Dans une déclaration cinglante, l’imminent avocat et figure historique de la démocratie malienne, Me Mountaga Tall, ancien président du CNID-Faso Yiriwa Ton, est monté au créneau pour dénoncer la dernière initiative gouvernementale visant à auditer les comptes des partis politiques dissous.
Bamada.net-La Section des comptes de la Cour suprême, par correspondance rendue publique récemment, invite les présidents des anciens partis politiques à déposer, avant le 30 juin 2025, une série de documents financiers détaillés : états financiers, pièces justificatives des dépenses, journaux de banque et de caisse, relevés bancaires, etc.
Si, de prime abord, cette annonce a suscité une réaction positive de la part de Me Tall, celui-ci affirme que son soulagement fut de courte durée. Il y voyait initialement une opportunité pour prouver que les comptes du CNID-FYT étaient transparents et réguliers, et que le parti n’avait perçu que des subventions légales, déclarées et dûment validées par la Cour des comptes, conformément aux textes en vigueur. Mais la décision de dissoudre tous les partis politiques est venue bouleverser ce cadre légal.
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« Je vais laver l’honneur du CNID-Faso Yiriwa Ton », écrit-il, « en prouvant que, contrairement à une fausse rumeur, l’État ne finançait pas notre parti, ni aucun autre d’ailleurs, en dehors de la subvention légale. »
Un piège juridique et politique ?
Dans un argumentaire rigoureux, Me Mountaga Tall considère que cette initiative d’audit post-dissolution n’est rien d’autre qu’une tentative de discréditer les partis politiques, et plus encore, de les piéger juridiquement en les incitant à violer les termes même de leur dissolution.
Selon lui, plusieurs éléments rendent cette démarche illégale et impossible à exécuter :
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Inexistence juridique des présidents de partis : Depuis le décret n°2025-0339/PT-RM du 13 mai 2025, les partis et leurs structures dirigeantes n’ont plus d’existence légale. L’article 2 du décret interdit à toute personne de se présenter comme président ou administrateur d’un parti dissous. Ainsi, adresser une lettre aux « présidents des ex-partis » est une violation manifeste de la législation actuelle.
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Accès interdit aux documents : Les documents exigés par la Cour sont logiquement archivés dans les sièges des partis, désormais fermés. De plus, toute réunion des anciens dirigeants est prohibée par le même article 2, qui interdit également la mise à disposition de moyens ou de locaux pour des activités politiques.
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Injonction impossible à exécuter : Pour Me Tall, la Cour suprême aurait dû informer le Premier ministre de l’impossibilité légale de mener à bien cette mission sans lever au préalable les interdictions. À défaut, elle se rendrait complice d’une violation du droit.
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Subventions déjà contrôlées : Le CNID-FYT, à l’instar d’autres formations politiques, a toujours soumis ses états financiers à la Cour des comptes et n’a jamais perçu de fonds sans validation des exercices antérieurs. Pour Me Tall, il ne s’agit donc pas d’un audit sincère, mais d’un procès politique déguisé.
« Il s’agit là d’une tragi-comédie, où l’on demande à un mort d’assister à ses funérailles », ironise l’avocat, reprenant les propos d’un jeune collègue.
D’autres anciens responsables réagissent
Au-delà de Me Tall, d’autres responsables d’anciens partis politiques ont également exprimé leur incompréhension. Ils jugent le délai fixé au 30 juin 2025 irréaliste, dénonçant une opération précipitée et orientée. Certains rappellent que la dissolution brutale des partis a empêché toute organisation de leurs archives, et que les conditions actuelles rendent tout dépôt de documents matériellement impossible.
Entre légalité et manœuvre politique
En attendant une éventuelle clarification juridique ou un revirement gouvernemental, les anciens responsables politiques semblent déterminés à ne pas répondre à une convocation jugée illégale, non pas par défiance à l’État, mais par respect de la loi.
« Même si nous désapprouvons le décret, même si nous l’avons attaqué, nous devons le respecter, tant qu’il n’a pas été annulé », conclut Me Mountaga Tall.
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MLS
Source: Bamada.net