À la faveur de la visite du ministre de la Santé et de l’hygiène publique à Mopti, jeudi dernier, pour le lancement de la campagne de distribution gratuite de moustiquaires imprégnées d’insecticide à longue durée d’action (MILD), notre équipe de reportage a échangé avec le maire de la Commune urbaine de Mopti, Issa KANSAYE, sur ses projets d’assainissement et la situation sécuritaire dans la Venise malienne.
Ino-Matin : Quels sont vos projets en cours et les perspectives d’assainissement ?
Issa KANSSAYE : Merci pour l’occasion que vous m’offrez pour m’exprimer sur la situation de la ville de Mopti en matière d’assainissement et de sécurité.
D’abord, je rappelle que notre mandat est placé sous le signe de l’assainissement de la ville de Mopti qui est aujourd’hui très en retard par rapport aux autres régions. Notre ambition est de changer cette tendance, à travers certaines activités que nous entendons réaliser dans les cinq ans à venir.
Ainsi, il est prévu dans un premier temps, de faire un concours dénommé « Mopti ville propre » avec l’ensemble des 11 quartiers de la ville, dont le lancement a été fait, à la faveur de la Quinzaine de l’environnement qui s’est déroulée à Mopti. Ledit concours va durer 2 mois.
En outre, toujours sur le plan de l’assainissement, il a procédé au curage du collecteur de Mopti et de 40 km de caniveau à travers toute la ville.
De nouveaux caniveaux seront réalisés, en cas de nécessité, dans certaines rues.
Déjà, le profilage dans les différents quartiers a été fait pour identifier l’ensemble des rues qui seront concernées pour le remblayage avec de la latérite. Ces réalisations vont coûter 19 millions de FCFA à la mairie de Mopti. Pour cette action, nous avons eu à associer les chefs de quartier, les leaders religieux, pour nous appuyer avec la réalisation et nous indiquer les zones à problème.
Pour cette activité, nous avons privilégié les grands axes, les centres de santé, dont les voies d’accès ne sont pas faciles, les marchés et les mosquées.
Nous avons également eu à associer les associations intervenant dans le domaine de l’assainissement à qui nous avons offert des brouettes, des pelles et autres petits équipements pour renforcer leurs capacités d’intervention.
L’assainissement n’est pas l’apanage de la seule mairie. Normalement tout citoyen doit s’occuper de l’assainissement de son environnement. Il y va de l’intérêt de tous. Il en est de même pour la lutte contre le paludisme, une maladie très répandue à Mopti et qui ne cesse de faire des victimes.
Pour moi, ces différentes activités, non seulement, sont sources d’emplois, pour la jeunesse de Mopti, mais aussi, facteurs de réduction du paludisme et de la pauvreté. Mais comment ? Avec la Station de traitement des eaux usées, les jeunes peuvent transformer les déchets en engrais et en briques cuites. Ainsi, localement des jeunes seront formés dans la fabrication des briques cuites et la transformation des déchets. Le projet est en cours et d’ici à la fin de cette année, nous comptons voir au moins 150 jeunes prêts à travailler dans ces domaines porteurs et de longue durée. En effet, ces jeunes pourront faire le pavage des rues au niveau des quartiers avec ces briques cuites. Toute chose qui permettra d’assainir davantage leur environnement immédiat.
Par ailleurs, il y a le projet de mini-égouts. Nous avons entre 1500 à 2 000 ménages qui sont connectés à ces mini-égouts. Nous sommes dans l’attente de notre partenaire, Maurepas qui est en jumelage avec la ville de Mopti, pour le financement des 40% restant pour la finalisation du projet. Au fait, nous entendons agrandir la station existante.
Un autre projet d’assainissement c’est les boues de vidange. Ce projet est financé par la Fondation Carter qui veut aider la ville de Mopti à plus de 200 000 de Dollars (soit 100 millions FCFA) pour le financement d’une station qui va traiter les boues de vidange pour qu’elles servent d’engrais dans les champs. Là aussi, ça nous permettra de minimiser certains désagréments des déchets liquides dans la ville de Mopti.
IM : Des feux tricolores à Mopti pour la première fois ; hantise de la population en matière de sécurité physique. Que pensez-vous de la situation à votre niveau ?
IK : Comme vous l’avez dit, la sécurité routière, on est en train d’y faire face. Parce qu’avec la réalisation de ces feux, au niveau des différents points stratégiques de la ville, ça permet d’éviter des accidents, de réguler la circulation, et permettre à la police de s’occuper d’autres activités. Pour moi, un feu correspond à un policier. Aujourd’hui, si l’on met ces policiers quelque part, cela peut apporter un plus pour Mopti.
Côté sécurité humaine, là, effectivement, tu l’as si bien dit, nous sommes confrontés à un sérieux problème de sécurité à Mopti, il faut le reconnaître. Mopti est aujourd’hui 30-40% de la zone inondée est occupée par les terroristes. Toute la zone inondée sans exception. La zone exondée, là ça va un peu. Mais à partir de Douentza, Koro, Bankass, il y a souvent des attaques, par-ci par-là. Je peux dire tout simplement que nous ne sommes pas en sécurité à 100%. Mais, il faut remercier les forces de l’ordre et de sécurité qui sont tout le temps à l’œuvre pour que nous puissions qu’à même vaquer à nos affaires. Comme on le dit, la sécurité est relative partout. On ne peut pas avoir la sécurité à 100%, mais je vous avoue que nous, on dort avec un œil. Il n’est pas facile, surtout dans ces zones-là, tous les symboles de l’État sont attaqués; tout ce qui est administratif est attaqué, surtout les maires. Vous l’avez compris également dans ces zones, il n’y a plus de maires, de préfets, de sous-préfets. Tout ce qui est Etat n’existe plus dans ces zones-là. On attend que l’État fasse des efforts pour que la paix puisse revenir dans ces zones et pour le bien-être de la population. Je m’empresse pour dire aussi que dans ces zones, il n’y a pas d’écoles, et que les enfants sont abandonnés à eux-mêmes. Cette année, Mopti a eu à accueillir plus de 2 000 enfants venus de ces zones. Mais avec ces effectifs pléthoriques, peut-on avoir des résultats à la hauteur des souhaits ? Et ces enfants, que vont-ils devenir demain ?
Voilà un peu les inquiétudes que nous avons aujourd’hui et l’année prochaine qu’est ce qu’on fera si l’on sait qu’il n’y a pas de places pour recaser tous ces enfants. Aujourd’hui, à Mopti, l’économie est en berne.
Dans ces zones, non contrôlées par l’État, si on n’y prend pas garde, on risque d’avoir une insécurité alimentaire. Parce que maintenant, toutes les activités sont centrées dans la commune urbaine de Mopti.
Nous demandons aux autorités de prendre toutes les dispositions pour que dans les jours à venir la sécurité des personnes et des biens dans ces zones soit effective et que l’administration et l’État puissent jouer leur rôle régalien dans toutes ces localités.
Propos recueillis
par Sékou CAMARA
Source: info-matin.