En réinventant le droit coutumier à des fins populistes et politiques, le Ministre des Domaines de l’Etat et des Affaires Foncières avait-il conscience de la poudrière qu’il était entrain de disséminer à l’intérieur du pays et dans les environs de Bamako ? Sous le prétexte de la spéculation foncière, sacré Bathily profite le plus souvent des calvaires du monde rural pour s’arroger le droit de monter les populations contre les autorités communales et les honnêtes propriétaires fonciers à travers un amalgame qu’il fait volontiers. Cette tentative de récupération politique du foncier est en passe de causer des affrontements graves dans notre pays. Le cas d’un village de Moribabougou est un avertissement sans frais pour les autorités.
Avec comme seuls arguments les propos relatifs au droit coutumier du Ministre des Domaines les invitants à s’accaparer les terres des honnêtes propriétaires et à s’opposer aux Maires, un village de la commune rurale de Moribabougou ( Fombabougou) a décidé de s’attaquer aux parcelles qu’il estime être dans l’emprise de son territoire. Pour eux, les propos de Mohamed Ali Bathily sont des paroles d’évangile qui s’imposent à tous.
De la part d’un ancien ministre de la justice fut-il éphémère pour raison d’incompétence, ses agissements suscitent des interrogations. Si les initiateurs de cette démarche hasardeuse et suicidaire s’étaient inspirés des déboires de leur mentor dans l’annulation des titres fonciers qu’il avait abusivement retiré à leur propriétaire et la démolition des maisons de Souleymanebougou, il est clair qu’ils allaient doublement réfléchir avant d’agir ainsi. Sur quoi le ministre populiste se base pour arranguer la foule ? Que dit le fameux droit coutumier dont il tente de réinventer dans notre pays ?
Pour justifier et assurer son maintien au gouvernement, le ministre Bathily ne manque pas de stratégie. A défaut d’une association assez représentative aux yeux du RPM et du président de la République, celui là même qui avait abandonné la représentation diplomatique de notre pays pour une organisation internationale à cause des sous, a décidé de faire du problème foncier à travers le droit coutumier son fonds de commerce.
QU’EST-CE QUE LE DROIT COUTUMIER ?
Les Droits fonciers coutumiers désignent toujours les droits fonciers que les populations ont sur les terres qu’elles habitent, cultivent ou exploitent d’une manière quelconque, conformément à la culture et aux usages locaux. Ces droits sont reconnus par la Loi (code domanial et foncier) sous réserve d’une enquête publique et contradictoire donnant lieu à la délivrance d’un titre opposable aux tiers qui constate l’existence et l’étendue de ces droits.
Contrairement aux propos du populiste adepte du sensationnel, le droit coutumier est très clair. Il n’est reconnu que sur les terres habitées, cultivées ou exploitées d’une manière quelconque. Dans ces cas, Bathily sait mieux que quiconque qu’il est impossible même pour le plus fou des spéculateurs de toucher à une terre cultivée, habitée ou utilisée d’une manière quelconque sans le quitus de l’exploitant. Le plus souvent c’est les villageois qui vendent leur terre sous le poids de la misère avant de le regretter dès que celles-ci prend de la valeur avec le temps.
Au delà des terres qui sont dans les cas de figure mentionné dans le droit coutumier, sacré Bathily n’explique pas la situation du restant des terres relevant de l’emprise d’un village. Quelle est la marge de manœuvre des maires, des sous préfets, des préfets, des ministres ou du conseil des ministres dans le domaine foncier ?
Volontiers, le spéculateur en chef maintien le flou total à ce sujet. A l’entendre, le maire et le préfet n’ont aucune marge de manœuvre en matière foncière, seuls les autochtones sont concernés. Mensonge d’Etat. L’article 43 du Code Domanial et Foncier du Mali stipule que : « Les droits coutumiers exercés collectivement ou individuellement sur les terres non Immatriculées sont confirmés. Nul individu, nulle collectivité, ne peut être contraint de céder ses droits si ce n’est pour cause d’utilité publique et moyennant une juste et préalable indemnisation ». Dans quel registre sacré Bathily place les cas de recasement des populations effectués par les maires ?
Est-ce des cas d’utilité publique ou privée ? Les populations ont-elles le droit de refuser les cas de recasement pour raison de droit coutumier ? Un agriculteur qui exploite les terres dans une commune dont-il n’est pas originaire a-t-il le droit de le céder à des tierces personnes sans le consentement des autochtones avec ou sans titre de propriété ?
LES PREMICES D’UN AFFRONTEMENT GENERALISE
Les conséquences fâcheuses des diatribes populistes d’un homme qui est rentré par effraction au sein du gouvernement, ont déjà commencé à se faire sentir. La commune de Moribabougou commence à faire les frais. Dans un village de Fombabougou, un groupuscule a décidé de s’en prendre à des milliers de maisons sous prétexte que celles-ci sont situées dans les limites géographique de leur village.
Le hic est que la plus part des parcelles dans la zone ont été attribuées dans les années 1985 sous Moussa Traoré en raison d’un demi hectare par personne. Aujourd’hui, la plus part de ses terres sont des titres fonciers. Pour le reste, c’est des zones de recasement ou des champs dont les propriétaires ont morcelé légalement.
En remettant en cause ces cas de figure, le Ministre des Domaines en rajoute à un secteur déjà confligène. La première victime a été un propriétaire paisible qui n’a pas voulu obtempérer face aux injonctions d’accaparement du groupe. Il en a été copieusement bastonné. Abandonné pour mort, il a été transporté d’urgence à l’hôpital. Une fois tiré d’affaire, l’homme est allé se plaindre à la gendarmerie de Sangarébougou. Sans autre forme de transition, le CB a envoyé un signal fort aux rebelles à la solde de Bathily. Un pickup rempli de gendarme a été dépêché sur les lieux pour interpeller les auteurs. Ces derniers ayant pris la fuite, les investigations seraient en cours.
Du côté des occupants de la zone convoitée, l’on se prépare à affronter les illuminés endoctrinés par le ministre des domaines. C’est dire que si les mesures ne sont pas prises, Bathily risque de provoquer une guerre civile au Mali. S’il ya des choses à ne pas politiser, c’est bien le foncier et la religion. Il est regrettable que certains ministres en fassent leur fonds de commerce.
A suivre …
Mamadou Coulibaly