L’oisiveté des soldats favorise de nombreuses dérives sexuelles.
«Tout belliqueux est une cible». Ce slogan bien connu des populations de Mora, dans le Mayo-Sava, est celui du 21e Régiment d’infanterie de l’Armée nationale tchadienne, stationnée ici depuis quelques mois. Ils sont 2000 soldats à se ronger le frein, menant de temps à autres des incursions à Banki au Nigeria, pour traquer les combattants de Boko Haram. Peu occupés sur le terrain militaire, les militaires tchadiens s’attèlent à autres choses dans les quartiers de Mora, leur ville garnison. «Ils nous arrachent les femmes, parce qu’ils ne savent pas quoi faire d’autre de leur argent», se plaint un habitant de Mora.
«Les avortements clandestins se sont multipliés dans les quartiers, et ça ne peut que nous inquiéter au plus haut point», renchérit un commerçant du coin. «En plus des avortements
qui nous inquiètent, nous avons appris qu’il y a aussi des maladies sexuellement transmissibles. Si rien n’est fait, vous apprendrez très vite que Mora bat les records nationaux de gonococcie ou de Sida !», s’alarme Bulama, un maçon. Avant d’ajouter : «On ne chasse pas nos frères tchadiens, on craint juste pour la santé de nos frères et soeurs».
Le sujet, apprend-t-on, inquiète même dans la cour du sultan de Mora. «Nous avons appris qu’ils sont en panne de préservatifs», confie un membre de la cour. D’après nos enquêtes, les médecins militaires, tant camerounais que tchadiens, ont expressément fait une demande de préservatifs à leur hiérarchie : «10.000 au moins», confie même un haut gradé en charge de la santé militaire.
«Nous allons faire du lobbying auprès des organismes d’aide et autres ONG, dans l’espoir qu’ils répondront très vite, car c’est urgent. La distribution des préservatifs aux militaires doit être une de nos priorités», poursuit le militaire.