité majeure pour le pays, ces dernières années. C’est ainsi que le Président de la Transition a instruit l’élaboration d’un avant-projet de nouvelle constitution à travers lequel, le vaste chantier de la refondation prend forme. Le document, riche de 13 titres et 195 articles, apporte aussi bien des avancées aux libertés individuelles, qu’au plan des institutions en général. Parmi les principales réformes engagées, celles liées aux droits et aux libertés individuelles sont consacrées.

Le renforcement des institutions de la République est l’une des raisons qui ont motivé la rédaction d’une nouvelle constitution. Comme l’a dit l’ancien président américain, Barack Obama, «L’Afrique n’a pas besoin d’hommes forts, mais d’institutions fortes». Cette pensée est essentiellement partagée par une frange importante de maliens.

L’avant-projet prévoit en son article 36, la diminution des institutions de la République de huit à sept. La Haute cour de Justice et le Haut conseil des collectivités territoriales pourraient disparaître. Une Cour des comptes verra le jour. Ainsi, les institutions seront les suivantes : le Président de la République, le Gouvernement, le Parlement, la Cour suprême, la Cour Constitutionnelle, la Cour des Comptes et le Conseil Économique, Social, Culturel et Environnemental.

Le Président de la République

L’autre grande évolution concerne le Président de la République. L’article 72 de l’avant-projet de constitution prévoit en effet, la possibilité d’une destitution du président de la République avant même la fin de son mandat. Avancée périlleuse ou salutaire ? En tout état de cause, l’avant-projet note que le président de la République peut être destitué par le Parlement pour haute trahison. En effet, la motion de destitution peut être proposée par les membres de l’une ou l’autre chambre du Parlement (qui aura deux chambres). Elle n’est recevable que si elle est signée par au moins la moitié des membres.

«…Le Président de la République est responsable de faits qualifiés de haute trahison. Il peut être destitué par le Parlement pour haute trahison. Il y a haute trahison lorsque le Président de la République viole son serment, pose des actes manifestement incompatibles avec l’exercice de ses fonctions, est auteur, co-auteur ou complice de violations graves et caractérisées des droits humains, d’atteinte aux biens publics, de corruption ou d’enrichissement illicite ».

Le gouvernement, 29 membres au plus

Ils seront désormais 29 ministres tout au plus. Si l’avant-projet de constitution est validé à l’issue du référendum, le nombre des membres du gouvernement sera désormais fixé à vingt-neuf ministres.  L’article 74 note que le Gouvernement comprend : le Premier ministre, Chef du Gouvernement et les ministres. Le nombre des membres du Gouvernement, quelle que soit leur dénomination, ne peut dépasser vingt-neuf, y compris les ministres délégués, secrétaire d’Etat et autres.

Déclaration de biens des membres du gouvernement

Selon l’article 78 de l’avant-projet, tous les membres du Gouvernement doivent remettre au Président de la Cour des comptes la déclaration « écrite de leurs biens dans un délai maximum de trente jours après nomination ». La déclaration fait l’objet d’une mise à jour annuelle et à la fin des fonctions. La déclaration et les mises à jour annuelles sont rendues publiques par la Cour des comptes.

Autre aménagement majeur, le législatif. A la lecture de l’article 94, le Parlement comprend deux chambres : l’Assemblée Nationale et le Haut Conseil de la Nation : le bicaméralisme.

Les membres de l’Assemblée Nationale sont appelés Députés, les membres du Haut Conseil de la Nation sont appelés Conseillers de la Nation

L’immunité parlementaire n’est plus une couverture (intelligente). Les députés et les conseillers de la nation ne bénéficieront de l’immunité parlementaire que dans le cadre simple et typique de l’exercice de leurs fonctions, selon l’article 103. En termes clairs, ils le font valoir simplement pour leurs opinions ou le vote.

De l’ordre dans les mandats des députés

Fin de la transhumance politique. L’avant-projet de Constitution en son article 106, tient à mettre fin à la transhumance politique en proposant que tout député ou tout conseiller de la Nation qui démissionne de son parti ou de l’organisation qu’il représente, est déchu de son mandat. Il est remplacé dans les conditions déterminées par la loi organique. Il ressort de l’article 113 que le Président de l’Assemblée Nationale et le Président du Haut Conseil de la Nation peuvent faire l’objet d’une procédure de destitution pour manquement aux devoirs de leur charge.

La Cour Constitutionnelle

Fréquemment sujette à critique, la cour constitutionnelle est concernée par les réformes. Si le nombre des membres siégeant au sein de l’institution majeure n’a pas changé (neuf au total), une grande mutation a été apportée dans le mode de désignation de ses membres. En effet, la constitution en vigueur prévoit en son article 91 que : trois des membres de la Cour constitutionnelle sont désignés par le Président de la République, trois autres par le président de l’Assemblée Nationale et les trois derniers par le Conseil Supérieur de la Magistrature. En revanche, l’article 148 l’avant-projet de la nouvelle Constitution propose un autre mode de désignation des conseillers : deux seront désignés par le Président de la République, un par le Président de l’Assemblée nationale, un par le Président du Haut Conseil de la Nation, deux par le Conseil supérieur de la magistrature, deux enseignants-chercheurs de droit public désignés par un Collège constitué par les Recteurs des universités publiques de droit, un par l’Ordre des avocats.

Les conseillers sont choisis à titre principal parmi les professeurs de droit public, les avocats et les magistrats ayant au moins vingt ans d’expérience, ainsi que les personnalités qualifiées qui ont honoré le service de la nation.

La disposition de la nouvelle constitution qui retient l’attention d’un grand nombre de nos concitoyens, est l’article 31 qui prévoit en ses derniers segments que «l’Etat peut adopter, par la loi, toute autre langue étrangère comme langue d’expression officielle».

Le projet de texte a été remis au Président de la Transition. Le processus se poursuivra au niveau du gouvernement puis du Conseil national de Transition.

Les Maliens donneront leur avis par voie de référendum. Pour le moment, l’heure est à la réflexion générale et aux débats, pour mieux affiner et enrichir l’avant-projet.

Ousmane Tangara

Source : Le Challenger

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