La mobilisation des financements privés pour lutter contre les changements climatiques et la croissance verte en Afrique a beaucoup augmenté depuis 2010. Mais le paysage reste fortement dominé par des acteurs non privés, ont constaté les experts réunis lors d’un panel organisé le 24 mai à Charm el-Cheikh, pendant les Assemblées annuelles de la Banque africaine de développement.
Selon ces experts, il faut absolument que le secteur privé et le secteur public collaborent étroitement pour mieux financer la transition verte en Afrique. Or, la situation budgétaire des pays africains n’a cessé de se détériorer ces derniers temps, du fait de plusieurs tensions et crises : déficit budgétaire aggravé par les effets de la pandémie de Covid-19, hausse des taux d’intérêt et de l’inflation, dévaluation des monnaies, tensions géopolitiques, etc.
« Notre mission est de créer un avenir durable pour l’Afrique », estime Msizi Khoza, responsable ESG (environnement, social et gouvernance) à Absa Bank CIB. « L’impact des changements climatiques que nous voyons au quotidien crée beaucoup de volatilité et rend vulnérables les pays et les communautés. En tant qu’institution, nous voulons être une force de solutions », a-t-il dit.
Le continent a besoin d’importants financements et aucun partenaire ne saurait les fournir seul, a-t-il souligné. « Lorsqu’on regarde les besoins, on prend conscience qu’il faut coopérer, mettre en place des financements mixtes concessionnels pour permettre aux clients d’avoir les financements nécessaires mais à des taux accessibles. Il faut créer un cadre propice. Nous devons nous tendre la main les uns les autres », a-t-il plaidé.
Directrice générale de la Banque de développement d’Afrique australe (DBSA), Mme Boitumelo Mosako en a souligné l’engagement dans la finance climatique. DBSA a investi 300 milliards de rands dans un projet d’énergie renouvelable, un de ses principaux domaines d’investissement avec l’énergie, les transports, les infrastructures et, plus récemment, l’eau, la santé et l’éducation.
« Nous devons aider les pays que nous servons à mettre en place des économies résiliences sans carbone […]. À la DBSA, nous collaborons étroitement avec les gouvernements des pays d’Afrique australe », a-t-elle expliqué.
Les intervenants se sont montrés unanimes : le secteur public a le pouvoir et le mandat d’élaborer les politiques, les réglementations et les institutions à même de faciliter la croissance du secteur privé. Il doit engager des cadres politiques qui promeuvent le développement et encouragent les investissements du secteur privé, qui dispose des ressources, de l’expertise et de la flexibilité nécessaires pour identifier et exploiter les opportunités de croissance en Afrique. Le secteur privé peut, quant à lui, engager des financements essentiels dans des projets d’énergie renouvelable, d’efficacité énergétique des bâtiments et de pratiques agricoles durables, d’infrastructures, tout en apportant l’innovation et l’esprit d’entreprise à la transition verte en Afrique.
En fin de compte, il faut avoir un état d’esprit de solution, nécessaire pour créer des opportunités de croissance verte en Afrique.
« L’Afrique est bien placée en ce qui concerne l’économie verte, surtout dans le carbone. Travaillons ensemble, rapprochons-nous pour harmoniser ces réglementations en matière de finance verte », a ajouté Ramy El Dokany, président de l’Egyptian Stock Exchange, la bourse égyptienne.
« Mais on a affaire à des investisseurs et ceux qui apportent les fonds ont besoin de retour sur investissement […]. On doit donc créer les conditions pour attirer les investisseurs », a poursuivi le patron de la bourse égyptienne. « Parlons avec les décideurs, avec les investisseurs intéressés par les questions sociales, environnementales et de gouvernance. Parlons à ceux qui s’intéressent aux financements verts », a-t-il plaidé, indiquant que 11 banques égyptiennes s’intéressent aux ESG (critères environnementaux, sociaux et de gouvernance).
Ahmed Attout, directeur par intérim du Département du développement du secteur financier à la Banque africaine de développement, a fait observer que le marché de la finance verte en Afrique n’est pas si stagnant qu’il apparaît, mais évolue positivement. « À la Banque africaine de développement, nous agissons sur deux piliers : sensibiliser les investisseurs institutionnels africains et internationaux et mobiliser davantage d’investisseurs en matière de finance verte », a-t-il précisé.
La Banque émet des émissions vertes et sociales et appuie le secteur privé comme public. La Banque a octroyé à la Banque de Maurice une garantie de 147 millions de dollars, dont une partie est réservée aux financements verts. Le Bénin a bénéficié, quant à lui, d’une garantie partielle pour émettre des obligations visant à réaliser les Objectifs de développement durable, comme l’Égypte qui a bénéficié d’une garantie partielle de 345 millions de dollars pour émettre 500 millions de dollars de bonds Panda pour financer des projets verts et sociaux
« La chose la plus importante c’est d’améliorer la gouvernance. C’est le mot clé pour attirer les investisseurs qui aideront à créer de la richesse et des emplois », a conclu Ahmed Attout.
Source : agenceecofin