Guerre au Yémen, blocus contre le Qatar, affaire Khashoggi, prisonniers du Ritz-Carlton de Riyad, projets pharaoniques de ville futuriste au milieu du désert, etc. Mohammed Ben Salman (MBS) est sans doute l’un des princes saoudiens qui ont fait couler le plus d’encre dans la jeune histoire du royaume wahhabite, dont les leaders sont traditionnellement soucieux de laver leur linge sale en famille et craignent plus que tout les décisions abruptes et la prise de risque.
Depuis son avènement en 2015, celui qui est devenu depuis le prince héritier a donné un énorme coup de pied dans la fourmilière saoudienne, rompant brutalement avec la culture politique de son pays. Les discussions interminables jusqu’au bout de la nuit pour parvenir à de complexes compromis entre princes ou chefs de tribu ? Très peu pour lui. Privilégier l’expérience et la prudence ? Le plus sûr moyen de faire trépigner d’impatience l’impétueux prince barbu.
Lui veut décider – seul et vite. Aux autres d’exécuter. Quitte à bousculer la gérontocratie saoudienne. Quitte, aussi, à se prendre les pieds dans le tapis du fait de décisions plutôt motivées par la volonté de frapper fort que par une stratégie mûrement réfléchie. Qu’importe, MBS a foi en la théorie du chaos fertile. Sa méthode a eu le mérite de sidérer ses rivaux et de le propulser, en quelques années, au centre du pouvoir saoudien.
De prince marginal à prince héritier
Celui qui, sauf improbable retournement de situation, montera un jour sur le trône, n’était pourtant pas prédestiné à capter autant la lumière. Prince parmi des milliers, il n’est même pas le fils aîné de son père, le roi Salman. Ce dernier, lorsqu’il était gouverneur de Riyad, n’imaginait sans doute pas lui-même que l’un des fils de sa troisième épouse deviendrait sa canne la plus sûre dans ses vieux jours. Mais c’est ainsi : quels que soient les défauts de MBS, force est de constater qu’il a su se frayer un chemin jusqu’au sommet du pouvoir, contre tous les pronostics.
De son adolescence, marquée par l’angoisse du manque – certes toute relative, quand on se nomme Saoud –, à l’infiltration et à la manipulation de Twitter, en passant par la mise à l’écart de son principal rival à l’accession au trône, son cousin Mohammed Ben Nayef (MBN), deux ouvrages parus récemment retracent ce parcours : Blood and Oil (paru aux éditions John Murray), des journalistes américains Bradley Hope et Justin Scheck, et MBS: The Rise to Power of Mohammed Bin Salman (éditions William Collins) de Ben Hubbard. JA livre le détail de l’histoire secrète de l’ascension du prince héritier d’Arabie saoudite.
Source : Jeune Afrique