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Télévisions privées : Améliorer l’offre

Une trentaine de télévisions privées sont actuellement autorisées par la Haute autorité de la communication (HAC) du Mali à émettre et à diffuser leurs programmes. Une belle opportunité pour la liberté de la presse et pour le public, dont l’éventail de choix se trouve élargi. Cependant, pour mener à bien cette mission, ces chaînes privées ont encore un long chemin à parcourir : personnel qualifié, ressources suffisantes et programmes innovants. La taille des défis à relever est importante. Malgré ces contingences, les perspectives du secteur sont positives, mais les acteurs espèrent un soutien des autorités.

 

Elles sont 22 à Bamako et 8 dans les régions de Kayes, Koulikoro, Sikasso, Ségou et Gao à faire désormais partie du paysage audiovisuel malien. Ces télévisions, qui « ont réussi le pari de s’installer et de fonctionner comme le média qu’elles doivent être comblent un vide », estime M. Gaoussou Drabo, membre de la HAC. Le contenu de cette offre se distingue nettement de celui de l’Office de radio télévision du Mali (ORTM), « qui a toutes les pesanteurs du service public ».  Mais cette diversité a un coût que ne peuvent supporter toutes ces nouvelles chaînes, qui offrent souvent les mêmes programmes, ce qui peut vite lasser un public devenu plus exigeant.

Diversité ?

En effet, toutes les télévisions ne sont pas logées à la même enseigne. Si le changement est net en matière d’offre, le résultat souhaité n’est pas encore atteint du côté de toutes les chaînes. La télévision étant une « machine lourde à mettre en place », selon les acteurs.

Lorsque les appels à candidatures ont été lancés, ces chaînes « ont été mises en garde par rapport au contenu », explique M. Drabo. Même si certaines se sont déjà imposées dans le paysage et ont acquis une certaine crédibilité, elles n’ont pas encore surmonté cette difficulté. Des contraintes liées, selon elles, à la difficulté d’avoir un personnel de qualité, notamment. Un défi qui se pose avec encore plus d’acuité chez les organes disposant de moyens modestes. Cette absence de ressources de qualité  s’explique à la fois par l’insuffisance en ressources formées par les écoles spécialisées et la difficulté pour les chaînes de s’offrir les services d’une expertise extérieure, aux coûts élevés, relève M. Drabo.

Plus qu’offrir de la diversité, les télévisions privées ont « transformé le paysage audiovisuel et permis au téléspectateur d’obtenir en temps réel l’information que ne pouvait donner la chaîne nationale », note M. Djibi Sacko, Directeur de Renouveau TV. Leur arrivée est assurément est une bonne chose pour les citoyens. En plus de  la concurrence, qui est un facteur positif, la liberté d’expression est bien mieux garantie, parce qu’elles peuvent aborder plusieurs sujets de façon contradictoire, contrairement à la chaîne publique, beaucoup plus axée sur l’institutionnel.

Parlant de la diversité des programmes, M. Sacko soutient qu’on « ne crée pas totalement, même s’il faut adapter ». Les télévisions locales ayant l’avantage de connaître leur public et de savoir ce qu’il veut voir et écouter. Cependant, dans cette quête de l’intérêt du public, les chaînes ne s’interdisent pas l’innovation. Au contraire, « elles ne font pas toutes la même chose », ajoute-t-il.

« Nous mettons l’accent sur les débats plutôt que sur les émissions de divertissement ». Mais la difficulté majeure dans le domaine, « puisqu’il ne s’agit pas de télévisions subventionnées », c’est qu’elles dépendent essentiellement des moyens du promoteur et peuvent peu souvent compter sur quelques particuliers. Des partenaires qui préfèrent souvent se tourner vers la chaîne nationale, qui dispose de plus de moyens et donc leur offre plus de possibilités.

Des coûts importants

En plus de cela, ce qui manque le plus aux médias, c’est la formation, confesse M. Sacko. « Le personnel qualifié fait défaut, parce tout le monde veut être journaliste ou animateur mais sans en avoir la formation de base ».

