Dans une lettre adressée au Conseil de sécurité des Nations Unies, le gouvernement du Mali a accusé la France de fournir non seulement des renseignements, mais aussi des armes et munitions aux terroristes sur son territoire. Le gouvernement dit disposer des preuves de ces accusations.
Nouvelle scène de ménage entre le Mali et la France. En effet, le Mali a dénoncé, auprès des Nations Unies, la France qui est accusée de collaborer avec les groupes terroristes contre les forces armées maliennes. Ce qui est reproché à la France de Macron, ce sont les violations répétitives et fréquentes de l’espace aérien malien par les forces françaises, en y faisant voler des appareils tels que des drones, des hélicoptères militaires et des avions de chasse, sans autorisation des autorités maliennes. «Depuis le début de l’année 2022, les Forces armées maliennes (FAMa), munies de nouvelles capacités, ont enregistré plus de 50 cas délibérés de violation de l’espace aérien malien par des aéronefs étrangers, notamment opérés par les forces françaises, sous différentes formes », précise la lettre du Mali. Selon le ministre Diop, en plus d’actes d’indiscipline caractérisés par des refus d’obtempérer aux instructions des services de contrôle aérien, les forces françaises font aussi des cas d’extinction des transpondeurs dans le but de se soustraire au contrôle. Pire, la France est accusée de falsification de documents de vol, ainsi que des cas d’atterrissage d’hélicoptères dans des localités hors aérodromes, sans autorisation préalable. «De nombreux vols d’avions de renseignement et de drones évoluant à haute altitude ont été notés, qui se livraient à des activités considérées comme de l’espionnage, de l’intimidation voire de la subversion », précise le gouvernement du Mali qui ajoute que « l’un des cas les plus récents a été la présence illégale d’un drone des forces françaises, le 20 avril 2022, au-dessus de la base de Gossi, dont le contrôle avait été transféré aux FAMa le 19 avril 2022. Ledit drone était présent à partir de 11h45, évoluant à moyenne altitude, pour espionner nos vaillantes FAMa ».
En dehors de l’espionnage, les forces françaises se sont rendues coupables, selon le gouvernement malien, de subversion en publiant des images collectées par leur drone, montrant des civils tués.
A en croire la lettre adressée aux Nations Unies, le 21 avril 2022, une patrouille de Mirage 2000 a survolé à plusieurs reprises, sans coordination préalable, un convoi FAMa en partance pour renforcer le dispositif de l’emprise de Gossi. Cette manœuvre s’inscrivait dans une dynamique d’intimidation de nos forces, précise-t-on. Aussi, selon le Mali, le 15 juin 2022, l’avion de transport tactique Casa 295 de l’Armée de l’Air du Mali a été harcelé par un aéronef de combat appartenant à la force Barkhane, alors que l’aéronef malien effectuait des rotations entre des aérodromes situés en territoire malien. « L’aéronef français inconnu, qui ne s’est jamais annoncé à la radio, a effectué des manœuvres dangereuses autour de l’avion malien, perçues comme des tentatives d’intimidation. En outre, le 06 août 2022, la force Barkhane a confirmé dans un communiqué officiel avoir mené des opérations aériennes contre des présumés terroristes dans la zone de Talataye », indique la lettre qui ajoute que « ces opérations unilatérales n’ont pas été coordonnées avec les FAMa ».
Toujours dans la lettre, le gouvernement indique que le 08 août 2022, à 37 km de Tessit, un hélicoptère Chinook a survolé des renforts FAMa de Gao en mouvement vers Tessit, dans la direction opposée de progression. « Le Chinook, surpris dans ses activités, a subitement repris de l’altitude. Les recoupements du Poste de Commandement Interarmées de Théâtre (PCIAT) Est auprès des partenaires n’ont pas permis de confirmer l’origine de l’aéronef. Le 08 août 2022 à 12h55, une patrouille des FAMa est sortie de Labbezanga pour rechercher en vain un colis largué par Barkhane à 03 km Est dudit poste », précise-t-on.
A en croire la lettre adressée au Secrétaire général de l’ONU, « tout au long du processus de transfert aux autorités maliennes de l’aérodrome de Gao et de l’espace aérien du Nord, depuis l’annonce du retrait de Barkhane, les aéronefs militaires maliens ont fait l’objet d’entraves régulières par des manœuvres retardatrices visant à réduire leur efficacité et à rallonger leurs délais de réaction ».
Le Mali détient des preuves
Selon la lettre du ministre Diop, le Mali a des preuves d’une complicité de la France avec les terroristes. «Le Gouvernement du Mali dispose de plusieurs éléments de preuve que ces violations flagrantes de l’espace aérien malien ont servi à la France pour collecter des renseignements au profit des groupes terroristes opérant dans le Sahel et pour leur larguer des armes et des munitions », précise la lettre. Pour le Mali, c’est en raison de suspicions de manœuvres de déstabilisation de la France que le Gouvernement du Mali s’est fermement opposé à la demande de soutien aérien de la France au profit de la Minusma, afin que la France ne se serve pas de la mission onusienne comme prétexte pour mener des opérations subversives visant à fragiliser davantage le Mali et la région du Sahel .
Face à ces violations, le Mali a invité le « Conseil de sécurité des Nations Unies, garante de la paix et de la sécurité internationales, à œuvrer afin que la République française cesse immédiatement ses actes d’agression contre le Mali ».
Le Mali menace même de réagir face à la posture de la France. « En cas de persistance dans cette posture qui porte atteinte à la stabilité et à la sécurité de notre pays, le Gouvernement du Mali se réserve le droit de faire usage de la légitime défense, conformément à l’article 51 de la Charte des Nations Unies », précise la lettre du ministre Abdoulaye Diop.
Boureima Guindo