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Session spéciale de la Cour d’assises de Bamako : La perpétuité pour le berger

Le chemin du jeune berger a croisé celui de la patrouille de la force Barkhane en pleine brousse. Il est par la suite interpellé et jugé puis renvoyé en prison

 

Les travaux de la session spéciale de la Cour d’assises se poursuivent à la Cour d’appel de Bamako. En début de semaine dernière, les juges ont fait comparaître O.O.D, un jeune berger suspecté d’appartenance à un groupe de combat en relation avec une entreprise terroriste. à cette infraction, s’ajoutent celles relatives à des actes de terrorisme et détention illégale d’armes de guerre en relation avec une entreprise terroriste.

Ces faits sont prévus et punis par les dispositions des articles 6, 6,2 6.4 et 13 de la loi N°08-025 du 23 juillet 2008 portant répression du terrorisme en République du Mali. L’affaire de ce jeune berger remonte à mai 2020 et se serait déroulée dans la localité de Bakal (Cercle d’Ansongo).
Les actes terroristes avaient atteint un tel niveau qu’à certaines heures, il était formellement interdit de circuler à moto dans certaines localités du pays, en proie à une insécurité incontrôlable. Cette situation permettait aux forces armées maliennes et leurs partenaires de mener des patrouilles dans les localités infectées dans le but de contrer les agissements des groupes terroristes qui écumaient les dites localités.

C’est ainsi qu’au cours d’une de ces opérations de ratissage de routine, la force Barkhane a aperçu le jeune berger concerné. Celui-ci conduisait une moto qu’il roulait à vive allure en pleine brousse. Une fois qu’ils l’ont aperçu, les éléments de Barkhane lui ont intimé l’ordre de s’arrêter. Mais leurs injonctions étaient tombées dans les oreilles d’un sourd. Au lieu de s’arrêter, le jeune homme a, au contraire, accéléré comme pour échapper aux contrôles des militaires. L’attitude du fugitif obligea les soldats de Barkhane à procéder à des tirs de sommation. Une fois qu’il a entendu les bruits des fusils, le jeune homme a cédé à la panique. Il a ainsi perdu l’équilibre sur son engin avant de se retrouver à terre. Les soldas n’ont pas perdu de temps pour l’interpeller dans le feu de l’action.

Les soupçons des éléments de Barkhane se confirmeront lorsqu’ils ont mis la main sur le fugitif. Après fouille, il a été trouvé en possession d’un fusil AK 47 et cinq chargeurs. Il était lui-même habillé en tenue militaire et portait des chaussures de combat. Suivant la logique de la lutte anti terroriste, les soldats de Barkhane ont mis leur prisonnier à la disposition de la Brigade d’investigation spécialisée pour les nécessités de l’enquête.

À l’issue de celle-ci, le suspect a été présenté au parquet du pôle judiciaire spécialisé. Peu de temps après, ce parquet a requis l’ouverture d’une information judicaire. D’où l’inculpation du susnommé pour l’infraction citée plus haut.

Au cours de l’information judiciaire, le garçon a reconnu les faits de détention d’armes de guerre et de munitions. Il ne pouvait en être autrement, car il avait été pris avec les armes et leurs munitions. Il est resté fidèle à cette attitude aussi bien à l’enquête préliminaire que devant le magistrat instructeur. Cependant, l’inculpé a nié en bloc toute appartenance à un quelconque groupe armé terroriste.

Habillé d’un boubou de couleur violet, l’inculpé qui était assisté d’un interprète s’est présenté à la barre. Cependant, il n’a pas varié dans sa stratégie de dénégation quant à son appartenance à un groupe de combat. Même pour ce qui concerne l’accusation portant sur les armes et munitions trouvées en sa possession, il a tenté de se défausser. Pour cela, il a donné une version peu convaincante pour les jurés de la Cour.

Selon lui, ces armes et munitions appartenaient à une de ses vieilles connaissances pour qui, il devait les garder. « Un ami de longue date me les a confiées après avoir eu une panne de moto en pleine brousse », s’est défendu l’inculpé. « Comment un ami lointain peut te confier ses armes et munitions de guerre comme ça ? », a interrogé le président de la Cour. Là aussi, l’accusé a nommé l’ami en question qui serait un des ses amis d’enfance. Selon lui, celui-ci avait passé chez lui pour lui confier le matériel de guerre.

Ces propos ont permis aux juges de déceler toute l’incohérence dont l’inculpé faisait preuve dans ses déclarations. Il avait dit en effet qu’il avait reçu les armes et leurs munitions des mains d’un ami dont l’engin était tombé en panne en pleine brousse et d’ajouter qu’il était en partance pour jeter le matériel de guerre en brousse lorsque son chemin a croisé celui des forces de Barkhane.
Dans la pratique, les juges de la Cour voulaient comprendre et connaître réellement les circonstances dans lesquelles tout cet arsenal lui avait été confié. Bizarrement, l’accusé très incohérent dans ses dires est resté confus sans pouvoir clarifier la lanterne de la Cour.

Ce qui obligea le président à le confronter au rapport de la force Barkhane. Dans un passage de ce rapport, il ressort que le suspect était habillé en tenue militaire et détenait divers objets. Mais à la seule évocation de ce passage du rapport, l’inculpé a balayé d’un revers de la main le contenu de ce rapport. « Je ne portais pas de tenue militaire. Barkhane a menti », a-t-il dit sèchement.
Le magistrat debout a chargé l’inculpé pour lui boucher toute issue après le rappel des faits. De l’avis du parquet général, le jeune homme a reconnu les faits à toutes les procédures avant de nier son appartenance à un groupe terroriste.

« Il savait que son ami était un berger et non un militaire », a-t-il déclaré. Pour lui, il est en train de rejeter les faits sur son soi-disant ami qui lui aurait confié des matériels de guerre. Partant de là, le défenseur des citoyens a requis de le maintenir dans les liens de l’accusation. Quant à l’avocat de la défense, il a pour sa part, centré sa plaidoirie sur l’absence de preuves suffisantes pour confronter son client au fait d’acte de terrorisme dont il est accusé. C’est pourquoi, le conseil a finalement plaidé non coupable, avant de solliciter la clémence de la Cour. Au même moment, le ministère public a requis la perpétuité, car la Cour venait de reconnaître l’inculpé coupable des faits à lui reprochés.

Le jeune berger a écopé de 10 ans de réclusion criminelle et au paiement de la somme de 2 millions de Fcfa pour amende. Lorsqu’elle s’est prononcée sur l’intérêt civil, la Cour a condamné l’accusé au paiement de la somme de 10 millions de Fcfa à l’état du Mali. Une somme que le contentieux de l’état avait auparavant solli-
citée.

Zoumana Tiédié DOUMBIA

Source : L’ESSOR

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