Universités, écoles et commerces fermés, vols internationaux suspendus et rues désertes: Sanaa était paralysée samedi en raison de la poursuite de heurts meurtriers entre rebelles chiites et combattants sunnites malgré les efforts de l’ONU pour une trêve.
Le chef de l’Etat Abd Rabbo Mansour Hadi, cité par les médias locaux, a qualifié de “tentative de coup d’Etat” l’offensive des rebelles d’Ansaruallah à Sanaa où les combats avec le puissant parti sunnite al-Islah ont fait des dizaines de morts depuis jeudi dans les deux camps.
M. Hadi a, lors d’une rencontre avec des ambassadeurs arabes, vu dans les tirs contre le siège de la télévision publique, qui a interrompu vendredi brièvement ses émissions, et d’autres installations publiques, l’illustration de cette démarche putschiste.
Depuis plus d’un mois, les rebelles qui contrôlent la région de Saada (nord) campent avec leurs partisans dans et autour de la capitale pour réclamer l’éviction du gouvernement accusé de corruption, un droit de regard sur la nomination des ministres et un accès à la mer.
Les combats se sont intensifiés jeudi dans la secteur de l’aéroport, au nord de Sanaa, entraînant la suspension des vols des compagnies étrangères depuis vendredi.
Samedi, de nouveaux tirs ont visé le siège de la télévision, faisant des blessés parmi les employés, a indiqué la chaîne publique.
En outre trois civils ont été tués dans un bombardement du nord-ouest de Sanaa, non loin de l’Université de l’Iman que les rebelles tentent de prendre aux combattants d’Al-Islah, selon des sources hospitalières. L’hôpital Azal, dans le même secteur, a été touché par un obus qui a tué un homme.
En trois jours, 22 civils ont été tués dans ce secteur, selon des sources hospitalières.
Les habitants des quartiers proches des zones de combat étaient terrés chez eux tandis que, dans le reste de la ville, il n’y avait quasiment pas d’activité. De nombreux commerces étaient fermés et la circulation était quasi-nulle.
– Chute d’obus sur un campus –
A la mi-journée, l’ancien QG de la 1ère division blindée, non loin de l’Université d’Al-Imam, a été touché par des obus tirés par les rebelles, provoquant des colonnes de fumée. Deux militaires ont été tués.
L’Université de Sanaa, dans le même secteur, a demandé à ses étudiants de prendre des vacances forcées jusqu’à la mi-octobre après la chute d’obus sur le campus, alors que les autorités ont suspendu les cours dans les écoles et lycées jusqu’à nouvel ordre.
L’un des grands marchés de la capitale, le Souk Ali Mohsen, situé dans la zone des combats, est fermé depuis trois jours, ce qui commence à affecter l’approvisionnement en fruits et légumes, selon des habitants.
Soupçonnés de vouloir élargir leur zone d’influence dans le futur État fédéral qui doit compter six provinces, les rebelles -dits Houthis- apparaissent plus que jamais décidés à en découdre avec leur rival d’Al-Islah qu’ils accusent d’avoir tenté de s’implanter dans leur fief, à Saada.
Ils cherchent aussi à capitaliser sur leur succès militaire pour obtenir satisfaction complète à leurs demandes auprès du pouvoir qui semble incapable, du moins pour le moment, à contenir leur offensive.
Les rebelles avaient rejeté en août une proposition du président Hadi portant sur la nomination d’un nouveau Premier ministre et la réduction d’une augmentation controversée des prix du carburant, deux de leurs principales revendications.
– Trêve introuvable –
L’émissaire de l’ONU, Jamal Benomar, qui négocie un cessez-le-feu, a regagné vendredi soir Sanaa en provenance de Saada sans être parvenu à obtenir un accord de trêve.
“J’ai tenté de réduire l’écart entre les deux parties et on est tombé d’accord sur un nombre de points pouvant servir de base à un accord” de cessez-le-feu, a dit M. Benomar après trois jours de discussions avec le chef de la rébellion, Abdel Malek al-Houthi.
Aucune indication n’a été donnée sur d’éventuelles nouvelles négociations.
Le Yémen est englué dans la crise depuis le départ en février 2012 de l’ancien président Ali Abdallah Saleh, après onze mois de contestations de rue. Pays très pauvre de la Péninsule arabique, il fait aussi face à l’agitation de séparatistes dans le Sud et à des violences endémiques provoquées par Al-Qaïda.
Les houthis sont issus du zaïdisme, une branche du chiisme majoritaire dans le nord du Yémen, alors qu’à l’échelle nationale, les sunnites sont prédominants.
© 2014 AFP