Les travaux de la cour d’assises ont débuté, lundi, dans la « salle Boubacar Sidibé» de la Cour d’appel de Bamako. La cérémonie était présidée par le procureur général, Idrissa Arizo Maïga. Les représentants de l‘ensemble de la chaîne pénale et de nombreux membres de la famille judiciaire y ont pris part.
Comme de coutume, les «magistrats amateurs» que sont les assesseurs doivent siéger aux côtés des professionnels pour vider l’ensemble des dossiers en état d’être jugés durant les quatre semaines que doivent durer les travaux de la session. Pour la présente, ils sont six assesseurs, dont deux femmes, à avoir «juré et promis devant Dieu et les hommes d’examiner scrupuleusement les dossiers qui leur seront soumis… » . Mais surtout de « garder les secrets des délibérations, même après la session», comme cela leur avait été demandé par le président de la Cour par intérim, Abdrahamane Maïga qui a mis en avant les exigences des textes en la matière. «Je le jure», ont successivement déclaré les six assesseurs à haute voix, face au présidium, en levant la main droite. Ils ont ensuite été renvoyés dans l’accomplissement de la mission qui venait de leur être confiée par l’institution judiciaire.
Au cours de la session, les jurés auront à examiner 82 dossiers inscrits au rôle. Ceux-ci concernent 145 accusés, dont 85 détenus provisoires effectifs, en dehors des «pris de corps» éventuels qui s’y ajoutent. Cependant, le procureur général, Idrissa Arizo Maïga, a regretté une forte prédominance des crimes de sang. Ils sont 23 accusés à se partager la responsabilité de ces infractions. Soit 11 cas d’assassinat, 3 cas de meurtre, autant d’infanticides et 6 cas de coups mortels. Vu ce chiffre, le parquetier a fait part de ses inquiétudes par le simple fait que nombre de nos concitoyens ont choisi la voie de la violence pour s’exprimer.
Au rôle de la session, figurent également les infractions contre les biens, notamment le vol qualifié. C’est ce qui conforte d’ailleurs cette expression de la violence, car, a détaillé le procureur Maïga, les vols qualifiés sont bien souvent accompagnés d’atteinte à l’intégrité physique des personnes, souvent à la vie. Difficile d’imaginer une session de cour d’assises sans les infractions contre les mœurs. Pour cette session, elles concernent huit (8) cas de pédophilie, cinq (5) de viol et un 1 cas d’attentat à la pudeur. Parlant de cette dernière infraction, le procureur général s’est ému de ce que «la fréquence et la banalisation qui l’accompagnent doivent nous interpeler tous». «Ne dit-on pas que les infractions contre les mœurs font partie des formes les plus graves d’agression du fait qu’elles portent atteinte à l’honneur et à la dignité de la personne, ainsi qu’à sa souveraineté sur son corps», a-t-il rappelé. S’y ajoutent les infractions relatives au faux et usage de faux, (04), au trafic international de stupéfiants, d’incendie volontaire et de traite de personne.
Par ailleurs, dans le chapitre des infractions liées au terrorisme, le rôle comporte huit (8) affaires. «Ce qui signifie qu’au niveau du pôle spécialisé, les choses bougent », a estimé Idrissa Arizo Maïga qui a tenu à préciser que «si les conditions sont réunies» et que «si tout se passe comme prévu, la prochaine session, ou la session spéciale, sera principalement consacrée à des affaires de terrorisme».
Car, a expliqué M. Maïga, «les attentes sont pressantes sur ce sujet». Paradoxalement, a-t-il poursuivi, les affaires économiques et financières pourtant attendues, se signalent par leur rareté à la précédente session comme à la présente. Le magistrat croit que c’est moins par manque de dossiers à traiter que par manque de diligence dans la conduite des affaires à ce niveau. Le procureur général en a, en conséquence, appelé à beaucoup plus de célérité dans le traitement des dossiers avant de décrier certaines tares de la procédure pénale se rapportant surtout à la lenteur constatée. A ce propos, il pense que le temps doit être l’allié indispensable de tous ceux qui ont souci d’avancer, de progresser…».
Si le président par intérim de la Cour a regretté que la nature même de certaines infractions mette à nu la dégradation de mœurs dans notre société et le délitement de l’Etat, le bâtonnier Me Alhassane Sangaré a, lui, insisté sur la nécessité d’une justice pour les plus faibles. Il a conclu son intervention en assurant que les avocats feront tout pour garantir une bonne défense aux mis en cause, en dépit des relatives difficultés rencontrées dans la procédure.
Mohamed TRAORÉ
Source: Essor