Dans une lettre dite confidentielle qui date du 29 octobre 2018, mais qui a été virale sur les réseaux sociaux alors qu’elle n’est même pas encore parvenue à son destinataire, le Directeur général de l’administration des biens de l’Etat, structure qui relève du ministère de l’Economie et des Finances, dans le cadre de l’inventaire du parc automobile de l’Etat, a fait la requête auprès de Me Mountaga Tall, ancien ministre, de lui rendre 4 véhicules de l’Etat qui seraient encore à sa disposition. La réponse de l’enfant de Ségou a été diligente : « Je n’ai vu, ni utilisé aucun de ces véhicules depuis mon départ du gouvernement ».
Une lettre dite confidentielle qui circule sur les réseaux sociaux avant même de parvenir à son destinataire. C’est curieux, mais bien possible. « Dans le cadre du suivi et de l’inventaire des véhicules des cabinets ministériels, il m’est revenu de constater que les véhicules ci-dessous référencés seraient, à ce jour, à votre disposition. Il s’agit : du véhicule Toyota Land Cruiser VX, immatriculé K-88 63 ; du véhicule Toyota Land Cruiser V8, immatriculé K-25 17 ; du véhicule Kia Rio, immatriculé K-12 88 ; du véhicule Mercedes E 200, immatriculé K-34 24 », explique la fameuse lettre confidentielle adressée à Me Tall par le Directeur général de l’administration des biens de l’Etat.
La requête est motivée par le fait qu’il veut mettre de façon « efficiente la comptabilité-matière en ce qui concerne les matériels roulants de l’Etat ».
Pour cela, il demande à Me Tall de « bien vouloir faire parvenir lesdits véhicules au parc outil (ex-garages administratif) ».
La rigueur voudrait que la lettre parvienne à Me Tall, avant que le public ne fasse connaissance (encore qu’elle est confidentielle). Mais, tout porte à croire que le Directeur général de l’administration des biens de l’Etat a été léger dans sa démarche. Et la phrase « il m’est revenu de constater que les véhicules ci-dessous référencés seraient, à ce jour, à votre disposition », le prouve à suffisance. Quand on doute, on a n’accuse pas et on ne demande pas de rendre. Pour quel dessein, le DGABE a-t-il agi de la sorte ? La lettre a-t-elle été diffusée sur les réseaux sociaux à son insu ? Ou simplement, veut-il salir la réputation de Me Mountaga Tall ?
Mais fidèle à sa réputation d’homme posé ayant le sens du discours, Me Tall a eu les mots justes pour rappeler notre DGABE à l’ordre. Premièrement, il dit n’avoir pas vu et utilisé aucun de ces véhicules depuis son départ du gouvernement. Ensuite, il dénonce la méthode peu orthodoxe utilisée par le controversé Directeur général de l’administration des biens de l’Etat. « La méthode utilisée pour en parler dénote des véritables intentions : me salir ». Et l’avocat d’ajouter qu’il est blanc comme neige.
Cependant, Me Tall lui donne des pistes. « Je n’ai pas quitté le ministère avec une aiguille de l’Etat et a fortiori autant de véhicules », lui dit l’avocat avant de rappeler que le véhicule Toyota Land Cruiser VX, immatriculé K-88 63, a été remis le jour de la passation, à son successeur, Arouna Modibo Touré, qui l’a d’ailleurs utilisé un moment, ainsi que lui le faisais, comme véhicule de mission.
En ce qui concerne le véhicule Toyota Land Cruiser V8, immatriculé K-25 17, Me Tall souligne qu’après recoupement, il est au garage bien avant son départ du ministère. S’agissant de la Mercedes E 200, immatriculé K-34 24, Me Tall rappelle qu’il a trouvé cet ancien véhicule de fonction des ministres en épave, et qu’il se trouve au même garage que le précédent et les deux peuvent être récupérés à tout moment. Enfin, quant au véhicule Kia Rio, immatriculé K-12 88, qu’il a utilisé comme véhicule de domicile, il a été rendu au ministère de l’Economie numérique, où il serait aujourd’hui utilisé comme véhicule de liaison au cabinet.
Coup de tonnerre, le ministère de l’Economie numérique et de la Communication (MENC), suite à cette mise au point de Me Mountaga Tall a, à son tour, rendu public un communiqué dans lequel il indique : « suite au communiqué de Me Mountaga Tall, paru dans les réseaux sociaux le 1er novembre 2018 et dans le N°4592 du journal l’Indépendant relatif aux véhicules de l’Etat remis au ministre Arouna Modibo Touré, lors de la passation de service, le ministère de l’Economie numérique et de la Communication tient à informer l’opinion publique que les véhicules Toyota VX N°K8863 et Toyota V8 N°K2517 auxquels il fait allusion n’ont jamais figuré dans le parc automobile de son département. Les véhicules figurants dans le PV de passation entre les deux ministres sont : le véhicule Toyota Land Cruiser N° AR 81 42 MD restitué au ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique le 07 juin 2017 ; la Mercedes E 200 G 19 ; et enfin le véhicule de liaison de marque Kia immatriculé : AP 86 75 MD. Par conséquent, le ministère de l’Economie numérique et de la Communication dément formellement avoir reçu de Me Mountaga Tall les véhicules Toyota VX 88 63 et Toyota V8 N°K25 17 ».
