Le 22 septembre dernier, le président Ibrahim Boubacar Kéita (IBK) procédait à la remise officielle de 1000 tracteurs au profit des paysans maliens. Seulement, deux semaines après, ce qui ressemblait fort à une œuvre de charité s’est vite mué en un débat politique national. En effet, le Parti pour la renaissance nationale (PARENA), un parti de l’opposition politique, dénonce un scandale derrière l’initiative du président IBK, dans laquelle il subodore des pots-de-vin. Pour ce parti, l’opération des 1000 tracteurs destinés aux paysans est « l’histoire d’une transaction opaque, d’un marché passé illégalement de gré à gré déguisé entre l’Etat et un fournisseur sélectionné ». Chaque tracteur, foi du PARENA, a coûté un peu moins de 6 millions de F CFA et a été vendu à l’Etat à un peu plus de 13 millions de F CFA, avec une marge importante à vous donner le tournis. « Faux », répond la majorité présidentielle qui n’y voit que dalle, affirmant que la procédure d’appel d’offres a été non seulement respectée et que le fournisseur retenu en avait le profil. Comme on le sait, en de pareilles circonstances, chaque camp se défend comme il peut, estimant que c’est l’autre qui fait preuve d’insincérité et de mauvaise foi. C’est pourquoi, pour mettre fin à la polémique, il sied d’ouvrir une enquête judiciaire ou de commanditer un audit pour situer toutes les responsabilités. Cela aura l’avantage d’éclairer l’opinion nationale et de rassurer surtout les partenaires techniques et financiers qui n’ont de cesse de soutenir le Mali à bout de bras, depuis que le Général Amadou Sanogo, après avoir fragilisé le pays avec un pronunciamientodigne d’un autre âge, avait facilité l’invasion des djihadistes. IBK a tout intérêt à faire toute la lumière sur cette nouvelle affaire qui vient rappeler l’étrange histoire d’avion présidentiel acquis à coût de milliards et qui avait fait grand bruit dans le landerneau politique malien, obligeant la Banque mondiale et le Fonds monétaire international à couper un temps soit peu le robinet.
IBK a envoyé trop de mauvais signaux à ses compatriotes
Car, à dire vrai, le Mali, depuis quelques années, s’est illustré de la pire des manières sur le plan de la gouvernance économique, si fait que le pays, dans le hit parade des nations les plus corrompues au monde, occupe désormais une place de choix. Les faits parlent d’eux-mêmes. En 2010, peu avant la chute du régime du président Amadou Toumani Touré, le ministre de la Santé d’alors avait été limogé pour avoir détourné des fonds alloués aux malades du Sida. Et dans la même année, un aéronef avait été trouvé dans le Nord du pays, certainement délaissé par des contrebandiers ou des trafiquants de drogue qui, évidemment, avaient bénéficié de la complicité de certains officiels maliens. La preuve est que depuis lors, l’affaire semble rangée aux oubliettes. Sans doute le présumé scandale autour de l’opération 1000 tracteurs, risque-t-il de connaître le même sort, dans la mesure où il impliquerait des gros bonnets de l’Etat malien. Ce qui serait regrettable. Car, en si peu de temps au pouvoir, IBK a envoyé trop de mauvais signaux à ses compatriotes. Toute chose qui pourrait, s’il n’y prend garde, lui coûter son 2e mandat.
B.O
Le Pays.bf
source : Le Républicain