Le Premier ministre du Niger Ali Mahaman Lamine Zeine, était hier ce vendredi 23 mai 2025 dans notre pays pour visite officielle d’une journée dans le cadre de la mise en œuvre des grands axes stratégiques de l’Alliance des Etats du Sahel (AES), à savoir : la sécurité collective, l’intégration économique, la souveraineté financière, et la promotion de l’identité culturelle et éducative.
Au cours d’une rencontre tenue en marge de son séjour à Bamako, les autorités de la Confédération des États du Sahel (AES) ont défini les fondements d’une institution financière régionale : la Banque confédérale pour l’investissement et le développement (BCID-AES).
La BCID-AES repose sur quatre piliers essentiels : la sécurité collective, l’intégration économique, la souveraineté financière et l’identité culturelle et éducative.
L’objectif de l’AES est de doter la région d’un mécanisme de financement autonome pour soutenir des projets structurants adaptés aux réalités locales. Cette initiative vise à promouvoir un développement durable et à renforcer notre indépendance économique.
Pour les dirigeants de l’Alliance, la mise en place de la BCID-AES marquera une étape décisive dans notre quête de stabilité, de prospérité et de souveraineté pour le Sahel.
Comme quoi, la souveraineté brandie ne peut continuer d’être incantatoire. Elle a besoin d’être soutenue, de reposer sur un socle stable.
Voilà que l’AES met l’économie au centre de son action, comme l’avait préconisé Choguel Kokalla il y a déjà deux ans. À l’époque, qu’est-ce qui n’avait pas été dit ? Aujourd’hui encore, il continue d’être la cible des fantassins de la transition pour avoir simplement dit que la propagande ne peut prospérer dans la durée, que pour bâtir une stabilité pérenne, il faut un soubassement économique solide. Travaillons à consolider l’économie, car ventre vide n’a point d’œil dit la sagesse populaire.
Notre pays est outillé face aux exigences du développement de l’AES
Aujourd’hui, il y a dans le narratif officiel de l’AES que le pilier « développement » représente le levier central pour accélérer la transformation économique et sociale des pays membres.
La création de la Banque Confédérale pour l’Investissement et le Développement (BCID-AES), une institution financière régionale qui ambitionne de soutenir une intégration économique durable, de stimuler les investissements et de renforcer la capacité productive des économies sahéliennes, procède de cette quête-là.
Et nul n’ignore que l’opérationnalisation du pilier développement constitue une opportunité stratégique pour bâtir un marché commun fort de plus de 78 millions de consommateurs, dynamiser les industries locales et créer des millions d’emplois, notamment pour la jeunesse.
En attendant la très bonne nouvelle de la convergence économique de nos Etats de l’Alliance, sommes-nous mieux outillés au Mali face aux changements en perspective ? Avons-nous des raisons de nous inquiéter au regard des défis internes auxquels nous faisons face ?
Le Mali est-il outillé, au moins autant que ses alliés de l’aventure sahélienne ?
En ce mai 2025, la chorale nationale entonne l’hymne à la gloire de l’un des colonels devenu général au détour d’un bavardage entre partisans (Dialogue inter-malien pour la paix et la réconciliation), parce qu’il a proposé une vieille recette de l’EDM mis en œuvre avec succès pendant le ramadan passé qui permettra aux Bamakois d’avoir du courant 19 heures sur 24 ; quelques 380 tracteurs et motopompes ; la poursuite de l’équipement auprès des partenaires de nos forces engagés depuis 10 ans sur le terrain ; et l’assurance quant aux suites apaisantes de la dissolution des partis politiques et de la suppression de toutes les activités politiques dans la République qui affirme pourtant sa fidélité aux principes démocratiques.
Au même moment, chez nos voisins et alliés, Burkinabé et nigérien, le narratif souverainiste se veut plus pragmatique, plus concret, plus en phase avec les aspirations du peuple.
Au Bukina Faso, le plus jeune chef d’État du monde, le capitaine Ibrahim Traoré, qui est dans les fourches caudines de tous les fantassins de la guerre communicationnelle contre l’Afrique libre et souveraine, tient bon et draine tous les espoirs et toutes les aspirations légitimes de son peuple et de l’Afrique.
Non par le discours, la propagande et la manipulation, mais par des actions concrètes de développement sur le terrain.
À ceux qui brandissent les soi-disant contre-performances de l’armée burkinabè et des volontaires, IB oppose les progrès et les actions d’envergure au plan agricole.
En lançant la campagne agricole 2025-2026 ce jeudi 22 mai 2025 à Bobo-Dioulasso, le président du Faso, le Capitaine Ibrahim Traoré, a remis un important lot d’intrants et de matériels agropastoraux et halieutiques d’une valeur de plus 104 milliards destinés à la modernisation et à l’intensification de la production agricole aux agriculteurs burkinabè.
Il s’agit de 608 tracteurs, 485 motopompes, 1 102 motoculteurs, 150 broyeurs polyvalents et 10 unités de transformation de patate douce.
Dans le lot, également 70 000 tonnes d’engrais minéraux et 14 631 tonnes d’engrais organiques.
À cela s’ajoutent des moyens roulants : 17 camions, 36 véhicules et 1 033 motos pour les agents de terrain.
Dans le domaine de la pisciculture, 935 cages flottantes sont mises à la disposition des producteurs.
Côté élevage, il s’agit de 66 millions 952 895 doses de médicaments vétérinaires, 31 851,5 litres de produits phytosanitaires, 11 169,5 tonnes d’aliments SPAI et 15 000 tonnes d’aliments végétaux.
