Une nouvelle fois, le président sud-africain est dans une zone de fortes turbulences. Et c’est à croire qu’il affectionne les problèmes. D’abord, le scandale Nkandla. Puis ses rapports plus que controversés avec les Gupta. Enfin, la semaine dernière, le comble avec le remaniement ministériel ayant emporté l’ex-ministre des finances, Pravin Gordhan. Le tout dans un contexte de crise économique et d’un malaise social diffus. Conséquence, il est au cœur d’une intense pression. Les appels à la démission viennent de partout. Y compris des camps qui lui étaient jusqu’ici dévoués comme le parti communiste et la puissante centrale syndicale, la Cosatu. Mais Jacob Zuma aura ces dernières années fait preuve d’une phénoménale capacité à se sortir du pétrin. Chez lui, la résilience est un caractère inné. D’où l’idée selon laquelle son pays, locomotive économique du continent, est aujourd’hui plus exposé que lui-même. Ses choix empreints de provocations s’ajoutant à un certain autisme de sa part, il engendre une incertitude, partie pour achever l’économie déjà chancelante de la nation arc-en-ciel.
Le pire est à venir
En Afrique du sud, les choses vont de mal en pis. Depuis quelques années déjà, le pays vit au rythme des scandales impliquant son président et des manifestations d’une population désabusée et désenchantée. Cependant, on a l’impression que tout ce que le pays a traversé jusqu’ici n’aura été que des broutilles face aux événements qui se profilent. En grande partie, parce que la contestation à laquelle fait actuellement face Jacob Zuma est sans précédent. Certes, ses opposants ne lui font jamais de cadeau. Mais jusqu’au remaniement gouvernemental qu’il a opéré dans la nuit du 30 au 31 mars 2017, il pouvait compter sur d’indéfectibles alliés que sont la Cosatu et le Parti communiste, entre autres. Mais cette fois, ceux-là mêmes lui tournent le dos et, chose inédite, appellent même à son départ. Même à l’intérieur du Congrès national africain (ANC, le parti au pouvoir), il y en a qui ne voudraient plus le sentir. Bien entendu, cette hostilité, même partagée, ne suffira pas à le faire plier. Parce qu’en affairiste averti et avisé qu’il est, il a su s’acheter une fidélité absolue de la part de certains. Qu’il vente ou qu’il neige, il pourra compter sur un groupe d’obligés dont le point de vue compte.
L’Afrique du sud, une pauvre victime
Il en sera tout autre de l’Afrique du sud, malheureusement. Le pays de Mandela, déjà suffisamment affecté par l’arrogance et l’autisme de Jacob Zuma, laissera des plumes dans la crise en cours. Parce que toute la controverse dans laquelle le président se retrouve ainsi écorne davantage sa propre image. Ce qui rejaillit tout naturellement sur le pays. Déjà, le départ de Gordhan est symboliquement perçu comme le début de la bamboula et de la prévarication éhontée des finances publiques. Estimant qu’aucune rigueur ne sera plus de mise dans la gestion des ressources nationales, l’agence de notation Standard & Poor’s vient de dégrader la note souveraine de l’Afrique du sud. Une décision qui n’est pas pour rassurer les investisseurs et autres créanciers potentiels du pays. On annonce que Moody’s pourrait, elle aussi, suivre la dynamique très bientôt. Le rand, la monnaie nationale, chutant dans la foulée face au billet vert, on s’attend à un renchérissement du coût de la vie. En gros, toutes les conditions d’une pression sociale encore plus intense sont en train d’être créées. Du fait du seul refus du président de la République à se conformer à un minimum de règles de bonne gestion. Ainsi, lui dont attendait des miracles, se révèle une grande menace pour ceux qu’il avait fait rêver.
Boubacar Sanso Barry
Source: ledjely
