Le Toulousain de 15 ans est poursuivi pour association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste. L’autre, âgé de 16 ans, était toujours entendu par la justice en début de soirée vendredi.
Le mineur de 15 ans, soupçonné d’avoir voulu se rendre en Syrie pour y mener le djihad, a été mis en examen vendredi pour association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste. Il a été placé sous contrôle judiciaire alors que son camarade de 16 ans était toujours entendu en début de soirée.
Les deux lycéens, Yacine et Ayoub, revenus le 26 et le 27 janvier en France, font partie de la douzaine de mineurs partis en Syrie combattre les forces de Bachar el-Assad. A ce stade de l’enquête, rien ne semble indiquer que ces adolescents aient été recrutés en France par une filière. Ils seraient plutôt partis par leurs propres moyens, après avoir utilisé internet et les réseaux sociaux pour mener à bien leur projet. L’un des deux, qui a un oncle salafiste, était semble-t-il guidé vers des sites radicaux par des membres de son entourage, précise une source proche du dossier. Les enquêteurs tentent de comprendre leur processus d’auto-radicalisation. Ils entendent également voir comment ils ont pu être approchés et s’ils ont rencontré des «facilitateurs» venus de France, ce «petit groupe de personnes» chargées d’orienter leurs compatriotes une fois arrivés dans la zone frontalière turco-syrienne.
«Lavage de cerveau sur internet»
«Tous les magistrats sérieux savent pertinemment qu’il n’y aura jamais de condamnation dans ce dossier», a réagi avant la mise en examen Me Yassine Bouzrou, l’avocat de Yacine, 15 ans. Sa consoeur Me Agnès Dufétel-Cordier a souhaité qu’ «au terme de cette journée, les esprits se calment. Notre client a été présenté comme un djihadiste, ce qu’il n’est pas», a-t-elle ajouté. Ce dernier invoque des motivations humanitaires à son voyage, selon une source proche du dossier.
Une motivation pacifique relativisée par des sources proches du dossier au vu des premiers éléments de l’enquête, comme une photo des deux garçons avec une arme diffusée sur Facebook. Tous deux élèves en classe de seconde générale au lycée des Arènes à Toulouse, les adolescents sont partis le 6 janvier sans prévenir leur proche et sont rentrés séparément de Turquie, avec son père pour l’un, un proche pour l’autre. Ils n’ont aucune mention sur leur casier judiciaire. Le plus jeune est présenté comme un élève sans histoire. Pour son père, aucun doute, il est «une victime» qui a «subi un lavage de cerveau sur internet». «On doit les traiter en tant qu’enfants, pas comme des criminels», estime-t-il dans une interview à France 3 Midi- Pyrénées. C’est pourtant le plus jeune qui avait utilisé la carte bleue de ses parents pour acheter son billet d’avion et celui de son ami pour la Turquie. Le parcours du plus âgé semble plus difficile; des membres de sa famille auraient des convictions religieuses assez dures et lui-même ne semble pas évoquer le caractère «humanitaire» de son départ.
Les détails de leur périple restent encore peu connus et les versions des deux garçons diffèrent. Pour Me Dufétel-Cordier, il ne fait aucun doute que son client et le camarade de ce dernier ont réalisé, une fois qu’ils ont réussi à passer la frontière, qu’ils avaient commis une erreur. «Ils se sont rendu compte qu’il fallait partir, que ça commençait à prendre une tournure qu’il n’avaient pas imaginée une seule seconde et qu’il fallait à tout prix essayer de rentrer», a-t-elle expliqué. «Du haut de ses 15 ans, il a fait preuve d’une naïveté et d’une crédulité sans pareilles et aujourd’hui il le reconnaît», a déclaré l’avocate. Selon le père du plus jeune, son fils «s’est retrouvé dans un guet-apens. Ils sont tombés avec les moins pires, avec le Front al-Nosra» – représentant officiel d’al-Qaida en Syrie.
Des centaines de Français ou étrangers vivant en France sont allés se battre en Syrie ces dernières années, ou ont au moins eu cette intention. Mais la révélation du départ des deux adolescents a frappé les esprits à cause de leur âge. Le président François Hollande a affirmé la nécessité de «protéger nos jeunes de France». Le ministre de l’Intérieur Manuel Valls a annoncé qu’il présenterait des mesures, notamment la mise en place d’un service d’alerte pour les familles. Il a précisé devant les députés français qu’il préparait avec les services de renseignement «un certain nombre de propositions» qu’il présenterait prochainement au président de la République.
Source: LE FIGARO