En amont du sommet du G5 Sahel de N’Djamena (Tchad) qui réunira, les 15 et 16 février 2021, les dirigeants sahéliens, français, de l’Union africaine et de l’Union européenne, 3 membres de la Coalition citoyenne pour le Sahel livrent des analyses sur ce sommet qui se déroulera en partie en vidéo-conférence.
Le sommet de N’Djamena doit être l’occasion de faire le bilan de la situation au Sahel, un an après le sommet du G5 Sahel à Pau, qui avait conduit la France à envoyer 600 troupes supplémentaires et à intensifier, avec les armées sahéliennes, les opérations militaires dans la zone des trois frontières entre le Mali, le Niger et le Burkina Faso, expliquela Coalition citoyenne pour le Sahel.
En amont de ce sommet, Niagalé Bagayoko, Présidente de l’African Security Sector Network (ASSN) ; Alioune Tine, Fondateur d’Afrikajom Center, think tank basé à Dakar, Sénégal (Afrikajom) ; et Victor Ouedraogo, Directeur du Centre diocésain de communication de Ouhahigouya, Burkina Faso (CDC) expriment leurs attentes.
Niagalé Bagayoko : « Le sommet de N’Djamena affrontera cette triste réalité ? »
« En 2020, les forces armées sahéliennes et françaises ont décidé d’intensifier leurs opérations militaires contre les groupes extrémistes au Sahel central après le sommet de Pau. Cependant, on constate que l’année 2020 a été l’une des plus meurtrières pour les civils qui ont été la cible d’attaques de groupes djihadistes et des groupes d’auto-défense mais aussi d’éléments des forces de défense et de sécurité pourtant censées assurer leur sécurité. Des détournements massifs des budgets de la défense ont également été révélés alors même que des centaines de soldats sahéliens sont morts au front. La question qui se pose dorénavant est de savoir comment le sommet de N’Djamena affrontera cette triste réalité ? Aboutira-t-il à des engagements concrets visant à responsabiliser tous les acteurs du conflit pour les exactions commises contre les civils alors même que la situation se détériore ? »
Alioune Tine : « S’attaquer aux causes profondes des conflits »
« Le sommet de N’Djamena devrait être l’occasion pour la France et les gouvernements du G5 Sahel de prendre conscience des limites de leur approche militarisée et de reformuler une nouvelle stratégie pour le Sahel. Il n’y a pas lieu de se féliciter alors que près de 7000 personnes ont perdu la vie l’année dernière et que les violences contre les civils commises par les groupes armés, mais aussi par des éléments des forces de défense et de sécurité restent monnaie courante dans la région. Il est temps que les participants au sommet de N’Djamena entreprennent de véritables changements stratégiques afin de s’attaquer aux causes profondes des conflits, et ne se limitent pas seulement à des “ajustements” militaires, à l’instar du renfort de troupes en 2020 puis de sa réduction annoncée pour 2021. »
Victor Ouedraogo: « Les gouvernements réfléchiront-ils à comment faire taire la Voix des armes »
La recrudescence des violences en 2020 et l’augmentation des victimes civiles ont révélé que la priorité donnée à une approche militarisée pour combattre l’extrémisme ne convenait pas, et tout le monde semble en convenir. Alors, qu’est-ce qui retient les gouvernements de procéder à de vrais changements tant dans l’approche, la stratégie et l’orientation des ressources ? Les gouvernements réfléchiront-ils à comment faire taire la Voix des armes et faire entendre plus la Voix du développement et de la protection humaine ? C’est une question à laquelle j’aimerais qu’on réponde lors du sommet de N’Djamena.
La crise au Sahel touche d’abord les populations vivant dans les communautés locales. Toute solution sans une réelle consultation, implication et considération de leurs opinions serait vouée à l’échec. J’espère vraiment que les chefs d’État reconnaîtront enfin l’importance de consulter davantage les populations touchées, et pas seulement les gouvernements régionaux, afin de s’attaquer aux causes sous-jacentes des conflits, de veiller à ce que justice soit faite et de rétablir la confiance envers les forces de sécurité et l’État. Sans confiance, il n’y aura pas de stabilité à long terme, mais seulement une stabilisation temporaire par la force militaire. On ne viendra au bout de la crise au Sahel qu’en instaurant une véritable confiance entre tous les acteurs et à tous les niveaux. Cela passe nécessairement par un dialogue inclusif et sincère. »
Source : la Coalition citoyenne pour le sahel
Le titre, le surtitre, le chapô ainsi que l’attaque sont de la rédaction.
A propos de la Coalition citoyenne
La Coalition citoyenne pour le Sahel est une alliance informelle de plusieurs dizaines d’organisations de la société civile sahéliennes et ouest africains, soutenues par des ONG internationales, dont l’objectif est de convaincre les gouvernements d’adopter une nouvelle approche au Sahel qui permette de mieux protéger les populations civiles. La Coalition citoyenne a été lancée en juillet 2020, avec la publication des Piliers citoyens, les 4 priorités qui devraient orienter toute réponse à la crise au Sahel. La Coalition publiera le mois prochain son premier rapport d’évaluation de l’impact des interventions au Sahel, à l’aune des Piliers citoyens.
Pour en savoir sur la Coalition citoyenne :
- site internet : (https://www.sahelpeoplescoalition.org)
- vidéo explicative ici (une version téléchargeable de la vidéo est disponible ici)
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