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Verbatim des toasts prononcés à l’occasion du diner d’état offert par le président hollande au président IBK et à sa délégation

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TOAST DE HOLLANDE

 

Monsieur le Président de la République du Mali du Mali,

Cher Ibrahim,

Chère Madame Keïta,

Monsieur le Premier ministre,

Mesdames, messieurs les ministres,

Mesdames, Messieurs les parlementaires, élus,

Mesdames, Messieurs les Chefs d’entreprises,

Mesdames, Messieurs les artistes,

Plus généralement, les amis de la France et du Mali, et ça fait déjà beaucoup de monde,

 

Je vous accueille, cher président, avec grand plaisir à l’occasion de votre visite d’État qui, à bien des égards, est une visite exceptionnelle parce que vous êtes à la tête d’un pays ami de la France, parce que vous êtes vous même un ami.

Au cours des années récentes, nos deux pays ont démontré qu’ils étaient liés par une fraternité d’armes. Je me souviens encore de ce 11 janvier 2013, lorsque le président par intérim, Dioncounda TRAORE, m’a demandé d’intervenir. J’ai alors pris, au nom de la France, mes responsabilités ; et côte à côte, nos armées ont repoussé les terroristes.

J’ai, en cet instant, une pensée pour Damien Boiteux, c’était le premier soldat à être tombé pour la conquête de l’intégrité du Mali. Au-delà de lui, je pense à tous ces militaires qui ont donné leur vie pour le Mali et pour la France.

Je sais aussi que de nombreux soldats français ont été blessés ; trois d’entre eux encore récemment meurtris, dans leur chair, ont sauté sur une mine et ont été très gravement blessés.

 

Aujourd’hui, le travail de sécurité se poursuit grâce à l’opération Barkhane, mais aussi grâce à l’armée malienne que nous formons avec nos partenaires européens. Mais, le soutien que la France apporte au Mali n’est pas simplement militaire, il est aussi économique. Plus de 300 millions d’euros ont été engagés pour soutenir de nombreux projets, depuis 2013 : des hôpitaux, des lycées, des projets concernant aussi des villes, notamment la capitale Bamako, ont été réalisés.

Notre soutien, il est politique. Je veux saluer ici la signature de l’accord de paix et de réconciliation et votre engagement personnel pour le faire respecter. Je veux aussi dire combien nous sommes reconnaissants à l’Algérie d’avoir permis, tout au long de ces dernières années, de porter ce projet de réconciliation et au cours des derniers mois, d’avoir réussi à conclure ou faire conclure cet accord.

 

Vous pouvez être fiers, Monsieur le Président, pour la première fois, depuis trois ans, les enfants de Kidal vont pouvoir retourner à l’école, grâce au retour de l’administration malienne dans le nord et grâce aussi à cet accord de réconciliation. Je salue ici aussi les représentants du nord de votre pays.

La relation entre la France et le Mali est ancienne et profonde, j’allais dire, historique. Et comme souvent c’est par la culture que beaucoup de Français connaissent votre pays, Monsieur le Président : Ali Farka Touré, Boubacar Traoré, Salif Keïta, Amadou et Mariam… Je n’oublie pas Toumani Diabaté, autant d’artistes appréciés du public.

La culture malienne, c’est aussi la littérature. Je pense à Amadou Hampaté Ba et plus récemment à Moussa Konaté. Je veux aussi souligner ce festival exceptionnel de photographie qui est organisé à Bamako, souligner aussi la place du cinéma, de la mode… Beaucoup d’artistes maliens sont présents avec nous ce soir et tenaient à l’être.

La créativité malienne repose sur un héritage, un passé millénaire avec un splendide patrimoine et notamment les manuscrits et les mausolées de Tombouctou. Je me souviens encore, nous étions avec la Directrice générale de l’UNESCO, c’était quelques semaines après la libération du nord du Mali et nous assistions à ce spectacle épouvantable de voir des textes sacrés, des lieux, qui jusqu’à présent avaient été soigneusement entretenus, tant ils participaient au patrimoine mondial de l’humanité, d’un seul coup saccagés, détruits, déchirés, brûlés… Alors, ce que les terroristes voulaient détruire, c’est ce que vous avez contribué tous ici à réhabiliter, notamment l’UNESCO que je veux saluer, à travers Mme BUKOVA.

