La nécessité de la connaissance des textes juridiques usuels par le plus grand nombre des Maliens est une évidence au Mali.
« Nul n’est censé ignorer la loi », d’après le célèbre adage. Abraham Lincoln a défini l’idéal démocratique comme étant « le gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple ». Ainsi, la démocratie est le régime dans lequel le peuple est souverain. Il obéit à ses propres lois. Et c’est dans cela qu’il trouve sa liberté, disait Rousseau : obéir à ses propres lois, c’est être libre.
Dans un pays comme le Mali, qui affiche un taux d’analphabétisme de 66%, pour mettre en pratique la démocratie dans laquelle le citoyen se reconnait et comprend les lois, il est évidemment nécessaire de les rendre accessibles à tous. Cette vulgarisation, par la traduction sinon l’explication des textes juridiques en vigueur, est importante pour que les citoyens puissent se sentir informés et concernés. C’est d’ailleurs un droit, si ce n’est un devoir pour tout citoyen, de connaitre les lois de son pays. Et la vulgarisation des textes juridiques au sein des populations a pour avantage de les protéger d’éventuels abus des autorités.
Parcours du combattant
La nécessité de la connaissance des textes juridiques usuels par le plus grand nombre des Maliens est une évidence de nos jours. Les Maliens subissent les effets de tant de lois dans le pays, sans pour autant les connaître et savoir comment agir lorsque ce sont les autorités elles-mêmes qui les violent. L’ignorance des lois revêt de grandes conséquences, au nombre desquelles la flagrance de la corruption et les abus de pouvoir.
De certains agents de police chargés de réguler la circulation aux agents de l’administration, chacun essaie, à sa manière, de tirer bénéfice de l’ignorance des lois des citoyens. Cela fait que les infractions en circulation, aussi graves soient-elles, sont souvent réglées dans un coin au bord du goudron ou dans les poignées de main avec échange d’argent.
Cela fait également que l’obtention d’un document administratif de base (carte d’identité nationale, certificat de résidence ou fiche individuelle, etc.) est devenue un parcours du combattant où, souvent, il faut avoir le bras long pour avoir satisfaction. Par ignorance, tout devient payant : un pot de vin pour faciliter ou accélérer la procédure. Pour obtenir des documents administratifs gratuits et instantanés, il faut payer et patienter pendant des heures. Il en est de même avec certains agents de police dans la circulation routière qui préfèrent « arranger à côté » plutôt que d’inciter le fauteur à aller payer ses obligations au lieu qu’il faut.
Faire connaître avant de punir
En démocratie, si nul n’est censé ignorer la loi, nul ne doit être privé également de son droit à connaître la loi. Les citoyens, dans leur grande majorité, ne parlent et ne comprennent certes pas le français, mais nos autorités peuvent déployer des efforts pour traduire nos textes juridiques dans les langues nationales, ne serait-ce que les plus usuels.
De nos jours, tous les moyens sont disponibles pour rendre possible cela. Par ailleurs, les faire traduire ne suffirait pas. Car, nous l’avons vu avec l’Accord pour la paix et la réconciliation (APR), issu du processus d’Alger, que même traduit, encore faudrait-il savoir le lire dans sa propre langue. Il serait donc aussi mieux, en plus de les traduire, d’organiser une à deux fois par mois des causeries–débats avec des juristes, des émissions télé et radio afin de pouvoir éclairer les citoyens.
Faire connaître d’abord, punir ensuite. Quand il arrive à un citoyen de commettre une faute pour la première fois, avant de le punir il serait mieux de le lui faire comprendre en lui expliquant son forfait et la loi qui réprime. Car, pour éviter une faute, faudrait-il d’abord savoir qu’elle en est une.
Source : Benbere