La satisfaction du protocole d’accord le gouvernement, le patronat et l’UNTM, le prolongement de l’âge de départ à la retraite, la hausse de la grille indiciaire, la lutte contre l’enrichissement illicite à travers l’institutionnalisation de l’Office central de lutte contre l’enrichissement illicite (Oclei), le secrétaire général de l’Union nationale des travailleurs du Mali (UNTM) nous en parle à cœur ouvert. Il sort ses griffes contre l’Oclei, en faisant comprendre que la loi qui la crée ne respecte pas les principes de lutte contre la corruption dans le fond et la forme. Il se dit par ailleurs satisfait à 100 % de leur protocole et donne des explications sur la revendication relative à l’âge de départ à la retraite, qui selon lui, a été mal comprise par certains.
L’Office central de lutte contre l’enrichissement illicite (Oclei) ne figure pas dans le protocole du 29 janvier 2019. Elle reste néanmoins d’actualité si l’on sait que l’UNTM s’était levée un moment pour dénoncer ce qu’elle a appelé : « ses méthodes inquisitoires, discriminatoires, etc. ». « La façon dont cette structure a commencé à fonctionner, nous avons eu l’impression qu’elle n’est pas un organe administratif mais plutôt judiciaire», a précisé Yacouba Katilé.
La centrale syndicale veut ainsi critiquer le fait que l’Oclei touche plutôt les fonctionnaires que des hauts responsables comme les ministres, les présidents d’institutions de la République ou les députés. Elle avait même menacé en son temps, d’observer une grève si l’organe dans cet état commençait son travail. Le gouvernement avait été obligé de décider de la suspension de ses activités. Ce qui l’a même freiné l’a dans son action et qui a fait qu’il n’a pas totalement pris son envol à ses jours.
Si Yacouba Katilé n’est plus prolixe sur la question, il n’en démord pas pour autant. Il a fait savoir que le Syndicat des administrations d’Etat (Syntade) dont il est le secrétaire général, a signé une convention avec le gouvernement sur le sujet. Selon lui, une commission a été mise en place pour la relecture de la loi portant création de l’Oclei. « Ce qui a été arrêté lors de la dernière rencontre, est que le gouvernement et le syndicat, chacun de son côté, va fournir un expert, pris en charge par l’Etat. Ces derniers ont pour mission, de produire un document conformément à l’idéal que nous avons par rapport à cette loi, gérer les griefs et autres », a indiqué M. Katilé. Il accuse cependant le gouvernement de n’avoir pas à présent fourni ses experts. L’UNTM de son côté n’est pas resté de marbre et a saisi le président de ladite commission qui s’est engagé à commettre un expert, qui doit se mettre à la disposition des parties. Il a fait constater non sans amertume, qu’il y a des sorties sur la question qui leur montrent que le gouvernement est en train de violer des principes alors qu’ils doivent aller très vite.
Pour M. Katilé, nulle part dans le monde, on n’agit de cette façon, l’enrichissement illicite étant l’effet de la corruption. « Nous avons des structures existantes qui luttent contre la corruption. Il y a lieu de les renforcer ou gérer autrement ces aspects, au lieu de s’attaquer aux effets », a-t-il plaidé. Toujours selon, l’UNTM a demandé que l’Oclei soit conforme aux dispositions de lutte contre la corruption édictées par les instances internationales. « En tant que fonctionnaires, nous ne devront pas être les seuls qui doivent subir cette situation. Il y a suffisamment d’arsenal juridique pour sanctionner ou punir les fonctionnaires. A commencer par les différents statuts qui les régissent, en plus du code du travail où il est prévu des sanctions jusqu’à la radiation. C’est le pire pour un fonctionnaire. Donc notre pays a assez d’instruments juridiques que de passer par des organes beaucoup plus politiques. Aussi, nous avons des services qui ont les mêmes buts », clame-t-il et d’ajouter que personne ne donne tort à l’UNTM au niveau international, dans sa démarche.
« Justice sociale, uniformisation des acquis »
Le patron de la Bourse du travail met le tollé soulevé au sujet de l’augmentation de l’âge de départ à la retraite au compte de l’incompréhension d’une minorité en ce sens que la majorité des fonctionnaires y ont adhéré après une campagne d’information que lui et son bureau ont mené de Bamako à l’intérieur du pays en plus des débats radiotélévisés. « L’augmentation de l’âge à la retraite procède d’une justice sociale, d’une équité et de l’uniformisation des acquis », a-t-il dit. Selon lui, l’espérance de vie qui est actuellement de 59 ans dans notre pays, est une des justifications de leur démarche. En plus de cela, à cause des problèmes de recrutement à la fonction publique, certains ne sont recrutés qu’à 40 ans et peuvent de ce fait, passer 12 ans sans atteindre la grille indiciaire plafond.