Le Mali a su surmonter l’épreuve de la guerre et connaître une croissance économique tout à fait impressionnante : plus de 5 % cette année, après 7 % l’année dernière. Vous avez défini des priorités essentielles pour le Mali : le désenclavement, les infrastructures et l’accès des populations aux services de base. Je pense à l’eau, à l’électricité (l’électricité qui est un projet que nous voulons aussi porter pour l’ensemble du continent africain).

La France a fait du Mali l’un des pays prioritaires de sa politique de développement. De nombreuses entreprises françaises travaillent au Mali. Je ne vais pas les citer toutes, mais beaucoup sont représentées ici ce soir. Elles emploient et forment de nombreux Maliens.

La France au Mali, ce sont à près 8000 ressortissants français qui se dévouent et qui nous représentent au Mali. En deux ans, il y a eu plus de 2000 de mes compatriotes qui se sont installés dans votre pays. Signe de la confiance que nous avons voulu signifier à travers leur présence. Je veux, au-delà de leurs représentants, les remercier.

 

Je n’oublie pas non plus la contribution des Maliens à l’économie française. Il y a 70.000 Maliens qui vivent en France. Dans de nombreux secteurs, ils font preuve de dynamisme. Je pense au bâtiment, à la restauration, à l’industrie et nous accueillons aussi beaucoup d’étudiants. Ainsi, nous contribuons ensemble à la Francophonie et je salue ici la secrétaire générale.

Parmi les Franco-Maliens, je ne pourrais pas citer tous ceux qui se sont illustrés, soit par leur talent, soit par leur engagement. Mais je veux en distinguer un, plus particulièrement : Lassana Bathily qui a fait preuve d’un comportement exemplaire lors d’une attaque terroriste contre l’Hyper-Cacher, en janvier dernier. Il est ici ce soir.

Et vous Monsieur le Président, vous étiez aussi là, le 11 janvier 2015, lors de la marche républicaine. J’avais voulu que vous soyez à mes côtés, que nous soyons la main dans la main. Dans les photos qui restituent cette marche exceptionnelle où plus de 50 chefs d’État et de gouvernement étaient venus manifester leur solidarité à l’égard de la France et leur attachement à la liberté, nous étions là tous les deux, nous ne pouvions pas nous détacher, l’un de l’autre.

Monsieur le président, votre histoire personnelle symbolise les relations entre nos deux pays, car vous en avez fait la révélation cet après-midi. Vous étiez à l’Élysée à l’âge de 13 ans, beaucoup plus tôt que moi. Vous avez été invité à un goutté par le président René Cotty, mieux encore par Madame Coty que chacun ici connaît. Ce goutté, qui a été organisé, était pour les meilleurs élèves qui s’étaient illustrés dans les établissements solaires et notamment dans votre pays vous avez été repéré, comme l’on dit.

Je veux aussi saluer ce travail des enseignants qui ont contribué justement à permettre la promotion. Quand vous étiez venu ici, vous avez découvert ce lieu ; je ne sais pas s’il a été déterminant pour votre carrière politique ensuite. En tout cas, vous y revenez plusieurs décennies après, ce n’est plus pour un goutté, mais pour un dîner ; et ce n’est plus un jeune élève, mais non plus un vieux Président qui est là. C’est un sage Président, un Président aimé qui contribue à ce que cette visite d’État soit consacrée à l’amitié entre le Mali et la France.

Vive le Mali  

Vive la France

Vive l’amitié entre nos deux pays.

 

 

 

 

 

 

TOAST DU PRÉSIDENT IBK

 

Chers amis,

Je crois que je vais faire parler mon cœur.

François, c’est un bien très grand moment pour moi.