Si la concurrence peut avoir un effet salutaire pour la liberté d’expression, elle pose cependant une difficulté particulière dans le contexte malien, les différentes chaînes ayant pratiquement les mêmes partenaires.

Cependant,  la réussite en matière de médias ne peut se limiter aux retombées sur le plan pécuniaire, ajoute M. Sacko. L’esprit qui anime ces projets va au-delà des résultats économiques. La réussite se mesure aux résultats des actions entreprises et à l’engouement des téléspectateurs pour tel ou tel programme, ce qui est un motif de satisfaction pour les promoteurs. La croyance en ces projets, qui porteront un jour leurs fruits, est le gage d’un futur meilleur, se réjouit M. Sacko.

Décidées à ne pas rester en marge de cette diversification, les régions comptent aussi désormais leurs chaînes de télévision privées. Kéné Tv a ainsi vu le jour en 2017, à la faveur des appels à candidatures de l’autorité de régulation. Ainsi, la troisième région entend parler de sa propre voix et surtout profiter de ses énormes potentialités économiques, que Kéné TV veut promouvoir, selon son directeur, M. Oumar Traoré. La toute première chaîne de la localité, qui émet pour le moment dans le cercle de Sikasso « à 100% », souhaite s’étendre à la région et même au plan national.

Informer les populations sur les faits les concernant, promouvoir la culture et les potentialités afin d’attirer les investisseurs, c’est l’objectif ambitieux affiché par les responsables de la chaîne. Si elle s’efforce de remplir les conditions fixées par l’autorité de régulation, la chaîne diffuse certaines émissions, comme de l’information en langue nationale bamanan, des émissions sportives, sur la religion, une émission sur le terroir ou encore du divertissement. La principale difficulté est celle qu’affrontent les autres chaînes, c’est-à-dire que les charges pèsent principalement sur le promoteur.  C’est pourquoi, pour les responsables, il est impératif « de trouver des partenaires » pour remplir à souhait leurs missions et surtout satisfaire davantage un public qui veut plus de proximité.

Mais, pour figurer parmi les meilleurs au plan national, le chemin est encore long et les responsables en sont conscients. Même si Kéné TV veut être leader, ses dirigeants estiment qu’il faut donner plus de visibilité à la région. Ce qui suppose d’autres chaînes de télévision, pour élargir la couverture de ce territoire, et un soutien accru des autorités, car « les charges en télévision sont importantes ».

Perspectives positives

Les chaînes privées ont de beaux jours devant elles. Plusieurs ont entrepris de la formation interne et ont même « conclu des accords de partenariat avec des structures de formations afin que ceux qui sortent de ces écoles correspondent aux besoins des nouvelles télévisions », explique M. Drabo de la HAC. Il se félicite de l’engagement des promoteurs, qui ont exploré les possibilités qui se présentaient. Elles peuvent donc progresser en qualité et offrir une gamme de contenus intéressants aux téléspectateurs.

Ce partenariat avec les établissements qui forment les professionnels du métier permet aux étudiants de faire des stages et de renforcer leur formation après leurs études, explique M. Mamadou Haïdara, Directeur d’Énergie Tv et Président de l’Association malienne des télévisions libres (AMATEL). Ces étudiants pourront ensuite intégrer et renforcer les rédactions des chaines.

Malgré les défis, qui restent énormes, les professionnels du secteur envisagent de se réunir et de solliciter les autorités pour des subventions, « comme pour les radios », parce les charges des télévisions sont lourdes. Surtout qu’en raison de « la crise financière, les publicités ne payent pas », ajoute M. Haïdara. Ces aides de l’État permettront à ces structures de pouvoir mieux payer leurs travailleurs et de mieux produire, assure le premier responsable de l’AMATEL.

Jugées bonnes, les relations entre la HAC et ces médias s’exercent à travers une convention qui fixe diverses règles, relatives à la grille des programmes, à l’embauche d’un personnel spécialisé et à sa sécurisation et au respect des règles éthiques. « Le travail de la HAC n’étant pas seulement la répression, elle entend œuvrer au côté des acteurs pour avoir un paysage audiovisuel de qualité », conclut M. Drabo.

Journal du mali

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