Dans cette tribune pour Benbere, Mohamed Maïga, ingénieur social et consultant sur les politiques territoriales, appelle à ne déresponsabiliser ni les citoyens ni les gouvernants.
Nous aspirons tous à des changements, donc à des pratiques nouvelles tant au niveau des gouvernants que des citoyens. Il n’y aura pas de surprises, un peuple consciencieux et honorable se fera toujours représenté par des gouvernants consciencieux et honorables. De même que des gouvernants consciencieux et honorables feront toujours attention à ne pas enfreindre les règles qui les lient à leur peuple (le pacte social).
Les Maliens sont des hommes et des femmes qui ont bénéficié d’une riche diversité culturelle avec des valeurs historiques que tous connaissent, sans exception, à des degrés différents. Des ruraux aux urbains, des migrants internes aux immigrés externes, tous, en tout ou en partie, ont hérité de cette richesse culturelle et de la richesse du vivre-ensemble. Alors, ne déresponsabilisons pas le citoyen de la même façon qu’il ne faut pas déresponsabiliser les gouvernants. La responsabilité de l’échec et du désarroi restera toujours partagée, même si finalement certains en profitent beaucoup plus que d’autres.
Le mal social sera toujours le résultat d’un tout complexe qui mérite d’être analysé et solutionné dans sa complexité. Faire porter la responsabilité de l’échec à une partie ou à une autre uniquement serait une grave erreur et la consécration du cercle vicieux d’une analyse unidimensionnelle à charge. La grandeur ne viendra pas de là. Il ne s’agit pas d’une autre école mais de la véritable école malienne.
Tentations piégeuses
La plus grande des universités, pour le Malien, c’est bien l’apprentissage de sa culture et son histoire. Et pour le coup, tous les Maliens en ont en partie bénéficié. Ils ont appris ce qu’est la solidarité, l’importance de la famille, de la communauté, l’honneur, l’intégrité, la bonne foi, l’amour et la pitié. Mais qu’a-t-on fait de ces acquis ? Une des grandes réponses à notre mal réside à ce niveau.
Pour certains, cette interrogation paraîtra trop abstraite et peu solutionnante. Et pourtant, notre difficulté à mieux gouverner, à mieux nous écouter et à décider ensemble réside aussi à ce niveau. Qu’a-t-on fait pour préserver nous-mêmes nos acquis et nous battre pour nos droits sociaux ? Quasiment rien. Et ceux qui ont eu la chance de porter des voix et défendre des causes, qui paraissent justes, n’ont presque jamais pu résister à la corruption et aux tentations piégeuses de la sphère du pouvoir et de la notoriété. La véritable école malienne aurait pu sauver – et peut-être qu’elle le pourrait encore -, si les Maliens arrivent à s’interroger et à éviter les accusations multiples, faciles et superficielles.
Oui, l’école du monde est importante mais elle n’est pas décisive. L’expérience du monde permet aujourd’hui d’être sûr que c’est bien la valeur des hommes et des femmes qui déterminent la réussite des peuples.