J’allais dire Monsieur le Président de la République française, cher ami, des visites à l’Élysée se suivent, mais ne ressemblent point.

Lauréat du Soudan, j’ai été invité, vous l’avez rappelé dans des conditions que vous avez indiquées. Je suis aujourd’hui dans cette maison, la plus célèbre de France, pour voir mon pays honoré ; car tout ce qui se fait depuis que nous sommes ici ; tout ce qui se fait aujourd’hui, y compris en Sorbonne, où je vous ai regretté, Mme KAIDANKOS, vous qui avez accepté de diriger mes travaux, modestes travaux sur les relations soviéto-maliennes.

J’ai tenu à vous rendre hommage et le mérite de Mme le Proviseur, pour m’avoir initié aux relations soviéto-africaines, singulièrement, je voulais dire, les relations avec les pays du Moyen-Orient et l’Égypte.

Donc, aujourd’hui nous avons célébré avec faste, avec grande émotion, cette amitié féconde qui a traversé les ans avec une constance, une finesse, une délicatesse, une humanité très profonde qui fait que nous ne saurions jamais nous oubliés les uns et les autres.

Vous savez, j’ai les souvenirs des familles qui m’ont accueilli, jeune africain de 13 ans qui débarque dans le froid parisien, qui est accueilli dans un établissement dont je saurais plus tard qu’il est célèbre. Je pense chers amis, vous savez de quoi donc je parle, Jeanson de SAILLY et le bonheur d’être accueilli par une famille voisine les AUFOIE de Normandie.

M AUFOIE était, à l’époque, ambassadeur itinérant et conseiller du Général De GAULE, qui d’ailleurs, a fait une visite au Mali à cause d’une petite trouble ; une anecdote !

J’étais lycéen en ce moment au Terrasson de Fougères. L’ambassadeur AUFOIE arrive, me fait inviter par le gouverneur à prendre un petit déjeuner avec lui au Palais de Koulouba. J’ai mes souvenirs de Jeanson, je mets mon blaiser, mon pantalon de flambeur gris et avec fierté, je m’installe dans la voiture du gouverneur pour aller au petit déjeuner.

À mon retour, il m’a déposé dans la cour du Lycée, je rejoint ma classe, une classe de mathématique, dont je n’étais pas l’élève le plus brillant. Et mon épouse qui était ma condisciple à l’époque était bien meilleure que moi. J’avais des intrigues pour le Latin et le Grec.

Monsieur PLENIRE, professeur de mathématique : « M KEITA, d’où venez-vous comme ça ? »

-Je viens de chez M le Gouverneur.

-Fanfaronne avec ça ! Pourquoi pas chez le Pape ?

-Je dis M PLENIRE, je viens de chez M le Gouverneur.

-Au petit coin, au pilori, voilà un peu ces amitiés chaudes, dont on ne saurait jamais oublier la délicatesse et tout ce qui fonde les relations solides entre les hommes. Car nos relations sont de celles-là, des relations à hauteur humaine, très fortes, très fortes pour qu’elles résistent à tout.

 

Dans la tourmente qui a été nôtre, où nous avons perdu un moment tout espoir, quand nous voyions nos femmes violer, quel que fût l’âge ça importait peu; nos enfants fouetter pour porter du Bleu-Jean ou pour avoir écouté de la musique profane, du jazz, du rap, ou des musiques d’aujourd’hui.

Quand nous avons vu nos écoles fermer, nos maîtres brutaliser, nos mausolées, pour certains multimillénaires, quand nous avons vu Tombouctou, la Cité du savoir, de l’érudition, violer, agresser, amputer ; Mme BOKOVA, nous avons eu beaucoup d’émotions quand vous étiez venue au Mali, il ya deux mois, pour procéder à la remise au Mali des monuments et mausolées restaurés. Merci à l’UNESCO, merci à vous, chère Madame.

