La junte au pouvoir ne cache plus sa volonté de discuter avec certains groupes islamistes.
Près de neuf ans après l’intervention internationale contre les jihadistes dans le nord du Mali, les autorités de Bamako envisagent formellement de dialoguer avec certains de leurs chefs. L’initiative, qui n’en est pas à sa première évocation, avait été balayée mais là, elle semble s’imposer sur l’échiquier politique.
Des contacts mais “pas de négociations”
Le gouvernement malien refuse de parler de négociations avec des chefs jihadistes et affirme qu'”aucune organisation nationale ou internationale n’a été mandatée officiellement pour mener une telle activité“. Pas de démenti en revanche sur le dialogue ou le contact avec des groupes jihadistes, comme l’a annoncé quelques jours plus tôt le ministère des Affaires religieuses. Une mission qui devrait être menée par le Haut conseil islamique du Mali (HCIM), une structure regroupant des chefs et des autorités religieuses.
Des jihadistes fréquentables
L’option du dialogue avec certains groupes jihadistes n’a rien de nouveau. Plusieurs initiatives ont déjà été lancées par ce même Haut conseil islamique en toute discrétion, jusqu’à ce que le l’ancien président Ibrahim Boubakar Keïta reconnaisse officiellement début 2020 l’existence de tels contacts. Plus récemment, le Premier ministre de la transition Choguel Maïga a assuré à Jeune Afrique que le peuple malien appelle depuis des années à des discussions avec ces groupes.
Le dialogue dont on reparle désormais concerne Amadou Koufa et Iyad Ag Ghaly, les deux chefs jihadistes dirigeants du Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (GSIM, ou Jnim en arabe), groupe affilié à Al-Qaïda, et non pas à l’organisation Etat islamique.
Un dialogue aux contours flous
Le ministère en charge du dialogue assure que cette mission est assortie de “lignes rouges” sans préciser lesquelles. Les contours de ces tractations sont à ce stade très flous. Selon des experts, elles pourraient porter sur les modalités d’application de la charia, la loi islamique déjà imposée par les jihadistes du GSIM dans les zones qu’ils contrôlent, notamment en matière de code vestimentaire, de prohibition de la musique, de l’alcool et du tabac et de la mixité.
En attendant d’en savoir plus, le principe des discussions avec toutes les parties, y compris certains groupes jihadistes, entre dans le cadre d’une solution politique. Un sujet qui sera probablement au centre des Assises nationales annoncées pour fin décembre par la junte militaire au pouvoir.
La France, partenaire du Mali dans la lutte contre le terrorisme, est opposée à toute négociation avec les jihadistes qu’elle considère incompatible avec la présence de soldats français dans le pays.