L’association des élèves et étudiants du Mali (AEEM) a organisé vendredi dernier son assemblée générale d’informations nationales à Bamako pour informer les élèves et les étudiants du renouvellement du bureau, des résolutions, amendements écrits dans les textes et décisions prises par le comité directeur. À cette occasion, willy récemment élu secrétaire général de l’AEEM, à répondu à nos questions.
Comment fonctionne l’AEEM ?
En tant que syndicat qui a pour but la défense des intérêts matériels et moraux de l’ensemble des élèves et étudiants du Mali ainsi que l’amélioration de leurs conditions d’études, nous avons beaucoup de membres. Nous fonctionnons avec des comités de groupe, il y a le bureau national et des bureaux locaux dans chaque établissement de chaque ville, cela veut dire que chaque établissement privé comme public à son bureau. Toute personne ayant le statut élève ou étudiant est libre de rentrer dans l’AEEM sans distinction aucune. Tous les membres de l’AEEM cotisent par mois, nous subsistons aussi avec les dons, la vente des cartes de membres, les subventions qui sont les bienvenus et certaines activités que nous organisons.
Avez-vous des bureaux locaux au Nord-Mali ?
Aujourd’hui la seule ville au Mali où l’AEEM n’a pas pu renouveler son bureau est Kidal. Le renouvellement est annuel. Nous avons nos comités à Tombouctou, Gao et toutes les autres régions à part Kidal.
Beaucoup disent que l’AEEM travaille pour elle-même et non pour défendre les intérêts des élèves et étudiants du Mali, que répondez-vous à vos détracteurs ?
Il faut dire la vérité, je ne nie pas que le travail de l’association n’a pas toujours été à la hauteur, ce qui a fait que le mécontentement des personnes ont conduit à ces rumeurs. Je donne raison aux personnes qui ne sont pas satisfaites du travail de l’AEEM mais j’ajoute aussi que tout n’est pas négatif. Il y a des travaux concrets que nous menons, même si nous ne communiquons pas assez sur cela, c’est d’ailleurs l’un de nos défauts. Je prends l’exemple de l’infirmerie de la Faculté des Sciences et Technique, c’est une revendication faites par l’AEEM il y a de cela deux ans, cette année cette infirmerie est opérationnelle. C’était la résidence des étudiants membres de l’AEEM et nous l’avons donné afin qu’ils puissent en faire une infirmerie parce qu’il y avait un besoin. Tout n’est pas négatif, nous faisons des choses.
Les méthodes de l’AEEM sont décriées, ceux qui osent émettre un point de vue différent lors des assemblées sont menacés, des étudiants sont tabassés, il y a des affrontements armés. Pour maintenir son autorité, l’AEEM a souvent recours à la violence, pourquoi ?
Je reconnais qu’à un moment donné, l’AEEM a souvent eu recours à la violence et la force. En réalité, mon analyse est qu’il y a eu certains responsables, dans cette structure, qui n’avaient pas la capacité de s’imposer ou d’imposer leurs idéologies sans passer par la violence. Un leader qui pense que c’est la violence qui peut le faire régner, cela peut jouer sur la structure de l’association et ça va généraliser la violence car les autres vont suivre cette même idéologie. C’est des problèmes auxquels nous avons été confrontés dans l’histoire et notre travail futur sera de montrer à ces jeunes que nous avons largement dépassés cette période. Je parle ici de la violence en interne, entre membres de l’AEEM, mais il y a des actions de l’AEEM qui utilisent souvent la force pour faire entendre nos revendications. Par exemple dans nos grèves et nos marches, les étudiants sont souvent incités à être violents. Car, par exemple, nous pouvons attendre jusqu’à quatre à six mois pour obtenir les trousseaux qui sont censés être donnés aux étudiants en début d’année, c’est inadmissible ! Si nos démarches sont pacifiques mais que ça ne donne rien, cela nous forcera à être violent pour avoir ce que nous voulons. Si toutes nos revendications pouvaient être satisfaites pacifiquement, ce serait une fierté pour le syndicat et ça renforcerait notre bilan.
Votre élection à la tête de l’AEEM s’est aussi déroulé dans un climat violent, qu’est-ce que votre mandat va changer pour rompre avec cette réputation de l’opinion publique, qui vous assimile plus à un gang ou une mafia plutôt qu’à une association d’étudiants ?
Merci pour cette question, je pense que les violences qui ont eu lieu au cours de cette élection, sont les séquelles de la lutte que nous menons depuis longtemps. Vous n’êtes pas trop dans le milieu pour comprendre quel camp défend quel camp, je m’appelle Abdoul Salam Togola, connu sous le nom Willy pour les intimes, qui parle du clan de Willy sur la colline de Badalabougou parle d’un clan qui est contre la délinquance à l’école, contre les gens qui font rentrer les bandits à l’école. Nous avons passé une année à lutter contre l’autre camp et je pense que la violence autour de cette élection en faisait partie. Nous avons toujours tenté d’écarter ceux qui permettent aux bandits de s’ingérer dans les affaires des étudiants, c’était notre défi et ils savent que même après cette élection, un bandit n’aura pas sa place à l’AEEM. Nous sommes engagés pour ça et j’ai confiance en ce bureau qui a été élu et je suis sure qu’avant la fin de l’année, les gens reconnaîtront qu’il y a une AEEM revendicatrice, mature et responsable.
