Face à la piraterie, le Bureau malien du droit d’auteur (Bumda), dirigé par Mme Diallo Aïda Koné, fait preuve d’imagination et d’inventivité afin de préserver les industries créatives fortement éprouvées par une conjoncture économique et financière. C’est dans ce cadre que le Bumda a organisé le jeudi 16 mai 2019 au Palais de la culture Amadou Hampâté Bâ une matinée de causerie-débat avec les artistes sur le droit d’auteur et les droits voisins.
Selon la directrice générale, Mme Diallo Aïda Koné, le Bumda, fidèle à sa mission de défense des intérêts moraux, matériels et professionnels des auteurs d’œuvres littéraires et artistiques ainsi que de leurs ayants droit, s’est engagé dans une démarche innovante pour une large information et sensibilisation de ses sociétaires, partenaires et du public.
C’est ainsi le Bumda a institué la plateforme “Matinées de causerie-débat” dans le but d’améliorer sa gouvernance en facilitant l’accès à l’information. Cette plateforme, à ses dires, qui a pour objet de renforcer la confiance au Bumda, est un forum inter-dynamique d’informations et d’échanges entre la direction générale du service et les membres de l’organisation.
Durant cette causerie-débat, les experts du Bumda et les artistes ont échangé sur trois thèmes à savoir : l’introduction au droit d’auteur et des droits voisins, la gestion collective du droit d’auteur et la lutte contre.
Notions d’auteur
D’après Tokaye Alfaraha Cissé (chef du service de l’exploitation et de la perception du Bureau malien du droit d’auteur), un des conférenciers, le mot auteur désigne la personne qui est à l’origine d’une chose, responsable d’un acte, créateur d’une œuvre, littéraire ou artistique.
Dans la conception personnaliste du droit français, l’auteur ne peut être que celui dont la personnalité s’est exprimée dans l’œuvre. Cela signifie que cette qualité ne peut être reconnue qu’à l’auteur seul. La loi malienne définit “l’auteur de l’œuvre” comme la personne qui a créé cette œuvre, sauf preuve du contraire, la qualité d’auteur appartient à celui ou à ceux sous le nom de qui l’œuvre est divulguée. En résumé, la notion d’auteur s’apprécie, on le voit par la création d’une œuvre.
b) Notion d’œuvre : dans le domaine littéraire et artistique, scientifique ou technique, c’est la création intellectuelle originale de l’auteur. “Ni la Convention de Berne, ni les législations nationales ne définissent exactement l’œuvre de l’esprit mais donnent une liste non exhaustive d’œuvres. Nous avons ainsi : les livres, brochures et autres écrits ; les conférences, allocutions, sermons et autres œuvres de même nature ; les œuvres dramatiques et dramatico-musicales; les chorégraphiques et les pantomimes; les compositions musicales avec ou sans paroles ; les œuvres cinématographiques auxquelles sont assimilées les œuvres exprimées par un procédé analogue à la cinématographie; les œuvres de dessin, de peinture, d’architecture, de sculpture, de gravure, de lithographie ; les œuvres des arts appliqués; les illustrations, les cartes géographiques; les plans, croquis et ouvrages plastiques relatifs à la géographie, à la topographie, à l’architecture ou aux sciences”, a-t-il exposé.
Sur les prérogatives de l’auteur sur son œuvre, il a souligné que la Convention de Berne de 1886 et toutes les législations nationales sur le droit d’auteur reconnaissent à l’auteur sur son œuvre un droit exclusif inaliénable et opposable à tous. Ce droit exclusif comporte des attributs d’ordre moral et intellectuel et des attributs d’ordre patrimonial. Les attributs d’ordre moral de l’auteur sur son œuvre sont : le droit au respect de l’œuvre, le droit à la paternité, le droit de divulgation et le droit de repentir ou de retrait. Les attributs d’ordre moral de l’auteur sont perpétuels, inaliénables et imprescriptibles. Les attributs d’ordre patrimonial, constituent les intérêts matériels que l’œuvre procure à l’auteur par son exploitation. Ce sont : le droit de représentation, le droit de reproduction et le droit de suite.
