L’association Temed, qui lutte contre l’esclavage et ses pratiques assimilés, ne pouvait pas rester indifférente à la vente des migrants africains en Libye. Elle a organisé une conférence de presse, le mercredi dernier à son siège, pour dénoncer et condamner fermement cette atrocité. Temed réclame, par ailleurs, l’adoption par le gouvernement malien d’une loi criminalisant la pratique de l’esclavage.
La diffusion, par CNN, d’images montrant des migrants africains vendus aux enchères en Libye a déclenché une indignation générale. La chaîne américaine a montré des migrants entassés dans des centres de détention, battus, humiliés, et vendus comme esclaves.
Le président de l’association Temed, Ibrahim Ag Idbaltana, a exprimé son indignation face à cette situation, avant de s’exprimer sur la situation du Mali où les pratiques de servitude et d’esclavage par ascendance persistent encore dans plusieurs localités. Ce système social, même s’il ne comprend plus la capture et la vente d’êtres humains par d’autres, impose une perte des droits fondamentaux (à l’héritage, à la propriété, à la rémunération contre le travail accompli, parfois à disposer de la garde de ses enfants) et en plus, il est à la base d’une discrimination sociale.
Selon le président de Temed, la continuité de ces pratiques met en évidence le fait qu’un système social traditionnel prime encore dans certains endroits sur le système républicain moderne. Alors que dans ce contexte, un véritable progrès social et l’épanouissement de chaque personne ne peuvent être atteints. Le problème de la pratique de l’esclavage, a-t-il fait remarquer, est difficile à résoudre pour des raisons liées aux modes de vie communautaires hérités des traditions séculaires, perpétrés parfois par des élites locales.
Par ailleurs, a souligné Ag Idbaltanat, ce système permet au maître de marchander des voix pour les leaders politiques (bourrage des urnes avec détention illégale des cartes d’électeurs par les chefs de fraction ou de village). Le pouvoir public au Mali, qui dénonce ces pratiques, a encore beaucoup à faire pour mettre en place des moyens efficaces et légaux permettant l’émancipation des victimes qui continuent à subir une telle situation pour des raisons souvent de subsistance.
Cela est vital pour la survie de l’Etat qui doit faire face aux tares et faiblesses de nos sociétés. « Il a été question de sauvegarder une certaine belle image du pays vis-à-vis de l’extérieur, ou d’éviter de déranger les ordres déjà établis pour préserver la stabilité à peu de frais. Nous disons que ceci n’est pas une solution durable, il faut plutôt faire face à la réalité, car tout problème non réglé deviendra un jour une tragédie », a-t-il déclaré.
Pour Idrissa Akilili, l’esclavage est pratiqué dans notre pays dans sa forme la plus abjecte. «J’interpelle le président de la République, qui s’est indigné à juste titre de la situation en Lybie. J’attends la même indignation du chef de l’Etat face à la vente en 2016 dans la région de Menaka de 3 jeunes garçon à des algériens par leur maitre pour 3 millions de FCFA », a dit Idrissa Akililli.
Pour renverser et améliorer la situation, la Temed demande au gouvernement l’adoption d’une loi criminalisant la pratique de l’esclavage. Cette loi, malgré de multiples rencontres entre la Temed, le ministère de la justice et les députés, n’a toujours pas été présentée en conseil des ministres. Selon le président de Temed, cela est due à des raisons politiques qui lui échappent.
Ag Idbaltanat a affirmé que son association ne baissera pas les bras et qu’elle va poursuivre sa campagne de façon permanente auprès des décideurs nationaux et internationaux (exécutif, judiciaire, législatif, Chefferies traditionnelles, Collectivités) pour l’adoption d’une loi qui criminalise la pratique de l’esclavage.
Mémé Sanogo