Ce communiqué émanant du secrétaire général du département, Cheick Oumar Maïga dit Gilbert, n’a pas manqué de relancer le débat sur les réseaux sociaux, faisant même douter certains de la bonne foi de l’enfant de Ségou.
Et Me Mountaga Tall de revenir à la charge à travers une seconde et dernière « mise au point sur les véhicules précédemment attribués au ministre Mountaga Tall après le communiqué du ministère de l’Economie numérique et de la Communication »
Dans cette mise au point paru toujours sur les réseaux sociaux, l’avocat explique : « En conclusion de ma mise au point sur la lettre dite confidentielle de la DGABE publiée sur les réseaux sociaux, j’écrivais ‘’On se dit donc à la prochaine attaque ! Dieu Merci’’.
J’ignorais honnêtement que l’attaque serait aussi rapide, frontale et dérisoire. Elle est arrivée sous la forme d’un communiqué du ministère de l’Economie numérique et de la Communication. Dans ce communiqué publié ce jour 02 novembre 2018 ‘’le ministère de l’Economie numérique et de la Communication dément formellement avoir reçu de Me Mountaga Tall les véhicules Toyota VX 8863 et Toyota V8 K-2517’’.
Dont acte sauf que : 1- Le véhicule Toyota K-2517, réimmatriculé AR 8143 MD est l’actuel véhicule de fonction d’un conseiller technique du ministère de l’Economie numérique et de la Communication. Il avait été préalablement affecté au DFM. Il figure donc bel et bien dans le parc automobile dudit ministère. Le démenti tient-il toujours ? 2- Le véhicule Kia Rio K-12 88 réimmatriculé AP 86 75 MD est reconnu être le véhicule de liaison du MENC. No comment donc ! 3. C’est bien le véhicule Toyota Land Cruiser VX N° AR 8142 que j’utilisais pour les missions qui a été remis au nouveau ministre le jour de la passation, la Toyota immatriculé K- 8863 étant celui qui se trouve au garage. Il ne fait peut-être pas partie du parc du MENC mais il appartient à l’Etat et plus précisément au ministère de l’Enseignement supérieur. Il était au garage quand je quittais ce ministère. 4- Enfin d’importantes omissions sont à signaler. Elles portent sur les véhicules neufs attribués au MENC après le sommet Afrique – France que je n’ai ni utilisés ni attribués. Il convient donc de corriger le Procès-verbal de passation sur ce point. Au total, je n’ai toujours pas un seul véhicule de l’Etat à mon niveau et le communiqué du MENC comporte des erreurs et omissions qu’un simple appel téléphonique entre attachés de cabinet aurait dissipé. Ayant d’autres choses à faire dans la vie pour moi-même et pour le Mali, à la place qui est la mienne, cette mise au point serait ma dernière intervention dans cette fausse ‘’affaire’’. A la prochaine attaque sur un autre sujet. Signée Maître Mountaga Tall. Dieu veille ! ».
Cette mise au point de l’avocat qui sera sa dernière dans cette fameuse affaire doit normalement clore ce débat. Un débat qui n’honore personne parce que manquant la forme qui sied en la matière. Ce n’est pas sur les réseaux sociaux qu’on doit débattre des choses confidentielles.
Pendant ce temps, l’ancien ministre de l’Emploi et de la Formation professionnelle, et ancien compagnon politique de Me Mountaga Tall, Modibo Kadjoké, qui fut secrétaire général du CNID Faso Yiriwa Ton, le parti de Me Tall, profite pour soutenir son ancien mentor. Sur sa page Facebook, il s’est fendu d’un communiqué qui interpelle : « Quand tu trouves le vautour en train de dévorer un corps humain, dis ‘’quitte notre corps !’’ dit une sagesse bien de chez nous. Hier c’était le brouillage d’une radio, aujourd’hui c’est la légèreté ou l’incompétence d’un cadre doublé d’une volonté de salir un citoyen, Me Mountaga_Tall. A qui le tour la prochaine fois ? Dans les deux cas le Premier ministre, chef du gouvernement Soumeylou_Boubeye_Maiga, acteur majeur de mars 91, est interpellé. Il doit apporter la preuve de la sincérité du combat de sa vie qui a fait sa renommée : la protection des droits fondamentaux du citoyen. Une enquête transparente sera justice. Je suis outré par le silence assourdissant de tous les ‘’démocrates et patriotes sincères. Qu’est-ce qui nous arrive ? ».
Sera-t-il entendu ? Là réside la question.
Abdoulaye Diakité