L’ancien Premier ministre et ex-président du parlement, Ibrahim Boubacar Kéita dit IBK ou Ladji Bourama, dispose d’une « large avance » sur son principal rival, Soumaïla Cissé. Si ce mouvement se confirme, il n’y aura pas de second tour, a déclaré mardi le ministre malien de l’Administration territoriale, le colonel Moussa Sinko Coulibaly.
« A part ses opposants, notamment ses concurrents rassemblés au sein du Front de sauvegarde de la Démocratie et de la République (FDR), peu de gens seront surpris qu’IBK remporte le scrutin présidentiel dès le premier tour. D’ailleurs, le « Takokelen » (victoire en un tour) était l’objectif de ses partisans », selon un officier du gouvernement.
Sans doute le plus charismatique des candidats en lice pour le scrutin présidentiel, IBK est très populaire en dehors de sa famille politique, c’est-à-dire son parti le RPM (Rassemblement pour le Mali) et « Alliance IBK 2012″. Visiblement, il est le grand bénéficiaire de fort taux de participation à ce scruintin (entre 53% et 60%).
« Je n’ai jamais voté de ma vie. Mais, cette année, je vais aller voter. Je vais voter pour Ibrahim Boubacar Kéita parce qu’il a trop souffert de la fraude électorale et je suis convaincue qu’il convoite le pouvoir réellement pour servir le Mali. C’est aussi un homme de poigne, mais qui a un grand coeur, donc sensible aux problèmes des couches démunies », justifie Mme Nana Kéita, une électrice de Kadiolo (480 km au sud de Bamako).
Elle est loin d’être un cas isolé. Comme cette non-voyante ou ce malade qui quitte son lit d’hôpital avec une sonde pour venir voter IBK. Homme de poigne, rigoureux, leader politique qui tient ses promesses… Les raisons de voter massivement pour Ladji Bourama, ne manquent pour son électorat. Et une chose est claire, IBK apparaît, pour la grande majorité de ses compatriote comme « l’homme de la providence », la « solution aux problèmes » des Maliens.
« Il est le plus charismatique des candidats. Il sait se montrer ferme quand il le faut. Et les Maliens sont convaincus qu’il leur faut un homme rigoureux avec un sens élevé du devoir pour redresser leur pays », analyse Issa Traoré, professeur d’une université.
« IBK véhicule des valeurs religieuses et sociales que les Maliens souhaitent retrouver pour éviter que le pays ne revive un autre chaos », explique Lamine Diakité, un jeune leader musulman. Dans un pays où plus de 90% de la population sont musulmans, les consignes de vote des leaders religieux sont généralement très suivies. Et cela a largement profité à Ibrahim Boubacar Kéita. Tout comme le vote des militaires et de leurs familles, une frange très importante de la population malienne.
Sans compter que le candidat du RPM et de « l’Alliance IBK 2012″ est aussi bien côté chez les voisins du Mali et au sein même des grandes chancelleries. « IBK est l’homme de la situation que le Mali traverse en ce moment. Le premier défi de ce pays, c’est de restaurer l’autorité de l’Etat sans laquelle aucun projet de développement ne peut atteindre ses objectifs. Le second défi, c’est la réconciliation nationale. Ensuite, il faudra lutter contre la corruption. Dans ces domaines, IBK est considéré comme le plus crédible des prétendants. Sans compter que les Maliens ne sont jamais satisfaits de la gestion de la crise du nord et reprochent aux précédents dirigeants un certain laxisme. Ils sont donc très nombreux à penser qu’IBK a la meilleure approche de la résolution de cette crise. Il ne manque pas en tout cas d’atouts pour plaire à la communauté internationale pour qui il a le meilleur profil pour diriger le Mali de l’après-crise », analyse en diplomate européen en poste à Bamako.
Au Mali, un pays où le taux d’analphabétisme est assez élevé (de 75% à 80% de la population), le projet de société n’est pas déterminant dans le choix d’un président de la République.
La vision politique de Ladji Bourama est axée sur l’ambition de redonner aux Maliens leur dignité d’antan et la restauration de l’autorité de l’Etat. La souveraineté alimentaire, la revalorisation de l’école et de la fonction enseignante, l’exploitation des richesses du pays au bénéfice de tous, la lutte contre la corruption et l’insécurité sous tous ses aspects, la refondation de l’armée malienne, la culture de l’excellence, la promotion de l’emploi des jeunes, le développement rural… sont, entre autres, les grandes lignes de la politique intérieure du Mali.
Ancien ministre des Affaires étrangères, des Maliens de l’extérieur et de l’Intégration africaine sous Alpha Oumar Konaré, premier président démocratiquement élu du Mali (1992-2002), IBK ne compte pas remettre en cause la politique internationale du Mali.
Toutefois, il tient beaucoup à la souveraineté de son pays. Ce facteur va beaucoup peser dans les relations futures, notamment la négociation des futurs contrats miniers, des partenariats techniques. « Si IBK est élu, les intérêts du Mali vont être ardemment défendus dans toutes les négociations. Quand les intérêts du pays sont en jeu, il fait rarement de concession », témoigne un diplomate malien qui l’a côtoyé alors qu’il était ministre des Affaires étrangères.
Source: Agence de presse Xinhua