Après la création par le président de la Transition, colonel Assimi Goïta, le 10 juin dernier, d’une commission pour la rédaction d’une nouvelle Constitution, c’est demain vendredi 17 juin que se tient au Conseil National de la Transition (CNT) la séance plénière consacrée à l’examen du projet de loi gouvernemental sur le processus électoral déposé auprès de cet organe législatif en avril. Ces deux gestes successifs en moins d’une semaine sont autant de gages pour convaincre la CEDEAO de la volonté des autorités en place d’accélérer la marche vers la tenue des élections et d’aboutir, de concert avec elle, à la mise au point du « chronogramme détaillé » exigé pour « la levée progressive » des sanctions, à la faveur d’un énième sommet prévu le 3 juillet à Accra (Ghana).
Ils devraient donc être suivis, dans les semaines à venir, d’autres initiatives significatives mais une déception n’est pas à exclure. Les décisions au sein de l’Organisation sous-régionale ouest-africaine sont prises par consensus, comme le rappelait, récemment, son président de la Commission sortant, l’ivoirien Jean-Claude Kassi Brou. Or dans un entretien publié le 13 juin par le quotidien dakarois Le Soleil (proche du gouvernement sénégalais) le président du Niger, Mohamed Bazoum, déclare clairement qu’ »il est favorable au maintien des sanctions contre le Mali« . Confirmant ainsi la position hostile que certains médias lui avaient prêtée lors du sommet extraordinaire du 4 juin, également tenu dans la capitale ghanéenne, qui n’a pu se prononcer sur la levée desdites sanctions » faute de consensus « .
Il est vrai que depuis son avènement à la présidence nigérienne, en avril 2021, cet universitaire, qui a frayé son chemin en politique en transitant par le syndicalisme, n’a pas caché » le danger » que le Mali représente à ses yeux pour son pays du fait de l’emprise terroriste sur ses régions septentrionales limitrophes de ce dernier. Il déclarait à ce sujet dès sa prise de fonction : « Le combat contre l’EIGS sera très difficile aussi longtemps que l’Etat malien n’aura pas exercé la plénitude de sa souveraineté sur ces régions. La situation actuelle du Mali a un impact direct sur la sécurité intérieure de notre pays. C’est pourquoi notre agenda diplomatique sera centré sur le Mali…« . Après » le coup d’Etat dans le coup d’Etat » du 21 mai 2021, Bazoum remet ça : « Il ne faut pas que les militaires prennent le pouvoir parce qu’ils ont des déboires sur le front, que les colonels deviennent des ministres ou des chefs d’Etat. Qui va faire la guerre à leur place ?« . Lorsque le partenariat militaire entre le Mali et la France s’est dégradé au point d’atteindre le point de non-retour, il n’a pas hésité à rappeler que » c’est la France qui a sauvé le Mali » et que « son départ va créer un vide qui sera rempli par les terroristes « . Au décès sous les liens de la détention de l’ex-premier ministre Soumeylou Boubèye Maïga, en mars passé, revoici Mohamed Bazoum: » Sa mort en prison rappelle celle du président Modibo Keita en 1977. Je pensais que de tels assassinats relevaient d’une autre ère « . Après le retrait du Mali du G5-Sahel il proclame que ce regroupement politico-militaire « est mort » et que » Bamako est dans une fuite en avant qui l’isole en Afrique et nous prive d’une stratégie concertée et coordonnée pour lutter contre le terrorisme« .
Selon toutes les apparences la double médiation conduite par le président togolais Faure Gnassingbe et l’Organisation de la Coopération Islamique (OCI) n’a pas eu de prise sur l’impénitent pourfendeur de la Transition malienne à moins qu’elle ait commis l’erreur de l’avoir ignoré. Ce qui a pu le conforter dans son opposition à la levée des sanctions. Il en résulte que pour réparer les dégâts et prévenir l’irréparable Bamako doit, toutes affaires cessantes et mettant au rancard l’orgueil pour ne considérer que le seul intérêt supérieur du Mali, opérer un rapprochement hardi avec Niamey. Cela pour aplanir les divergences autant que faire se peut et rechercher les voies d’ »une coexistence pacifique et mutuellement avantageuse » pour utiliser une vieille formule diplomatique.
Saouti HAIDARA
Source: l’Indépendant