Chez nous, malheureusement, au même moment, on change de cavalier pour conduire notre campagne cotonnière, le Pdg de la Compagnie Malienne pour le Développement des Textiles (CMDT), Mamadou Moustapha Diarra ayant été limogé sans ménagement le 8 mai à un moment critique où la campagne agricole est déjà lourdement compromise.
En effet, outre l’ancien Premier ministre Moussa Mara, il se dit de bouche à oreille que la mise en place des engrais est encore loin d’être à hauteur de souhait, alors qu’elle devrait être bouclée et la situation financière reste très difficile dans les zones CMDT, les cotonculteurs courent toujours derrière leurs dus pour la campagne écoulée, et certains fournisseurs accusent jusqu’à trois campagnes d’impayés (2022 à 2024).
Les appels d’offres relatifs aux produits phytosanitaires sont certes lancés, mais les contrats ne sont toujours pas signés. Or, l’importation de ces produits prend un minimum de 120 jours, ce qui reporte leur arrivée aux environs d’août 2025, bien après le pic des besoins.
Le stock résiduel d’anti-jassides, quant à lui, constituerait une quantité manifestement insuffisante pour répondre aux exigences de la campagne 2025-2026.
Le nouveau PDG, Kouloumégué Dembélé, installé comme un messie ce 20 mai, pourrait-il sauver l’objectif de 650 000 tonnes de coton-graine pour la campagne ?
Or, la CMDT, seconde colonne vertébrale économique et sociale de notre pays, soutient la vie de millions de Maliens, principalement, les producteurs, ouvriers, transporteurs, fournisseurs, prestataires logistiques. Tout retard ou désorganisation affecte directement la stabilité sociale et les équilibres macroéconomiques du pays.
Comme on le voit, contrairement au Burkina, nous sommes mal préparés et mal barrés.
Quid du Niger que nous connaissions hier par le pays des Haoussas et des ‘’fura be yan’’ ?
C’est sur ce pays du Général Tchiani que le Mali souverain, pourtant non dépourvu de ressources pétrolières, entend désormais reposer sa tranquillité énergétique.
Si la signature du contrat de fourniture de carburant, la semaine dernière, à Niamey n’incite aucune jalousie de la part d’une transition qui n’a d’oreille que pour les sérénades de ses thuriféraires et des odes à sa gloriole, il n’est pas désobligeant de signaler qu’un de ses alliés majeurs dans la croisade contre le terrorisme vient de dévoiler le premier buggy, pardon véhicule militaire tout terrain blindé dénommé Tamgak Wangari conçu, assemblé et peaufiné dans les ateliers du pays, qu’il engagera contre les motos des jihadistes. Peut-être que nous allons en importer demain, qui sait ?
Eviter d’être le débouché et le marché de l’AES
L’harmonisation des éléments de langage dans la guerre communicationnelle est une stratégie opérationnelle indispensable au sein de l’Alliance des Etats du Sahel.
Et nul ne peut minimiser ses résultats. Grâce à une coordination stratégique, diplomatique et communicationnelle, l’AES a tenu face à la puissante machine de manipulation occidentale et a même gagné la partie.
Mais, les défis d’avenir de l’AES ne sont pas que la guerre de la communication, le bavardage. Confrontées à l’une des pires crises existentielles qui soit, les populations du Sahel n’aspirent pas qu’à la souveraineté et à la dignité, elles veulent vivre et jouir de la liberté et du progrès.
Appeler à la vigilance ici au Mali des autorités de la transition quant à la mise en œuvre du troisième pilier de l’AES (développement) n’est pas une désobligeance, au moment où le Burkina et le Niger semblent prendre de l’avance sur nous.
Car, il est de notre devoir et de notre honneur à tous de tout faire pour que, demain, le Mali ne soit pas le marché, le débouché des produits manufacturés et agricoles de nos frères qui travaillent tandis que nous parlons. Chaque jour, IB est dans un champ, inaugure une usine, donne du matériel aux paysans… Tiè, keleya tuma sera de. Jamana te jon ni Kuma mugu ye.
Notre voisin du Burkina Faso fabriquera désormais ses propres vaccins et médicaments vétérinaires pour un coût global de 21 milliards de FCFA et avec une capacité annuelle de 110 millions de doses de vaccins (50 millions liquides et 60 millions lyophilisés).
Ce vendredi 23 mai 2025, les travaux de construction de la première unité de production de vaccins vétérinaires à Samandeni, dans la région des Hauts-Bassins.
Cet ambitieux projet s’inscrit dans le cadre de l’Offensive agropastorale et Halieutique (OAPH) 2023-2025 et vise à doter le Burkina Faso d’une industrie pharmaceutique vétérinaire autonome.
L’unité permettra non seulement de satisfaire la demande nationale, mais également d’envisager des exportations.
Au moment où le Burkina forme sa jeunesse au travail de la terre qui n’a jamais menti, ici chez nous au Mali, tous les jours, ce sont des formations des activistes, videomans krikra et des haut-parleurs pripra de la transition en matière de propagande, pardon de guerre informationnelle.
Avec plus de 5 millions de Maliens qui consomment du thé chaque jour, notre pays continue toujours d’importer le thé, largement exonéré du reste.
Ce samedi 24 mai 2025, il y a un an jour pour jour que le chef de l’État avait lancé les travaux de construction de la centrale solaire de 200 mégawatt-crête de Sanankoroba dans la localité de Nienguékoro. Le projet devrait être réalisé sur une durée de 12 mois pour un coût de plus de 120 milliards de Fcfa.
Apparemment, ce sera un rendez-vous énergétique manqué. Et les Maliens devront attendre pour avoir du courant.
Nous ne sommes pas qu’en retard, nous sommes mal partis, pour paraphraser Réné Dumont.
PAR SIKOU BAH