“Ainsi, l’auteur a le droit de faire ou d’autoriser les actes suivants : la reproduction de son œuvre de quelque manière et sous quelque forme que ce soit; la traduction, l’adaptation, l’arrangement et autres transformations de son œuvre; la location au public de l’original ou des exemplaires de son œuvre; la distribution des exemplaires de son œuvre au public par la vente ou tout autre transfert de propriété ou par la location; la représentation ou l’exécution de son œuvre en public; la radiodiffusion de son œuvre; la communication de son œuvre au public par câble ou par tout autre moyen, peu importe à cet égard que le public puisse la percevoir dans le même lieu ou au même moment, ou dans des lieux différents et à des moments différents qu’ils auront choisis individuellement”, a-t-il poursuivi.
Limitations des droits patrimoniaux
Le conférencier a indiqué que l’auteur d’une œuvre rendue licitement accessible au public, ne peut interdire, entre autres, les communications privées effectuées exclusivement dans un cercle de famille et ne donnant lieu à aucune forme de recette ; les communications effectuées gratuitement à des fins strictement scolaires ou religieuses dans des locaux réservés à cet effet ; les reproductions, traductions et adaptations destinées à un usage strictement personnel et privé de la personne qui les réalise.
“Les droits patrimoniaux sur une œuvre sont protégés pendant la vie de l’auteur et soixante- dix ans après sa mort. Aux termes de ce délai, l’œuvre tombe dans le domaine public. Le droit d’exploitation des œuvres tombées dans le domaine public est administré par le Bureau malien du droit d’auteur, seul organisme de gestion collective habilité au Mali”, a-t-il précisé.
Notions de droits voisins
Sur les notions de droits voisins, le conférencier a affirmé qu’indépendamment de la protection conférée aux auteurs, la Convention de Rome du 26 octobre 1961, confère une protection dénommée “droits voisins” à certains auxiliaires de la création. Il s’agit des artistes interprètes et exécutants, des producteurs de phonogrammes et de vidéogrammes et des organismes de radiodiffusion. Les droits voisins, à ses dires, sont attribués au seul bénéfice des artistes-interprètes, des producteurs de phonogrammes et de vidéogrammes et aux organismes de radiodiffusion.
Les prérogatives reconnues aux titulaires des droits voisins
D’après le conférencier, la loi reconnaît à l’artiste interprète un droit moral dont le périmètre est limité au respect de son nom, de sa qualité et de son interprétation. “En principe, le droit moral persiste après le décès de l’artiste interprète, au moins jusqu’à l’expiration des droits patrimoniaux. Le droit patrimonial reconnu aux artistes interprètes et exécutants porte sur leurs interprétations ou exécutions fixées ou non fixées. La loi malienne donne à l’artiste interprète ou exécutant le droit exclusif de faire ou d’autoriser les actes suivants : la fixation de son interprétation ou exécution non fixée ; la reproduction d’une fixation de son interprétation ou exécution ; la distribution au public par la vente ou par tout autre transfert de propriété d’une fixation de son interprétation ou exécution n’ayant pas fait l’objet d’une distribution autorisée par lui ; la location au public d’une fixation de son interprétation ou exécution ; la radiodiffusion de son interprétation ou exécution, sauf lorsque la radiodiffusion est faite à partir d’une fixation de l’interprétation ou de l’exécution ou lorsqu’il s’agit d’une réémission autorisée par l’organisme de radiodiffusion qui émet le premier l’interprétation ou l’exécution; la communication au public de son interprétation ou exécution, sauf lorsque cette communication est faite à partir d’une fixation de l’interprétation ou de l’exécution ou est faite à partir d’une radiodiffusion de l’interprétation ou de l’exécution; la mise à disposition du public, par fil ou sans fils, de son interprétation ou exécution fixée sur phonogramme ou sur vidéogramme, de manière que chacun puisse y avoir accès de l’endroit et au moment qu’il choisit individuellement. La durée de protection des interprétations ou exécutions est de 50 ans à compter de la fin de l’année de la fixation pour les interprétations ou exécutions fixées et à compter de la fin de l’année ou l’interprétation ou l’exécution a eu lieu, pour les interprétations ou exécution non fixées”, a-t-il développé.
Siaka Doumbia
Source: Aujourd’hui-Mali