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Afrique du Sud : noir c’est noir…

Encore des magasins vandalisés, des étrangers lynchés ou brutalisés, les violences xénophobes se répandent en Afrique du Sud. Comme en 2008, comme en 2010, ce sont des populations noires qui s’en prennent à des immigrés provenant de l’Afrique noire. C’est Mandela qui doit pleurer dans sa tombe.

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Le township d’Alexandra à Johannesburg est un vrai coupe-gorge selon les autorités locales. Quand j’y entre ce matin d’hiver (juillet 2010), l’air est plutôt à la douceur. Dans un bar « congolais », la musique joue bruyamment une rumba qui plonge les clients dans la nostalgie de leur pays. L’homme que je suis venu rencontrer est un survivant. Les cicatrices qui parcourent son dos confirment les multiples coups de machettes qu’il a reçu au cours d’une vague d’attaques xénophobes qui avaient déchiré le pays en 2008. Plusieurs dizaines d’étrangers furent lynchés par des foules parfois ivres (un alcool fort et à bas prix fait bien des ravages sur les routes et dans les quartiers pauvres d’Afrique du Sud). Jacques, mon interlocuteur, n’a dû son salut qu’à l’intervention miraculeuse d’un pasteur qui a menacé les assaillants de finir en enfer.
Parti de Kinshasa avec un groupe d’amis tous alertés par des rumeurs faisant de l’Afrique du Sud un nouvel Eldorado plein de promesses, Jacques n’a connu depuis que des petits boulots mal payés et salissants. Qu’à cela ne tienne, il s’honore à ne pas rester les bras croisés comme certains Noirs sud africains ruminant leur déception des lendemains d’apartheid désenchantés. Le chômage demeure fort élevé parmi les populations noires (24 % selon les chiffres officiels, beaucoup plus disent les intervenants locaux). Certaines voix ont tenté de blâmer l’élite de l’ANC (le parti au pouvoir) qui se sont largement enrichis sans penser aux pauvres des townships de misère. Sans doute par facilité, d’autres ont préféré porter l’odieux aux étrangers accusés de « voler les emplois et de casser les tarifs en consentant à des salaires de misère ».
En 2010, en plein durant la coupe du monde de soccer, vitrine exploitée par les autorités sud africaines pour vanter les charmes de leur pays, de nombreuses attaques contre les immigrants africains ont mis le feu dans la région du Cap. Des Zimbabwéens étaient particulièrement visés.
Dans les pays africains, la déception ne se cache plus. « Au plus fort de l’apartheid, se rappelle un journaliste de Durban, les leaders et populations noirs de notre pays ont pu se réfugier dans les pays voisins. À l’époque, personne ne menaçait de nous chasser. La solidarité était réelle. J’ai honte de ce que nous faisons subir maintenant à nos frères… »

La honte, Desmond Tutu, archevêque de Soweto, prix Nobel de la paix, conscience de toute la nation, l’a plusieurs fois reconnu. Et lui ne se gêne pas de dénoncer les autorités sud africaines qui ne se pressent pas de condamner ces attaques, y trouvant même une « opportune » distraction de leur calamiteuse gestion du pays. Ce ne sont pas les récentes déclarations du roi Zulu appelant les « étrangers à plier leurs bagages et quitter le pays » qui lui donneront tort. Le propre fils du président Zuma, Edward, a aussi appelé à la déportation de « tous les étrangers ». Le président aura beau avoir annulé un voyage outre-mer pour démontrer qu’il prend au sérieux les dernières attaques xénophobes, il y aura toujours un arrière-goût amer d’un « trop peu trop tard ».
C’est mon ami Themba qui m’a paru encore plus pessimiste ces derniers jours. Selon lui, l’Afrique du Sud est tristement entré dans une ère post Neslon Mandela. « Tant qu’il était vivant, Madiba nous obligeait à nous dire que nous avions quelque chose d’un grand peuple. Que la bassesse ne nous était pas permise. Depuis son départ, tout s’effondre, Sa propre famille se déchirant pour des raisons d’argent, tu imagines bien que plus rien n’a de valeur… »
Un photographe sud africain a capturé sur son appareil les dernières heures d’un immigrant poignardé à mort. « Il y a 20 ans, dit-il, la ligne de haine était raciale. Moi photographe blanc aurait été plus en danger face à ces trois jeunes noirs en train de commettre un assassinat. Aujourd’hui, ça ne se joue plus sur la couleur mais sur le lieu de naissance. »

Personne ne pourra dire que cela s’appelle du progrès.

Source: journaldemontreal

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