Long de 580 km, la route Sévaré-Gao est dans un état très dégradé. Quitter Sévaré pour Gao prend aujourd’hui entre 48 h et 72h. Le goudron est impraticable. Les chauffeurs ont créé leur propre chemin pour relier les deux grandes villes vu l’état de dégradation. Ces chemins préfabriqués sont minés par des engins explosifs improvisés que les djihadistes mettent contre l’armée malienne.
Mais dans la plupart des cas, ce sont les bus de transport des passagers civils qui montent sur ces engins explosifs improvisés (EEI). En plus de l’état de dégradation, il sévit une insécurité endémique. La zone est un no man’s land, malgré la présence de 3 grandes forces militaires.
De Sévaré jusqu’aux portes de la cité des Askia (Gao), c’est l’armée malienne qui contrôle cette portion. Les milices dogons (dozon) ont créé leur propre poste de contrôle à Pétaka, dans la toute nouvelle région de Douentza où ils demandent à tous les hommes à bord des bus qui font le trajet de payer 500 F comme prix de thé.
Les milices peulhs règnent dans la zone de Hombori toujours dans la région de Douentza. Elles guettent les bus et les fouillent de fond en comble également les smartphones à la recherche des photos et vidéos malsaines contraires à la charia (loi coranique). Ensuite ces miliciens font asseoir les hommes se trouvant dans les bus et leur demandent de reciter des versées du saint Coran pour tester leur foi. Mais dès qu’ils entendent le moindre bruit des hélicoptères de l’armée malienne, ils prennent la fuite.
Dans la zone de Gossi, par endroit, des bandits s’attaquent aux passagers en les dépouillant de tous leurs biens. La ville est complètement sous contrôle de l’armée malienne qui patrouille jusque dans la zone de N’Tahaka. A 30km de Gao, nous avons les groupes armés lourdement armés. Ils ont créé leur poste de péage avec l’effigie Cadre stratégique permanent de l’Azawad (CSP).
Ils exigent à tous les bus qui rentrent et sortent de Gao de payer 10 000 F CFA. Les passagers cotisent pour payer. Tout au long de ce voyage, il y a un stress permanent qui pèse sur l’ensemble des passagers. En dehors du stress, il y a aussi la peur dans le ventre, mais aussi l’incertitude d’arriver à destination car le bus peut-être attaqué à tout moment ou monter sur un engin explosif improvisé.
38 ans après sa construction l’axe Sévaré-Gao n’a jamais connu une réhabilitation. Tous les gouvernements qui se sont succédé avaient promis de faire cet axe une priorité des priorités mais hélas. En raison des manques de vision politique et l’insécurité endémique, le projet dort toujours dans les placards.
Ousmane Mahamane
(De retour de Gao)