La projection du film de notre compatriote Daouda Coulibaly a suscité une grande affluence
La troisième journée de la 25è édition du Festival panafricain du cinéma et de la télévision de Ouaga (FESPACO) était celle du Mali.
En effet, elle a été marquée par la projection de deux films maliens : le long métrage « Wùlu », ou le chien de Daouda Coulibaly et « Les héritiers de la colline », un documentaire de Ousmane Samassékou. Deux productions sur lesquelles nous fondons beaucoup d’espoir en matière de récompense.
Comme à l’accoutumée, le public des festivaliers et des Ouagalais sont sortis très nombreux en cette soirée du lundi 27 février. Pour avoir accès à la salle du Ciné-Burkina, il ne fallait pas venir en retard ou être capable de donner des coudes pour se frayer un chemin. Au Fespaco, les films maliens ont une réputation qui remonte aux différents prix remportés par nos cinéastes. Le Mali a déjà remporté trois grands prix de l’Etalon du Yennenga et de nombreux trophées remportés aussi bien dans le palmarès officiel qu’aux niveaux des prix spéciaux. Plusieurs témoins dont des organisateurs et les cinéphiles assidus de cette salle située en centre de la ville affirment que depuis le début des projections de la présente édition aucun film n’a suscité d’autant d’affluence.
Quant au film lui-même, il raconte l’histoire d’un jeune garçon issu d’une famille très modeste et qui se débat tous les jours à la recherche du pain quotidien. Il commence par être un apprenti chauffeur dans les véhicules de transport en commun de Bamako, communément appelés « Sotrama ». Il fait le constat qu’il fournit beaucoup d’efforts et obtient peu de gain pour subvenir aux besoins de sa famille. Il finit par obtenir un emploi dans les transports internationaux. Il y découvre le transport de la drogue entre le Sénégal et Mali, puis sur l’axe Bamako-Conakry en Guinée. Ce trafic qui est florissant et qui lui permet de changer complètement de vie, devient risqué et son patron décide d’arrêter. Il rejoint un ancien client qui lui propose de transporter la drogue par avion jusqu’au nord du Mali. Un ancien général de l’armée malienne lui prête de l’argent. L’avion atterrit effectivement dans les environs de Tombouctou. La marchandise est remise au chef des djihadistes qui se charge de l’emmener dans le sud-algérien. Tous ces évènements transforment le jeune homme, qui cherchait sa pitance au quotidien, en un véritable caïd.
Daouda Coulibaly montre comment la drogue a gangréné notre pays. Pour lui, cette histoire d’« Air cocaïne » est l’une cause de la grave crise politique et sécuritaire que notre a connue entre 2012 et 2013. Si le thème est traité pour la première sur le grand écran, c’est de manière très courageuse. C’est un film très moderne et d’une brûlante actualité comme le soulignent des témoins à la sortie de la salle. Ce premier long métrage marque sans doute un tournant dans la cinématographie malienne. En effet, le rythme de progression est assez dynamique et rapide. Le spectateur prend du plaisir à le regarder et ne s’ennuie pas du tout car il n’y a presque pas de temps mort.
La salle de conférence du Conseil des chargeurs du Burkina Faso a accueilli dans l’après-midi le documentaire de 83 minutes de Ousmane Samassékou. Ce jeune sortant du Conservatoire des arts et métiers multimédia Balla Fasséké Kouyaté traite des élections au sein de l’Association des élèves et étudiants du Mali (AEEM). A Bamako, deux collines se font face, séparées par le fleuve Niger. La colline du pouvoir et celle du savoir où siège l’Université du Mali qui sombre jour après jour dans la déliquescence. L’AEEM, le syndicat unique des élèves et étudiants maliens, y fait régner le racket, la corruption et la fraude électorale. Les leaders syndicaux font l’apprentissage de technique de gouvernance qu’ils appliqueront demain, quand devenus leaders politiques, ils s’installeront sur l’autre colline, celle du pouvoir.
C’est la première fois qu’une camera puisse entrer dans les couloirs des dortoirs de l’Université et bien sûr celui des élections. Des images inédites qui retracent à la fois les conditions de vie dans les internats. Des logements insalubres, des cours donnés par intermittence du fait de l’absence prolongée des professeurs et des grèves et autres assemblées générales intempestives. Et surtout la violence qui s’installe sur les sites de l’université. Le réalisateur affirme qu’il a tourné pendant quatre ans durant afin de pouvoir comprendre réellement comment fonctionne l’AEEM. L’idée de faire ce film est partie de la mort accidentelle de son amie atteinte par une balle perdue en 2012. Il explique que cette mort l’a tellement marqué qu’il cherchait à comprendre comment cela pouvait arriver dans un dortoir.
Ousmane Samassékou a déjà réalisé en 2012 un court métrage « Made in USA ». Il a d’ailleurs obtenu en 2015 le prix du meilleur scénario au Festival Clap Ivoire en 2015, avec le film « Une confession ». Il envisage de montrer ce film aux étudiants maliens dans toutes les facultés.
En fin d’après-midi, un autre long métrage malien « Kousaw » de Ibrahima Touré était projeté à l’Institut français George Méliès de Ouagadougou. Ce film, qui est présenté dans le cadre du panorama, évoque l’insécurité à Tombouctou, « la Cité des 333 Saints ». Le film met en scène Barou, un chef de service qui ne peut se résoudre à la perte de son fils tué par arme à feu comme cela devient assez courant au Nord de notre pays. Sur le plan social, il a d’énormes problèmes avec son épouse qui ne peut pas avoir un autre enfant. Il veut se contenter de sa unique fille qui lui reste et cela n’est pas du goût de sa maman qui vient faire le pied de grue à chez lui. Cette dernière est également tuée par balle.
Envoyé spécial
Y. DOUMBIA
Source: essor