Le milliardaire américain était accusé d’avoir, entre 2002 et 2005, abusé de dizaines de mineures moyennant le versement de sommes d’argent dans ses résidences de Manhattan et de Palm Beach, en Floride.
Le milliardaire américain Jeffrey Epstein, accusé d’abus sexuels sur mineures, et risquant la prison à perpétuité, s’est suicidé dans la prison de Manhattan où il attendait son procès, a annoncé samedi 10 août l’administration pénitentiaire fédérale américaine.
Selon le New York Times, le financier déchu âgé de 66 ans s’est pendu dans sa cellule et son corps sans vie a été retrouvé samedi matin tôt. Il a été retrouvé « inanimé dans sa cellule » vers 6 h 30 locales (12 h 30, heure française), a précisé l’administration pénitentiaire. « Le personnel a immédiatement tenté de le ranimer », avant de le faire transporter à l’hôpital où il a été déclaré mort, a-t-elle ajouté. Le FBI a ouvert une enquête, tout comme le ministère de la justice américain.
Jeffrey Epstein avait déjà été retrouvé fin juillet allongé par terre dans sa cellule du Metropolitan Correctional Center, une prison de Manhattan, avec des marques sur le cou, après ce qui avait été présenté comme une possible tentative de suicide. Les blessures étaient toutefois à ce moment-là sans gravité et il s’était présenté dans les jours suivants à une audience judiciaire, mais avait été placé sous surveillance spéciale, selon plusieurs médias. L’administration pénitentiaire n’a pas immédiatement confirmé samedi cette information, affirmant simplement qu’il était incarcéré dans une « unité spéciale ».
Dès l’annonce de sa mort, plusieurs personnalités ont exprimé leur stupéfaction devant un tel dénouement, la prison fédérale de Manhattan étant réputée l’une des plus sûres du pays. Le ministre de la justice américain, William Barr, s’est déclaré samedi « effaré »par la mort de M. Epstein, qui soulève selon lui « de graves questions auxquelles il faut répondre ».
Des dizaines de mineurs
Arrêté le 6 juillet aux Etats-Unis de retour d’un voyage en France, il avait comparu deux jours après devant un tribunal fédéral à Manhattan. Le bureau du procureur à Manhattan avait rendu public, lors de cette audience, un document de quatorze pages, dévoilant de nouvelles accusations de trafic sexuel et de complot de trafic sexuel à son encontre, entre 2002 et 2005, affirmant qu’il a abusé de dizaines de mineures, certaines âgées de 14 ans, moyennant le versement de sommes d’argent, en cash, dans ses résidences de Manhattan et de Palm Beach, en Floride. Il aurait, en outre, payé certaines de ses victimes pour qu’elles recrutent, pour lui, d’autres proies dans leur entourage. Il était passible de 45 années d’emprisonnement. Le 18 juillet, il avait été débouté, d’une demande de remise en liberté sous caution. Son procès devait s’ouvrir au mieux en juin 2020.
En 2008, l’homme d’affaires était déjà accusé des mêmes faits et risquait la prison à perpétuité. Il avait alors obtenu un accord de négociation de peine controversé grâce à Alexander Acosta, qui était procureur du district sud de Floride. Cet accord avait à l’époque évité un procès à Jeffrey Epstein, tenu à l’écart de ses victimes et prévu des conditions particulièrement favorables d’aménagement de sa peine de détention. Devenu ministre du travail de Donald Trump en 2017, Alexander Acosta a démissionné le 12 juillet.
Des centaines de pages de documents judiciaires rendus publics vendredi étaient venues confirmer qu’il avait longtemps été un membre éminent de la jet-set, proche de nombreuses personnalités, y compris les présidents Bill Clinton et Donald Trump et le prince Andrew, fils de la reine Elizabeth II, qui avaient voyagé notamment dans ses jets privés. « Je connais Jeff depuis 15 ans. Un type génial », disait Donald Trump dans un entretien au New York Magazineen 2002. « C’est un plaisir de passer du temps avec lui. On dit même qu’il aime les jolies femmes autant que moi, et beaucoup sont plutôt jeunes. » Tous avaient affirmé après son inculpation ne pas avoir été au courant de ses délits présumés et n’avoir plus aucune relation avec lui depuis longtemps.
Pour les victimes présumées, sa mort vient les priver d’un procès qu’elles attendaient désormais avec impatience. Brad Edwards, l’avocat de l’une d’elles, Virginia Giuffre, qui accusait Epstein de l’avoir forcée à avoir des rapports avec des hommes de pouvoir, a ainsi déploré samedi qu’il ait « commis cet acte égoïste de se donner la mort alors que son monde d’abus, d’exploitation et de corruption apparaissait au grand jour ». « Ce n’est pas la fin que quiconque attendait », a ajouté l’avocat, cité par la chaîne Fox News.
Source: Le Monde.fr