Dans son adresse à la Nation au lendemain de sa visite d’amitié et de travail au Mali, le chef de l’État du Burkina Faso a annoncé sa volonté d’entamer des alliances qui seront «vers des options qui garantissent le respect » de l’indépendance de son pays. Va-t-il donc imiter son homologue malien qui, depuis son installation, travaille pour la restauration de la souveraineté et de l’indépendance du Mali ?
Depuis la rectification de la trajectoire de la transition, les autorités maliennes imposent le respect mutuel dans le cadre du partenariat. Elles imposent le respect de la souveraineté et de l’indépendance du Mali. C’est d’ailleurs cette nouvelle posture qui dérange certains partenaires. Et ce changement dans la gouvernance qui est à la base du soutien populaire des Maliens à l’endroit des autorités de la transition. La raison est simple : les populations maliennes, frappées par l’insécurité grandissante et déçues de l’échec de certains partenaires dont la France, ne réclament que la restauration de la souveraineté du Mali et la diversification des partenaires, d’aller surtout vers la Russie.
La volonté des Burkinabè
Au-delà du Mali, Assimi Goïta et son gouvernement sont soutenus partout en Afrique. Nombreux sont d’ailleurs les Burkinabè qui sont fiers du Mali et souhaitent que leur président emboite le pays au colonel Goïta. La preuve, à travers des manifestations, des Burkinabè ont réclamé la rupture avec la France et une coopération avec la Russie comme a fait le Mali. Pour nombre de Burkinabè, le combat de Thomas Sankara, celui de la souveraineté et de l’indépendance du pays des hommes intègres, doit recommencer à cette période.
Ces revendications multiples ont certainement été entendues par les autorités de la transition. Car, dans une interview accordée à la télévision nationale, le Premier ministre Albert Ouédraogo a reconnu l’échec de certains partenaires. « L’aide doit aider à assassiner l’aide. Et si depuis des années cette coopération n’a pas permis d’assassiner l’aide, il faut se poser des questions. Je suis tout à fait d’accord qu’effectivement, aujourd’hui, il faut revoir…», a-t-il indiqué.
Il est allé loin en annonçant leur volonté d’emprunter le chemin du Mali : celui de la diversification des partenaires. « Sur la question des partenariats, nous sommes dans une logique de diversification », avait-il déclaré. Le Burkina est-il prêt à être victime de la campagne de diabolisation comme le Mali ? Question, car la diversification des partenaires dérange ceux qui se croient les maîtres sur terre, la France notamment.
Le Faso sur les traces du Mali
Le président de la transition du Burkina Faso a-t-il entendu les revendications de sa population ? En tout cas, c’est au Mali qu’il a effectué son premier voyage à l’étranger. Auparavant, il avait dépêché une délégation auprès du président de la transition au Mali.
En effet, lors de sa visite de travail et d’amitié au Mali, le président de la République du Burkina a déclaré : « nous avons effectué une visite d’amitié ce jour au Mali dans le cadre de la coopération qui existe entre le Mali et le Burkina Faso », a confié le Président Damiba à la presse. Selon ses précisions, le Burkina Faso entend surtout renforcer ses liens avec le Mali dans le cadre de la lutte contre le terrorisme : « Nous entendons dans les jours à venir mieux renforcer les partenariats militaires qui existent entre nous [le Burkina Faso et le Mali] en vue de relever davantage les défis sécuritaires auxquels nos peuples sont confrontés ».
Certains passages de son adresse à la nation au lendemain de cette visite montrent que le Burkina Faso semble être dans la dynamique d’emprunter le même chemin que le Mali dans la lutte contre le terrorisme. « Nous allons mettre en œuvre toutes les mesures nécessaires, pour d’abord reprendre le contrôle total de notre territoire et ensuite remettre notre pays sur les rails du progrès. Il s’agira en effet de poursuivre et d’intensifier les actions militaires, afin de réduire au minimum les capacités de nuisance de l’ennemi. Les nouveaux équipements militaires déjà acquis ou d’autres en cours d’acquisition nous permettront de restreindre davantage et de façon décisive la liberté de manœuvre des groupes qui refusent toujours la main tendue de la Nation », a-t-il laissé entendre.
Comme au Mali, des réformes sont prévues sur le plan de la gouvernance. « Les réformes concerneront également l’animation de la vie politique, qui a aujourd’hui plus des allures anarchiques que d’espaces de propositions pour un meilleur devenir de notre Nation. La classe politique doit porter les espoirs de notre peuple et constituer un exemple à suivre en termes de valeurs patriotiques », a affirmé le président burkinabè.
Le président Damiba, dans son adresse à la nation, a confirmé les propos de son Premier ministre. Le Burkina, comme son voisin, veut aller à la diversification des partenaires. « Sur le plan de la coopération, nous sommes très reconnaissants aux pays amis du Burkina Faso, des efforts faits à l’endroit de notre peuple en cette période décisive de son histoire. Notre mutation sera profonde tant au plan politique, social, économique, culturel que diplomatique afin d’asseoir définitivement les bases d’un État-nation stable et prospère. Dans cet élan de changement audacieux et dans l’intérêt supérieur de notre pays, nos alliances seront portées vers des options qui garantissent le respect de notre indépendance », a-t-il indiqué.
Cette déclaration du président burkinabé au lendemain d’une longue discussion avec son homologue malien en dit long. Le Burkina Faso va-t-il, comme le Mali, prendre ses décisions de restauration de la souveraineté, tout en assumant les conséquences diplomatiques qui en découleront ? Question. En tout cas, les sorties du Premier ministre Ouédraogo et du Président Damiba prouvent leur volonté de faire comme le Mali, une méthode appréciée par les peuples d’Afrique.
B. Guindo