La sempiternelle question du visa chinois demeure toujours une grosse épine dans les pieds des commerçants maliens surtout ceux évoluant dans le secteur du commerce en détail.
Depuis l’éclatement de la crise politico-sécuritaire dans notre pays en 2012, notre pays est inscrit sur la carte rouge de plusieurs autres Etats comme étant l’un des moins sûrs et dangereux dans le monde sur le plan sécuritaire. Cette mauvaise épithète que nous traînons telle une guigne, frappe malheureusement nos ressortissants surtout les commerçants. Ces derniers qui ne font autre chose que mener leurs affaires avec leurs fournisseurs et autres partenaires chinois en injectant de la devise dans l’économie de l’Empire du Milieu, connaissent le plus de difficultés dans leurs mouvements.
Pourtant, il y a 5 à 10 ans, partir en Chine ne nécessitait aucune autre formalité particulière que celles relatives aux démarches courantes de visas que le demandeur obtenait le même jour et cela quelle que soit la durée et le motif. A cause de notre situation sécuritaire, la Chine amie et partenaire traditionnelle du Mali, à travers ses autorité, a décidé que les conditions de départs sur son territoire ne doivent plus être les mêmes qu’auparavant pour nos ressortissants.
Le circuit de formalité de visa est fermé et même relève du parcours du combattant, aux dires d’un commerçant de la place. Certains d’entre eux étaient menacés de faillite par la restriction qui les frappait. Un moment donné, le Syndicat national des commerçants détaillants du Mali (Synacodem) en avait tellement marre qu’il en avait fait son cheval de bataille. Le Synacodem après plusieurs rencontres avec nos autorités et les responsables diplomatiques de l’ambassade de Chine au Mali, avaient brandi la menace de grèves, sit-in, de chasse aux ressortissants chinois sur les marchés bamakois et même de boycott de la destination Chine au profit de l’Inde, pour être entendus.
Selon nos investigations, il y a une petite amélioration de nos jours même si les commerçants restent toujours sur leur faim avec la dose de restriction qui entoure toujours l’affaire. Depuis quelques mois, le visa chinois pour le monde des affaires est l’affaire de faîtière. Une commission visa siège à la Chambre de commerce et d’industrie du Mali (CCIM). C’est là où tous les dépôts pour visa chinois se passent.
Cette commission “ad hoc” a la charge de les acheminer au consulat chinois deux fois par semaine. Il s’agit de 25 demandes de visas les lundis et autant les jeudis, soit un total de 50 demandes par semaine. Dans ce lot, le président de la CCIM a lui seul un quota de 8, qu’il peut attribuer à qui de droit, selon les besoins et pour son pouvoir discrétionnaire. Néanmoins, tous les demandeurs n’ont pas la chance d’avoir le précieux sésame non plus.
3 à 6 mois d’attente
Selon un demandeur, “il y a des commerçants qui peuvent passer 3 à 6 mois à attendre d’être parmi ceux qui doivent déposer leurs documents de voyage”.
Ce qui complique davantage la situation, c’est qu’à cause de la restriction, même les ressortissants de notre pays, détenteurs de passeports maliens, installés dans d’autres pays pour leurs affaires, sont obligés de passer par le consulat chinois de Bamako. “Comment quelqu’un qui réside à l’extérieur (RDC, Gabon, Congo, Cameroun, Côte d’Ivoire, Angola, etc.) peut-il laisser son commerce pendant des mois pour attendre un visa à Bamako ? “, s’interroge notre interlocuteur aussi choqué qu’éberlué. Il ajoute que “la possibilité devait être donnée à tout un chacun d’accomplir soi-même ses démarches et formalités comme cela se passe dans les consulats d’autres pays et que le demandeur soit satisfait dès lors que ses documents sont intacts”.
Le seul bémol dans tout ça, est que des visas de longue durée (6 mois à 1 an) sont aujourd’hui délivrés, ce qui n’était pas le cas il y a de cela quelques mois. Une autre ouverture est faite en direction de quelques privilégiés. Ces derniers ne sont pas obligés de ronger les freins ou de trop attendre. Ils sont autorisés à passer directement au consulat et non par la CCIM, s’ils disposent d’une invitation dite “officielle“ de leurs fournisseurs ou partenaires chinois. Selon nos sources, cette invitation est délivrée par les plus hautes autorités de Pékin obéissant à des procédures complexes. Ce cas ne concerne que 1/100 demandeurs.
La Chine est la principale destination des commerçants maliens. Les marchés maliens sont pour la plupart inondés de produits chinois comme l’habillement, l’électronique et l’électroménager, des pièces de rechanges pour véhicule et équipements industriels, des biens de consommation et autres produits alimentaires, des matériels de pêche, des matériaux de construction et de BTP, etc.
Abdrahamane Dicko
Mali Tribune