Le système d’enseignement supérieur au Mali est en échec, on parle de corruption, de clientélisme, quelles sont vos solutions durant votre mandat pour y remédier ?
La lutte contre la corruption en espace scolaire et universitaire est un travail qu’on ne peut résoudre seul. Je pense qu’il faut une synergie d’actions entre tous les acteurs de l’université. je ne nie pas qu’aujourd’hui on parle des notes qui sont vendues et d’autres choses. C’est une réalité, mais je pense que lorsqu’il y aura une synergie d’actions entre les acteurs, notamment les étudiants et les professeurs qui donnent ces notes, pour que chacun comprennent qu’en vendant les notes, l’élève n’obtiendra pas le niveau requis et la qualité du travail du professeur sera mise en cause. Il faut que chacun prenne conscience que ces corruptions mettent les jeunes en retard, et qui si l’on n’est pas capable de former les jeunes il y aura des répercussions sur le marché de l’emploi et ce sera un échec pour l’étudiant, pour le professeur et pour l’administration scolaire.
N’est-ce pas aussi un échec politique ?
J’ai l’habitude de dire dans mes interventions que le problème de l’éducation n’est pas une priorité nationale. Je ne connais pas un pays où l’éducation ne fait pas partie des priorités du gouvernement. Nous étudiants, pensons qu’elle doit être inscrite dans les priorités de l’État.
Même les parents d’élèves doivent aussi mettre la formation de leurs enfants dans leurs priorités, ils doivent s’y investir et s’il y a une défaillance au niveau des départements de l’Éducation nationale c’est aux parents de les interpeller, et j’interpelle les parents, les autorités tout le monde, car on ne peut pas parler d’avenir pour un pays si la relève n’est pas bien assurée.
Quels ont vos relations avec les politiques, on a dit que l’AEEM était instrumentalisé par les politiques, d’ailleurs de nombreux anciens de l’AEEM sont devenus des politiques, à l’instar de Moussa Timbiné ?
Les hommes politiques ont peur de l’AEEM parce que c’est une structure entièrement composée de jeunes, si l’AEEM t’apprécie peut-être que cela peut t’arranger. Si tu acceptes une collaboration avec l’AEEM en tant qu’homme politique, si tu fais une petite erreur, l’AEEM peut gâter ton image. Les hommes politiques même disent que nous sommes forts et ils ont peur de nous approcher. Le dénommé Moussa Timbine était secrétaire général de l’AEEM ici à la FAST, son nom est même écrit sur l’acropole à l’entrée. Dans l’AEEM, nous avons une commission scientifique des anciens secrétaires généraux que nous avons demandée pour faciliter les travaux lors des congrès et l’organisation des séminaires de formation. En tant qu’anciens, vu leur expérience dans ce mouvement, nous leur donnons souvent un mandat pour qu’ils essaient de trouver un climat d’apaisement ou de consensus entre les potentiels candidats du congrés. À ce niveau, aujour’hui le nom Moussa Timbine ressort beaucoup et je pense qu’il y a une ruse politique derrière cela. Il est clair qu’il a des adversaires politiques qui utilisent cela contre lui, cela fait 10 ans qu’il est lié à l’AEEM, à chaque congrés il est là, ils n’ont jamais parlé de cela avant. Nous n’avons rien à avoir avec ces calculs politiques, Moussa était dans l’AEEM avant nous, c’est un grand frère et il y a beaucoup de politiciens dans cette commission à savoir Amadou Koita qui est le président du parti Yélén Koura et qui opère à l’opposition, que je sache les gens n’ont pas parlé de lui.
Quelles sont vos priorités d’action pour l’année 2016 ?
L’urgence c’est le problème de régularisation des trousseaux, c’est un problème sérieux. Nous avons remarqué que chaque année c’est les mêmes histoires qui ne sont pas résolues. Il faut aller à la source du problème, l’année dernière nous avons dû, après la rentrée, rester 5 mois sans avoir le trousseau et c’est ainsi chaque année et nous voulons que ce problème soit résolu définitivement cette année. C’est pourquoi nous avons pensé à la création d’un cadre de concertation et d’échanges entre l’AEEM, le Centre national des œuvres universitaires (CENOU), ceux qui traitent de la bourse, et les structures universitaires qui traitent des bases de données. Le Cenou a besoin des fiches pour pouvoir traiter. Nous allons diagnostiquer les problèmes et chercher des solutions. Nous avons aussi demandé la construction d’une bibliothèque dans les universités même s’il y en a dans toutes les facultés, ce ne sont pas des bibliothèques dignes de ce nom vue l’évolution de l’enseignement et le système licence master et doctorat (LMD) qui est en cours d’insertion dans les facultés, demande beaucoup de travail de l’apprenant et si cet apprenant n’est pas dans les conditions favorables pour le faire, est ce qu’il pourra jouer son rôle ? Nous voulons une bibliothèque dans les facultés, adaptée à l’évolution du monde, pour que nous puissions pleinement jouer notre rôle dans notre formation. Nous voulons aussi préparer dès la 10e année les lycéens au système LMD et à ses débouchés.