Notre pays, en quête de souverainetés tous azimuts, se doit de tirer rapidement les leçons de la dernière grève paralysante des pompistes des multinationales, en musclant l’expertise locale en la matière. En plus des avantages déjà consentis en faveur des opérateurs nationaux d’hydrocarbures, il serait bon de leur octroyer la part du lion des marchés de fourniture de carburants, qui semble toujours l’apanage des multinationales.
Les récentes grèves observées par les pompistes des stations-services des compagnies Shell/Vivo Energy, Total-Energie, Ola et Oryx… continuent de faire des vagues. Parallèlement à l’enlisement des négociations, de gros clients des multinationales ne décolèrent plus contre le sevrage qu’on leur a imposé des jours durant, alors que des contrats de fourniture d’hydrocarbures en bonne et due forme les lient auxdites compagnies.
Il nous est revenu que des agents de l’Etat, ceux des missions diplomatiques et consulaires accréditées au Mali, des agences du Système des Nations unies, des ONG et des entreprises privées de la place ont réellement souffert le martyre à cause de la grève des pompistes des multinationales.
Bien que détenteurs des carte ou tickets de fourniture de carburant, ils n’ont pas eu une seule goutte d’essence ou de diesel plus de dix jours durant. Ils ont été, pour la plupart, obligés de mettre la main à la poche pour se ravitailler auprès d’importateurs nationaux, faute de service minimum, indispensable concession syndicale en cas de grève.
Des atouts
Aujourd’hui, c’est l’effet boomerang de cet extrémisme des syndicats des pompistes des multinationales qu’on peut observer quand on sait qu’une pétition est en cours de rédaction pour inviter l’Etat à résilier les contrats avec leurs entreprises et à nouer des relations partenariales fructueuses et durables avec les importateurs locaux qui, faut-il le souligner, ont mouillé le maillot et sauvé la face du Mali pendant la grève : en assurant un approvisionnement régulier et sécurisé de la population, preuve d’un grand civisme de leur part, qui mérite d’être raffermi.
L’idée aujourd’hui, c’est d’encourager l’Etat à organiser, conseiller, encadrer et accorder plus de faveurs aux importateurs locaux d’hydrocarbures, qui devraient, par ce fait même, participer à la reconstitution du Stock national de sécurité (SNS) dans un contexte de tension internationale et de renchérissement des coûts.
D’ores et déjà, les enseignes locales comme Yara Oil, Pétro-Bama, Corridor, AB-Oil… pour ne citer que celles-ci peuvent se vanter du climat social apaisé en leur sein, grâce à l’octroi de salaires conséquents ; des agents régulièrement inscrits à l’Institut national de prévoyance sociale (INPS) et à l’Assurance maladie obligatoire (Amo).
Autrement dit, ils sont logés à meilleure enseigne que leurs homologues des multinationales au regard des doléances de ceux-ci, qui tournent essentiellement autour du très bas niveau de leurs salaires et la faiblesse, voire l’absence d’assurance sociale dans bien des cas.
En tout état de cause, le Mali, qui consomme quotidiennement 7 millions de litres de gasoil et un million de litres d’essence, ne devrait plus se payer le luxe de plusieurs jours de grève au risque d’enfoncer davantage une économie déjà exsangue et de voir la montée en puissance de l’armée ralentie à cause d’une pénurie de carburants.La balle est dans le camp des autorités. Il est temps que le Mali Kura carbure aux couleurs locales afin de parer à toutes les éventualités. Quitte à user des bons côtés de la théorie de la préférence nationale, qui continue de faire le succès du Rassemblement national (ex-Front national) de Marine Le Pen en France.
El hadj A. B. HAIDARA
Source: Aujourd’hui-Mali