Dans son dernier rapport rendu public le 20 mars 2020, le secrétaire général de l’ONU a noté des progrès dans la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali. Une évolution qui contraste pourtant avec la réalité sur le terrain marquée par une détérioration de la situation sécuritaire et une augmentation des attaques terroristes contre les FAMa, les forces étrangères et les populations civiles, notamment au centre et au nord du pays.
Malgré les progrès réalisés dans la mise en œuvre de l’accord de paix, la situation au Mali et dans la région du Sahel reste très préoccupante et marquée par une détérioration de la sécurité et une augmentation des attaques dans la région. Les groupes terroristes alliés à Al-Qaida et à l’État islamique ont gagné du terrain et cherchent tous à exercer leur influence. Les attaques contre les forces nationales et internationales ont persisté et les forces de défense et de sécurité nationales ont subi les plus grosses pertes. Plus de la moitié des attaques commises au cours de la période de référence ont eu lieu dans le centre du Mali et près d’un tiers des victimes étaient des civils.
Malgré la situation sécuritaire désastreuse, le rapport du Secrétaire général de l’ONU indique que le processus de paix a nettement progressé sur la voie de la pleine application de l’Accord.
Dans son jugement, l’ONU se base sur le redéploiement de l’unité reconstituée dans le nord du pays. Une évolution marquée ce13 février 2020 par l’arrivée à Kidal de la première unité reconstituée des forces armées nationales. Un déploiement qui s’est déroulé sans incident majeur.
Dans le même cadre, une compagnie de 118 soldats est arrivée à Tombouctou le 16 février, suivie d’une seconde de 123 militaires le 17 février.
Sur les 289 membres de l’unité reconstituée des forces armées nationales arrivés à Gao le 21 février, 85 ont été déployés à Ménaka le 11 mars.
Aussi, la reprise des travaux du Comité de suivi de l’Accord 27 février 2020, une première depuis août 2019, est l’un des motifs de satisfaction de l’organisation mondiale.
Par ailleurs, l’ONU trouve que la conclusion du dialogue national inclusif a abouti à une dynamique plus positive et permis aux parties de recentrer leur attention sur la mise en œuvre de l’accord de paix.
Sans se faire d’illusion, l’ONU reconnait : « il faudra toutefois du temps pour que ces réalisations se traduisent par des améliorations tangibles de la situation sur le terrain ».
Le moins qu’on puisse dire, c’est que les observateurs du processus et les populations civiles sont loin d’être rassurés par ces progrès face à la situation sécuritaire qui se dégrade tous les jours davantage.
En tout cas, l’Observateur indépendant de l’application de l’Accord a constaté, dans son rapport annuel de fin d’année 2019 que l’application de l’Accord « était à son point le plus bas depuis le début du mandat de l’Observateur indépendant ».
Dans ce contexte le progrès tant brandi par l’ONU et les acteurs maliens du processus de paix n’est qu’un mirage qui apporte peu de profit aux populations. Toutefois, ce mirage semble profiter à quelques individus qui en profitent pour mener paisiblement leur business sur le dos des Maliens. La question que le commun des Maliens se pose aujourd’hui est : à quand la vraie paix, celle qui permet aux populations de vivre dans la quiétude, de travailler et de tirer le fruit de leur labeur ? Est-elle au bout de la mise en œuvre intégrale de l’accord pour la paix ? Le doute est déjà permis au regard de la prolifération des groupes armés qui continuent de dicter leur loi aux populations ; de la progression des groupes terroristes sur le terrain en dépit des efforts du gouvernement et de la communauté internationale. Faut-il changer de fusil d’épaule ? Sans conseiller l’abandon de l’accord, nous pensons que la résolution de la crise de notre pays va au-delà de ce document et exige plus de fermeté de la part de l’ONU et des partenaires du Mali et plus de sérieux pour nos siens.
En terme clair, pour relever les défis complexes auxquels le Mali fait face, il faudra plus d’efforts de la part des parties, ainsi qu’une volonté politique, des ressources et un soutien plus accrus de la communauté internationale.
Par Abdoulaye OUATTARA
INFO-MATIN