Autant de défis sur lesquels se sont penchés des experts de la Banque mondiale à l’occasion d’un séminaire sur l’alimentation et l’agriculture au Mali qui s’est tenu récemment (le 21 Novembre 2016) à Bamako. Objectif ? Evoquer l’avenir agricole du pays avec les autorités et les acteurs du monde rural et définir l’action de la Banque mondiale et de ses partenaires dans ce domaine.
« Le Mali consacre environ 15 à 18% de ses dépenses publiques au secteur de l’alimentation et de l’agriculture, ce qui correspond environ aux deux tiers du financement total (public-privé) de ces secteurs, alors que dans les pays ayant réussi leur transformation agricole, le financement public ne représente qu’un tiers du financement total », a souligné Paul Noumba Um, directeur des opérations de la Banque mondiale au Mali, au cours de ce séminaire. Pour Ethel Sennhauser, directrice principale du pôle de compétences agriculture de la Banque mondiale, qui s’était rendue à Bamako afin d’effectuer des visites de terrain et participer au séminaire, « transformer l’agriculture et l’élevage au Mali est un impératif qui permettra de répondre au double défi démographique et climatique. »
Ethel Sennhauser constate en effet que la demande en aliments de qualité augmente sans cesse, en raison du taux de croissance démographique élevé (+3,2% par an) et de l’urbanisation (+4,7% par an), alors que le taux de prévalence de malnutrition aiguë globale (estimé à 12,4 % en 2015) était déjà supérieur ou proche du seuil « critique» de 10 % entre 2011 et 2015. Par ailleurs, le Mali, à l’instar des autres pays de l’Afrique de l’Ouest, est très vulnérable au réchauffement climatique, et sa production de maïs, sorgho, mil de doigt, arachide et bananes devrait diminuer significativement (> 10%) d’ici 2050.
Cinq axes d’action ont donc été identifiés au cours de ce séminaire pour transformer l’agriculture malienne, qui repose aujourd’hui essentiellement sur le coton (le Mali est le 2e plus grand producteur de coton en Afrique). Ils s’inspirent de l’expérience réussie du Brésil, qui est parvenu à diversifier son économie agricole dans 18 autres filières pour ne plus dépendre seulement du café. Ou encore, de celle de la Californie, qui a su tirer parti de la disponibilité de terres, d’eau et de soleil pour développer à grande échelle la production d’aliments de qualité.
Ces 5 axes d’action consistent en des politiques qui permettraient de booster la productivité de ces secteurs vitaux pour la population malienne:
- Réformer le régime foncier afin de sécuriser les investissements consentis par les producteurs et les investisseurs dans l’agrobusiness;
- mettre en place des politiques agricoles incitant les petits producteurs à être plus compétitifs et le secteur privé à investir davantage, notamment dans la transformation ;
- créer des mécanismes de subventions ciblant les intrants pertinents pour engager dès aujourd’hui l’adaptation aux changements climatiques ;
- améliorer le réseau routier afin d’acheminer sans pertes les produits alimentaires des zones de production agricole ou d’élevage vers les unités de transformation et les marchés ;
- développer un dispositif étendu de formation et de vulgarisation pour encourager l’adoption de techniques et technologies adaptées par les agriculteurs et les éleveurs.
Si le Mali parvient à répondre à ces défis, le pays pourra s’imposer comme le grenier de l’Afrique de l’Ouest. Comme le résume Yaya Malle, président de la Fédération nationale des transformateurs des produits agroalimentaires du Mali (FENATRA), « Si la transformation alimentaire se développe au Mali, le pays se rapprochera des pays émergents ».