Yacouba Katilé renvoie ceux-là qui affirment que l’augmentation de l’âge de départ à la retraite est anti-emploi jeunes, au point 11 de leur protocole d’accord. A l’en croire, dans ce point portant sur le recrutement massif des jeunes dans la fonction publique, l’UNTM avait demandé jusqu’à 15 000 jeunes par an. Mais il a été retenu plus de la moitié, soit 8 600 jeunes diplômés pour l’année 2019 avec une incidence financière de 15,481 milliards de F CFA. Il dément en même temps les informations relatives à des quiproquos existant entre eux et le Conseil national de la jeunesse du Mali (CNJ). « Il n’y a aucun problème entre le CNJ et nous et d’ailleurs, vous allez voir dans les jours à venir que nous irons dans des actions communes », s’est-il défendu.
Dans le nouveau protocole, l’Etat s’est engagé à accorder une augmentation de la grille indiciaire. Celle-ci est programmée comme suit : indice plafond 1100 pour la catégorie A au 1er janvier 2019, indice plafond 1200 pour la catégorie A en janvier 2021. Il est précisé que « la grille indiciaire regroupant les différents niveaux de toutes les catégorie sera faite sur la base de cette augmentation ».
« 20 % d’augmentation de la grille indiciaire »
Katilé se réjoui de cette augmentation qu’il chiffre à 20 % de la grille indiciaire, ce qui détermine le salaire net d’un fonctionnaire. « Ce qui est beaucoup », se justifie-t-il. Une commission de suivi et d’évaluation est mise en place pour l’application du protocole. Pour ceux qui doutent de l’application du présent protocole, le secrétaire général de l’UNTM estime que tous leurs protocoles sont exécutés entre 80 à 90 %.
Sans tourner autour du pot, Yacouba Katilé reconnait que l’UNTM est vraiment satisfaite du protocole d’accord du 29 janvier 2019, paraphé avec le gouvernement et le patronat malien. Il faut rappeler que la signature de ce document fait suite au préavis de grève du 11 au 15 février 2019 précédé d’un autre de 72 heures. Lesquelles avaient sérieusement paralysé l’administration d’Etat et par ricochet le secteur économique national. « Rarement on trouve un accord, où on est d’accord avec les points de discussions à 100 % », a affirmé M. Katilé.
Le 12e point sur les 12 doléances a pourtant fait l’objet d’un accord partiel. Il concerne la gestion des compressés des sociétés et entreprises d’Etat dont certains personnels soumis au programme de départ volontaire à la retraire, sous l’injonction de la Banque mondiale et du FMI, ne sont pas entrés dans la totalité de leurs droits. Ces sociétés sont : la Smecma, la Somiex, la Sonarem, la Sonatam, Huicoma, Hôtel Azalaï, Itema, etc. Aux dires du secrétaire général de l’UNTM, il s’agit là d’un protocole d’accord signé en 2014. La voie de son extinction définitive est ainsi balisée. « Les choses vont aller rapidement. Le Premier ministre a nommé deux anciens responsables pour le suivi régulier de ce dossier », a-t-il précisé avant d’ajouter qu’ils ont salué cette action à sa juste valeur, en ce sens qu’il y a la bonne foi, la bonne volonté pour gérer définitivement cette action.
Le point 3 du présent protocole d’accord portant sur l’augmentation à trois ans pour le secteur public et deux ans pour le privé, de l’âge de départ à la retraite, a été diversement apprécié, sinon critiqué par la frange jeune et une partie de l’opinion publique. Des jeunes se sont sentis mis à l’écart par « les vieux », qui ne veulent pas leur faire de la place.
La critique est même venue d’autres personnes qui ne voyaient pas le bien fondé de cette mesure. Il faut préciser que l’accord est applicable à compter du 31 décembre 2019. Cependant, les travailleurs ont le libre choix de faire valoir leurs droits à la retraite à partir des âges déjà en vigueur (A : 62 ans, B2 : 59 ans, B1 : 58 ans, C : 55 ans).
Abdrahamane Dicko
Mali Tribune