L’usage des langues nationales pourrait permettre à une grande partie des populations d’avoir voix au chapitre lors des foras au Mali.
La grande majorité des Maliens ne sait ni lire, ni écrire dans la langue de travail du pays qu’est le français. Pourtant, en démocratie, ce sont les citoyens « qui font le pouvoir ». Autrement dit, ils sont ou sont censés être au centre dans les prises de décisions. Or, les langues nationales dans lesquelles se retrouvent une grande partie de la population peinent à s’imposer dans les grands foras au Mali.
Casse-tête de la langue de communication
Preuve de la nécessité de promouvoir l’utilisation des langues nationales lors des grandes rencontres nationales dans le pays : la commune VI du district de Bamako accueille le plus grand nombre de déplacés internes dans la capitale. Lors des Assises nationales de la refondation (ANR), ces personnes déplacées ne comprenant ni la langue officielle qu’est le français, ni la plus utilisée qu’est le bamanakan ont eu du mal à se faire entendre. Une dispute a d’ailleurs éclaté dès le début des discussions sur le choix de la langue dans laquelle les échanges pourraient se tenir.
On pourrait trouver plus facile solution à ce genre de situations en trouvant un interprète ou miser sur des moyens technologiques. Même si, on le sait, aucune traduction ne peut être fidèle. Mais cela facilitera sans doute la compréhension.
Les occasions comme les foras sont pourtant des moments uniques pour les citoyens de se faire entendre. Mais encore faudrait-il que l’on se comprenne. « Dans la vie des nations, il y a des moments qui sont déterminants. Et les assises en sont une opportunité pour le Mali », annonçait d’entrée Adama Traoré, le point focal commune VI lors des assises nationales au niveau communal. Et pour qui avait fait un tour dans les salles lors des travaux, un constat s’imposait : une véritable volonté des populations d’avoir voix au chapitre.
« Ne pas laisser mourir les langues locales »
Il serait donc mieux que les autorités y pensent sérieusement: pour les grandes rencontres nationales, les adresses à la nation, les interviews de grande importance, elles doivent avoir à l’esprit cette écrasante majorité. Après tout, on n’a pas besoin d’instruction pour savoir dans quelle société l’on veut vivre.
Il ne s’agit pas non plus d’encourager l’analphabétisme. Mais soyons d’accord pour donner raison à Amadou Hampâté Bâ : « La colonisation eut aussi des aspects positifs qui ne nous étaient peut-être pas destinés à l’origine mais dont nous avons hérité et qu’’il nous appartient d’utiliser au mieux. Parmi eux, je citerai surtout l’héritage de la langue du colonisateur en tant qu’instrument précieux de communication entre ethnies qui ne parlaient pas la même langue et moyen d’ouverture sur le monde extérieur- à condition de ne pas laisser mourir les langues locales, qui sont le véhicule de notre culture et de notre identité. »
Source : Benbere