Nous avons désespéré et nous croyions au fond de l’abîme, nous avons crié, on nous a pas entendu, beaucoup n’ont pas entendu, mais vous nous avez entendu cher ami, François HOLLANDE. Votre décision, il vous a fallu, cher Président, cher ami, tant de courage, tant d’audace, pour décider ce 11 janvier, vous et le gouvernement de France et toute la classe politique qui vous a suivi, je la joins dans le mérite, décidé de frapper fort, d’intervenir au Mali, en faisant décoller de Saint-Dizier et de N’Djamena des rafales et des mirages.

Konna qui s’apprêtait à subir une violence inouïe, 400 Jeeps, 400 pick-up étaient en lisière de la ville, phares braqués sur la ville. Vous comprenez la psychose ; certains ont perdu la raison, nous a-t-on dit. Cela fut arrêté net, tout net. M le président, cher Jean Yves Le DRIAN, voilà à quoi Serval a servi. Nous ne saurions jamais l’oublier.

C’est pourquoi il nous tenait à cœur, pays d’honneur, de dignité et de profonde historicité, à notre tour, de faire tout ce qui sera de notre possible pour que l’histoire vous donne raison, M le président. Que vous n’ayez pas pris ce que vous avez pris comme décision en vain ; que l’intervention française au Mali, non seulement apaise le pays et le stabilise, mais mieux conforte la démocratie malienne, lui donne vigueur. Et qu’à terme, ce pays, si cher à la France et à vous même, se retrouve avec lui-même, réconcilié avec tous ses fils et reprenne son parcours historique et surtout étonne le monde.

Quand je reçois aujourd’hui nos frères des mouvements, c’est un bonheur pour moi. Certains que je vois, pour la première fois, chef de guerre notamment quand ils me disent leur confiance, en homme d’État que je suis, je vous assure cela me cause une profonde émotion. Je dis simplement que je suis à la tâche. Vous êtes chez vous, ce palais est le vôtre, vous y serez toujours bien accueillis, fils du Mali, fils du Mali, il en saurait être autrement. Il ne surviendrais jamais à personne de vous en empêcher.

Vous avez vu le bonheur suprême : la réouverture des classes à Kidal, après 3 ans d’interruption. Car je dis toujours que tout peuple qui ne saurait pu soigner ces choses humaines, excusez-moi du terme, sera irrémédiablement largué. Nul ne saurait être invité au banquet qui n’aurait mérité.

Nous avons obligation rigoureuse de faire en sorte que le Mali soit au rendez-vous des hommes ; que le Mali soit au rendez-vous de l’honneur et de la dignité. Que notre pays, vieux pays de savoir, doit retrouver son cours normal et sa place dans le concert des Nations.

Merci, chers amis, d’avoir fabuleusement contribué à ce faire.

Aujourd’hui est, pour nous, un jour de bonheur absolu, intégral, total que cette soirée au cours de laquelle je peux dire Monsieur le président, vous ne vous êtes pas trompés. L’histoire retiendra du succès du Serval au Mali et de tous ces jeunes Français qui ont perdu la vie dans le massif du Théreghar. Si dur ce massif montagneux que le soleil et les semelles se fondaient quand il est 50 °c à midi et des amplitudes inouïes, frôlant le 0 °c la nuit… vous comprendrez qu’il a fallu du courage à ces jeunes gens-là pour exécuter leurs missions que vous, chef des armées leur avaient confié. Les missions sont parfois difficiles, certains y sont restés, Damien BOITEUX a été le premier ; Damien BOITEUX que chaque Malien se fait un devoir d’honneur de faire revivre à travers le prénom qu’il donne à son enfant. Les Damiens sont nombreux aujourd’hui au Mali comme les François, ah oui ! Comme les François. Tout cela, chers amis, pour vous dire que le Mali se souviendra, le Mali n’oubliera pas. Merci du fond de mon cœur, chers amis Français.

L’amitié, la vraie, c’est celle-là qui fait que les gens se comprennent, se considèrent comme respirant à la même hauteur, à la nôtre, merci.

 

Mercredi 21 octobre 2015

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